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Forum : L'Exorciste

Sujet : Satan parmi nous


De dumbledore, le 21 novembre 2003 à 16:05
Note du film : 6/6

L’Exorciste est sans doute LE film d’horreur par excellence. Jamais jusqu’alors – 1973 – un film d’horreur n’avait été traité de la sorte, à savoir avec le plus grand sérieux qui soit (à part ’Psychose d’Hitch et Le voyeur de Michael Powell). Aucun humour dans le film, aucun moyen de rire "avec" (comme les films gores qui mélange humour noir et horreur) ou rire "du" film (par des effets spéciaux trop ridicule pour être pris au sérieux). Non, L’Exorciste vise le réalisme, et c’est parce qu’il l’atteint que le film est aussi terrible. Il l’atteint et la porte de sortie du rire exutoire nous est interdit.

Cette porte nous étant bien fermée, William Friedkin va nous balancer ensuite les images fantasmatiques les plus terribles qui soient. Il prend une jolie gentille petite fille bien élevée et bien douce et la transforme en son opposé absolu : le diable, haineux, violent, vulgaire. Ce qui explose ici c’est toute la conception fantasmatique de « l’enfant roi », gentil et pur ( que Freud en son temps avait bien essayé d’écorner avec sa théorie sexuelle infantile). Cette figure se réduit même à une image, deux plans en fait, les plus terribles vu jusque là au cinéma d’une jeune fille à peine pubère se masturbant sauvagement à l’aide d’un crucifix en poussant des jurons obscènes.

Heureusement, William Friedkin n’est pas seulement un provocateur qui sait choqué et faire réagir les spectateurs, c’est également un réalisateur qui a l’intelligence de dépasser la provocation pour développer un propos.

Contrairement à ce qu’on pourrait dire au premier abord, ce n’est pas le Diable qui intéresse le réalisateur (il y a d’ailleurs bien peu de réalisateur à avoir fait des films sur le sujet et qui s’en soucie), ce sont ces personnages et ce qu’ils incarnent.

Un des clichés évité par le film est de n’avoir pas recouru à la maison hantée. On n’a pas la jeune femme et sa fille qui débarquent dans une maison et qui sont dérangés (après quelques minutes d’exposition) par quelque poltergeist. Non, le film démarre sur un quart d’heure sur un personnage secondaire de l’histoire, Max Von Sydow qui vient de « réveiller » quelque chose en Irak. Ensuite, on arrive aux Etat-Unis où l’on suit le personnage de Karras d’un côté et celui de Chris MacNeil et sa fille Regan de l’autre. Le point commun entre les trois personnages c’est l’incapacité de faire face aux exigences de la réalité. Le Père Merrin est malade du cœur et se trouve handicapé dans ses déplacements et action. Karras, prêtre ancien boxeur, culpabilise de ne pouvoir s’occuper de sa mère qui mourra finalement seule. Chris n’arrive pas à être suffisamment présent et à offrir la présence d’un père à sa fille Regan.

Si l’on ote l’explication fantastique du démon pazuzu (développé lui-même très peu dans le film) pour rester dans une explication plus « psychologique » de ce qui arrive à Regan, on cerne mieux le réel propos des auteurs et la métaphore qu’incarne le film : le portrait d’une société américaine inopérante, dépassée par la réalité (économique, spirituelle, physique) qui l’entoure. Le traumatisme du Viet-Nam est encore présent, la Guerre froide grand sujet des films d’horreurs est encore là. La conséquence de ces manquements est finalement de transformer nos enfants en monstres, une jeunesse bouffée par la violence, qui appelle à l’aide et que le monde adulte (scientifique des médecins et spirituel des prêtres) a bien du mal à sauver.

Ce qu’a bien compris Friedkin c’est que finalement les vraies terreurs ne peuvent être celle de monstres éloignés et mythiques, mais bel et bien celles issues des craintes quotidiennes et individuel de chacun d’entre nous.

Un petit mot sur cette version longue. Pour une fois, il ne s’agit pas d’une « director’s cut » mais d’un « screenplayer’s cut ». Les scènes rajoutées (sans intérêt si ce n’est appuyer encore plus sur ce qui était dit en finesse) avaient été refusées à l’époque par le réalisateur qui s’opposait à son scénariste William Peter Blatty. Cette nouvelle version est donc celle de l’échec de William Friedkin.


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De Impétueux, le 16 juin 2006 à 20:28
Note du film : 6/6

Ce qui intéressant, avec Satan (et c'est pourquoi je n'adhère que partiellement à la critique de Dumbledore, par ailleurs fort riche et subtile, comme à l'accoutumée), c'est que sa grande force consiste à faire croire qu'il n'existe pas, comme disait je ne sais plus qui, alors qu'il est si évidemment présent dans tous les replis de notre monde et qu'il resurgit périodiquement en se gaussant bien de ceux qui avaient pu croire qu'il faisait partie des vieilles lunes, entre sabbats de sorcières sur leur balai et élucubrations alchimistes.

