Comment donner une note à ce monument d'amour du cinéma français ? Comment remercier Tavernier, réalisateur inégal mais amoureux parfait d'offrir ce pur moment de bonheur dont les 3 heures (et davantage !) (ponctuées par un entracte, rassurez-vous) sont une promenade enchantée, virevoltante, délicieuse, passionnante, pleine de tours et détours, de digressions, de clairières lumineuses, d'anecdotes amusantes, de perspectives intelligentes, d'extraits des plus beaux films qui se puissent ?
Cet émerveillement va courir et se renforcer au fur et à mesure que le jeune homme approfondira sa fascination, apprendra l'orthographe et la grammaire de l'image animée ; il y a dans le propos de Tavernier une intense humilité ; je crois qu'il sait bien au fond de lui-même qu'il n'a pas le génie inné, insurmontable des grands cinéastes qu'il admire et qu'il est simplement un immense amoureux des films ; ce qui ne l'a pas empêché de tourner des choses grinçantes, bouleversantes, durables, Coup de torchon
ou La vie et rien d'autre,
par exemple. Et n'être pas qu'un critique ou un commentateur le met, à mes yeux, dans un beau paradis.
Becker, d'abord, dont il fait remarquer la rigueur, la précision, l'intelligence, l'honnêteté géniale, voguant sans cesse entre les deux chefs-d’œuvre, Casque d'or
et Touchez pas au grisbi
en passant par Falbalas,
Antoine et Antoinette,
Édouard et Caroline,
Le trou
et les autres (mais bien sûr qu'il faut voir et revoir tous les films de Becker
! Bien sûr !).
Et, deuxième découverte, toujours inopinée : Tavernier entre dans une salle obscure au milieu d'un film : c'est La grande illusion
et l'épisode célèbre de la représentation de café-concert que donnent (et se donnent) les prisonniers de l'oflag. Et l'aviateur Maréchal (Jean Gabin)
qui arrive en criant de joie qu'on vient de reprendre Douaumont !. Et toute l'assistance qui se fige de bonheur en entonnant une Marseillaise rageuse au nez des Allemands. Le jeune homme, fasciné par ce cinéma-là reste à la deuxième séance…
Et puis, à partir de La grande illusion et de La bête humaine,
on passe à une longue digression magnifique sur Gabin
et de Gabin
on en vient à Carné,
ses insuffisances et ses merveilles, d'Hôtel du Nord
aux Portes de la nuit,
passant par Les enfants du Paradis.
Et il y a aussi un paragraphe sur la musique de film, l'hommage à Maurice Jaubert, le compositeur inspiré de L'Atalante,
de Carnet de bal,
du Quai des brumes
… On saute jusqu'à Philippe Sarde
et de là à Claude Sautet
; on finira par un long chapitre sur Jean-Pierre Melville
…
On a la tête pleine de films magnifiques, de films surprenants. La lumière s'allume. On est là depuis trois heures et plus. Et on se demande où sont passés Pagnol, Guitry,
Duvivier,
Autant-Lara,
Max Ophuls,
Christian-Jaque,
Clouzot,
Rohmer,
Louis Malle
à peine évoqués ou même tus… et les musiques de René Cloerec, de François de Roubaix,
de Georges Delerue
…
Un carton passe sur l'écran : il y aura, dans quelque temps un deuxième film. Au moins un deuxième. Il y a de quoi faire, lorsqu'il y a tant de pieuse admiration et tant de talents merveilleux.
Merci Bertrand Tavernier.
Réaction puérile et sans pertinence. Comment comparer la présentation d'un film, d'un seul par séance, par un critique, si compétent soit-il et celle de l'esprit même du cinéma français dans sa profondeur et sa variété ? Ça n'a aucun rapport.
Que vous le vouliez ou non, Tavernier est un créateur (dont j'ai dit les insuffisances), ce qui est tout de même infiniment plus fort que d'être un simple critique… Si Truffaut
n'était resté que le journaliste des Cahiers du cinéma, s'en souviendrait-on aujourd'hui ?
Reconnaissons à Tavernier des qualités de vulgarisateur. Le fait qu'il connaisse le cinéma en tant que réalisateur apporte une dimension d'expertise à ses commentaires. Voir les oeuvres en question, sur grand écran, en version restaurée, et en discuter en public (comme je l'ai fait hier pour Gueule d'amour dans le cadre du ciné-club de ma commune) reste une étape obligée pour un cinéphile. Impétueux : vous court-circuitez le processus officiel avec vos chroniques.
Ah ! Mais à vous lire, je croyais que Tavernier avait donné une conférence entrecoupée d'extraits de films ! Parce que vous parliez d'entracte. Je n'avais pas jeté un seul coup d'oeil sur l'affiche du film ! Parce que c'est donc un film ! Mais il va être distribué partout où celà va rester confidentiel sur la capitale ? Je ne vous cacherai pas que vous m'avez bougrement donné envie de le voir ! J'ai déjà entendu, dans des bonus Dvd, la passion de Tavernier
pour certaines oeuvres et l'écouter pendant trois heures ne serait pas pour me déplaire . C'est vrai, j'ai pensé à une conférence comme en faisaient Melville
ou Renoir
à une époque .
@Nadine Mouk : comme plusieurs émissions de télévision ont présenté le film de Tavernier, je pensais naïvement que tous ceux qui s'intéressent au cinéma savaient qu'il avait conçu et réalisé ce petit bijou (non ! ce long bijou, dont on ne se lasse pas). Promenade intelligente à travers le cinéma français, passant par des tas de chemins de traverse, s'arrêtant ici et là, digressant, s'envolant, s'amusant…
Je ne sais où vous habitez. Parce que si c'est à Recoules-Prévinquières (Aveyron), Poncey-lès-Athée (Côte d'Or) ou Pampérigouste (nulle part), vous devrez attendre la sortie du DVD. Le film n'est distribué à Paris que dans peu de salles ; sa longueur et son sujet limitent la diffusion. Reportez vous à votre Allo-Ciné habituel pour savoir si une bourgade proche de chez vous a la folie de le programmer.
Et il va y en avoir un autre ! Merveilleuse cinglerie !
D'abord, il y a bien longtemps que ma télévision ne me sert plus qu'à visionner les rares bons films qui y passent ou devient la vitrine de mes Dvds. Ensuite, vous me dites Le film n'est distribué à Paris que dans peu de salles. Je le reniflais un peu d'où ma question légitime . Et puis, ben ….. si j'en crois Allo-Ciné, je vais attendre le Dvd …(mais on m'a proposé d'acheter une bagnole, du parfum parce que je pue, une assurance vie parce que je dois être fragile, et la préparation de mes obsèques parce que je vais crever bientôt) Mais je l'achèterai à coup sûr ce Dvd au vu de ce que vous en dites. Et si, par extravaguant et inconcevable, je devais être déçue, j'enverrai la note à la direction de ce site qui transmettra .
Remarquable documentaire, en effet : analytique, synthétique, rationnel et affectif. Le cinéma français des années trente à soixante présenté à des cinéphiles ou non : chacun y apprendra ou en retirera un élément intéressant. Les commentaires sur Melville (un sacré personnage), la construction de son oeuvre, m'ont particulièrement intéressé. Il est dommage que Studio Canal n'ait pas accepté de prêter des images de ses oeuvres.
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