D'où la force démonstratrice de L'exorciste, à peine corrigée par quelques excès visuels, quelques outrances superflues (les flots de bile (?) rejetés par Reggane, ou, dans la version longue, sa descente d'escalier "en araignée") qui n'apportent rien.

Ce qui est angoissant, c'est le processus de prise de possession et de dégradation peut-être irréversible, processus qui salit, qui contamine, qui démolit la vie tranquille d'une famille (au sens large : j'inclus domestiques et l'assistante-demoiselle de compagnie, Sharon, mais le livre de Blatty est à cet égard plus explicite), d'une famille indifférente au Mal, qui ne croit ni à Dieu, ni au Diable et se trouve confrontée à l'Epouvante absolue

Ce qui est superbe, c'est le prélude, en Irak du Nord, à deux jets de pierre de la Terre Sainte, l'angoisse du Père Merrin après qu'il a découvert la statuette du Démon, l'horloge qui s'arrête, la voiture lancée à tombeau ouvert dans la ruelle qui manque de le renverser, la bataille de chiens sauvages et, au coucher du soleil la sorte de défi que l'Exorciste reçoit du Démon…

Ce qui est subtil, c'est l'angoisse de Karras, devant sa vocation incertaine, ses doutes et sa culpabilité, c'est le choix de ce colosse à l'âme faible, à la spiritualité douteuse : le Démon connaît bien les défauts de toute cuirasse…

Ce qui est poignant, c'est le mélange entre les grossièretés presque puériles de Satan (dans l'église, les profanations pourraient presque avoir été commises par une bande de galopins satanistes) et sa détermination, son projet rationnel de perdre des âmes : ce n'est pas seulement l'âme de Reggan qu'il veut, c'est celle de tous ceux qui l'approchent et qu'il cherche à contaminer…

Plus que l'excellente Malédiction, plus que le superbe Rosemary's baby qui montrent une sorte d'action concertée s'appuyant sur la malfaisance humaine, finalement relativement claire, L'Exorciste fait éclater la singularité et la puissance protéiforme du Mal.

Appuyé sur une distribution homogène, le film a gardé, trente trois ans après une qualité et une force exceptionnelles ; c'est souvent ce qui se passe quand on ne se moque pas de son sujet.


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De vincentp, le 17 juin 2006 à 15:52
Note du film : 4/6

A la chronique de Dumbledore, on peut ajouter quelques points complémentaires :

  • William Friedkin fut très surpris par l'énorme succès public de son film. Sans doute que celui-ci sortit en salles au bon moment (à une époque de remise en cause des idéologies). Sans doute aussi était-il original pour son époque mais néanmoins à la portée d'un large public. Ceci peut expliquer cela.
  • le film est bien fait, solidement mis en scène mais sans génie (je suis donc moins enthousiaste que vous à son sujet), avec des longueurs à son début (ce que reconnait volontiers son metteur en scène), et des trucages efficaces mais un peu datés. Le point fort de ce film est peut-être l'étrange et solide alliage entre une mise en scène sans fioriture et son propos audacieux, qui fera école (1).

Ce n'est probablement pas le meilleur film de Friedkin (certainement inférieur sur un plan artistique à le convoi de la peur, par exemple) mais peut-être le film qui lui a permis d'exister durablement comme metteur en scène (car ayant montré sa capacité à atteindre un large public, même sur des sujets à priori difficiles à adapter à l'écran).

(1) les dents de la mer est construit d'une façon assez similaire, alternant scènes très académiques de vie en société et scènes d'horreur brutales, mais avec une entrée en matière complètement différente. Le début de le cinquième élément de Luc Besson présente des ressemblances avec le début de l'exorciste


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De PM Jarriq, le 20 août 2006 à 18:42
Note du film : 4/6

Ayant revu la "screenplayer's cut" de L'exorciste qui m'avait fort déplu à première vision, je ne peux que constater à quel point Friedkin a plus de talent que Blatty. Ce qui en soit, n'est pas un scoop, pour tous ceux qui ont vu le n°3 de la série… Tous les rajouts sont lourds, parfois grotesques (la femme "araignée" bavant le sang : que vient-elle faire là, surtout à ce stade de l'histoire ???), platement explicatifs (les inserts de démons dans la cuisine ou la chambre de Regan), et au bout du compte, ce film qui a hanté les mémoires pendant plusieurs décennies, en ressort amoindri, démystifié, banalisé, comme si… le Démon en avait été chassé par les F/X. Reste bien sûr, que la mise en scène à la fois invisible et puissante est toujours aussi impressionnante, que le casting est miraculeux (qui d'autre aurait pu jouer Karras, que le très inconnu Jason Miller. Mais vraiment, avoir rallongé le rôle du flic fait parfois ressembler la structure à un téléfilm, les séquences d'hôpital sont d'un ennui mortel, et l'épilogue à la Casablanca est naïf et tombe comme un cheveu sur la soupe.

Le seul vrai L'exorciste est celui sorti en salles en 1973, et il faut espérer que ce remontage crétin ne le supplantera pas, comme par exemple le fit Blade runner par rapport à sa première (et plus faible, cette fois) mouture.


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De starlight, le 12 juin 2007 à 21:26

Jusqu'en 2001, seuls les films X et de violence extrême étaient interdits au moins de 18 ans. Depuis un Décret du 12 juillet 2001, un film "non-pornographique" peut être aussi interdit aux moins de 18 ans…

Hormis ces cas (pornographie), ceux qui étaient interdits aux moins de 18 ans et aux moins de 13 ans, un Décret du 23 février 1990 a ramené l'interdiction à 16 ans pour les premiers et à 12 pour les seconds… Concernant "l'Exorciste", le film a dû faire l'objet d'un réexamen par une Commission ad'hoc…


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De DelaNuit, le 8 mai 2008 à 13:46

Pour info, le démon d'origine mésopotamienne ayant pris possession de la gamine de L'exorciste est actuellement visible en statuette (rare !) à l'exposition "Babylone" du Louvre jusqu'au 2 juin 2008.

Ce démon, répondant au nom original de Pazuzu (ou Pazuzus en anglais) est aisément reconnaissable à son rictus hideux, son chignon, ses pattes d'aigle et ses quatre ailes, deux dressées vers le ciel, et deux tournées vers la terre (et les Enfers).

Les Babyloniens craignaient le méchant Pazuzu mais lui faisaient aussi des offrandes car il n'était pas uniquement néfaste puisqu'il affrontait pour les renvoyer aux Enfers d'autres démons encore plus néfastes que lui…


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De fastivon, le 10 mai 2008 à 20:11
Note du film : 5/6

Le chro-niqueur ciné de "L'Express"/1974 s'était lancé dans une explication digne des plus grandes savantes compétences (pour preuve, ses trucs me sont restés jusqu'à maintenant), de trois effets visuels qu'il avait relevés. Ce dont aucun spectateur n'est en mesure de trouver par lui-même, à moins de posséder un esprit malin.

1) "Le vomi ? Pfffff ! De la purée de pois verts…"

2) " La tête pivotante ? Un mannequin !"

3) "La lévitation au-dessus du lit ? Avec des fils, tout est joué !"

Ci-après, est proposée une théorie personnelle développée à partir du triplé de points directement issus du maître à penser, l'attaché de la publication de haut niveau ci-dessus citée, afin d'à jamais honorer la mémoire de l'infinie sagesse de cet expert en Q.I. et ex-paire de coulis.

1 – Hummm… Le dégueulis pouvait tout aussi bien résulter d'une ingurgitation à la diable, d'herbes et de légumes aux couleurs de l'espérance. Il se trouve que la soupe ne soit pas si assimilable, car la substance finale après voyage interrompu dans l'organisme, est évacuée par là même où elle est entrée, la soupape de sûreté. La matière obtenue n'est peut-être pas corrosive, seulement l'arôme qu'elle dégage n'est pas fugace apparemment, ni très suave certainement. À quand le Ciné-Odorama ?

2 – Tchao Pantin. Pinocchio fait bien des tours sur lui-même, la tête fixe ! Imaginez seulement en plein milieu de la nuit, votre légitime, qui vous tourne le dos, tout à coup dans un crissement de freins, tourne sa tête vers vous (tandis que son tronc a conservé sa position précédente…) ! Elle vous regarde fixement, et pas qu'un pneu…

3 – Quel meilleur endroit que le pieu pour s'envoyer en l'air ? Quel bas zig aurait l'instinct de penser aux ficelles pour lancer des piques en restant de glace ?

Le spectacle est dans la salle ! Il se raconte qu'aux States, un grand nombre de personnes se sont évanouies, d'autres ont vomi… On se représente la trempette capillaire pour ceux assis devant, les réanimations bouche-à-bouche… Plus que jamais nécessaire est le spray buccal. Le bouche-à-oreille aussi avait fonctionné à merveille, les cinés devaient être combles comme les senteurs qui y régnaient en maîtresses. Au moins, si la température était estivale et la ventilation en panne, toutes les odeurs se seraient retrouvées amalgamées en amas compact et uniforme (il n'y aurait plus de coupables), qui feraient le bonheur des fins nez. Occasion unique pour eux d'éprouver leur capacité à discernement de fumets comprimés en un tout.

Quoi qu'il en soit, la mode de la vidange a franchi l'Atlantique pour s'emparer même des fameux irréductibles.

Sur le grande vitre d'un cinéma on ne pouvait ignorer cette énorme couche multicolore avec éclaboussures autour. On sentait qu'elle n'était pas le fait d'une seule poule. Il en aurait fallu une vingtaine, pour pouvoir atteindre une telle superficie. D'ailleurs comment auraient-elles pu pénétrer dans le hall, "faire" aussi haut et au même endroit, à moins d'être des gallinacées karatéka. En procédant par… élimination, on déduisit sans l'ombre d'un doute, que c'était bien l'oeuvre d'un humain…

Curieux : un regard à droite, un coup d'oeil à gauche, on ne voyait nulle trace de MacDo. Où était donc le berceau de la cause ? En levant la tête, on vit la grosse affiche du film… Mais voilà, on est arrivé. Il suffisait de faire les petits Poucet.

Soudainement, un monsieur aidé d'un autre, courut précipitamment hors de la salle, gerba (pas des fleurs) dans sa main. La seconde éruption ne fut pas une simple goutte qui la fit déborder. Cela acheva de s'écouler entre ses doigts écartés (cinq, entre lesquelles naquirent quatre cascades). Le troisième volcan fut le coup de grâce et même l'autre main de secours ne parvint à contenir l'océan, et le tout finit en un bruit sonnant comme un amerrissage forcé sur le beau tapis rouge à présent aqueux…

Les gens faisant la queue à la caisse à côté, tout comme la guichetière (décidément la mine aussi désagréable que toute autre) ne faisaient qu'esquisser la même grimace, nez retroussé comme s'ils allaient chialer, cou contre menton et épaules haussées dans un geste de futile protection et surtout un mouchoir sur les narines. Et ils n'arrêtaient pas de fixer le filon aurifère. Pourquoi ce besoin des gens de vouloir à tout prix "voir" ce que les autres ont mangé ?

Une fois à l'intérieur, on va se trouver une place tout au fond, où il n'y a personne derrière…

Ouf, cela a été une belle soirée. Il n'y a eu que ces deux incidents sans gravité. Un en léger différé, l'autre en grande pompe et en direct…

Si on allait dîner ? Une soupe de pois ? Chiche…

D'une beauté sublime est l'image du père exorciste en face à face avec l'inquiétante statue… Que reste-t-il d'espoir, si sa foi chancelait et le quittait ? Le démon ne guette que cette faiblesse auto-dévastatrice pour en finir avec lui… Frayeur bleue lors de sa matérialisation dans la chambre !…


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De fretyl, le 4 avril 2010 à 23:06
Note du film : Chef-d'Oeuvre

L'exorciste n'a rien perdu et ne perdra sans doute rien, de sa grandeur. Je n'ai pas trop apprécié la version intégrale qui était récemment sortie dans les salles de cinéma. Escroquerie totale, puisque la version intégrale n'apportait je crois, pas plus que quelques secondes, lors de la descente de Regan dans l'escalier.
Passage que je trouve par ailleurs inutile, puisqu'il fait partie des quelques petits excès, que l'on peut trouver dans L'exorciste. Il ne s'agit pas de grand chose : quelques plans un peu trop spectaculaires, comme quand la petite fille se soulève pendant l'exorcisme.
Je n'avais pas non plus trop aimé cette version, parce que le film était sortit remastérisé. C'est à dire que les voix de la version française de 1973, avaient été remplacées par d'autres.

Il m'a déjà été donné l'occasion de voir une remasterisation des Les dents de la mer. Personnellement, je ne peux pas. Après avoir entendu après tant d'année et après de multiples diffusions la voix chaude de la vf du chef Brody, j'avais trouvé désagréable d'entendre la voix (même si ce n'est pas celle de Roy Scheider) changé par celle d'un autre. J'avais l'impression de ne pas voir le même film. Pour L'exorciste il en a été de même.
Donc je reste en permanence sur la version de 1973. Version qui devient par ailleurs difficile à trouver en dvd.

Ce qui me fait mal avec L'exorciste, c'est que ce sont généralement les spectateurs de Michael Youn ou de Taxi qui en parlent le plus. Des bandes de jeunes abrutis qui se regardent ça entre eux, un pétard entre les doigts et ensuite vont raconter les passages ou Regan vomit, les hurlements, la scène de l'escalier aussi, qui les a fait flipper et ne gardent en mémoire que deux ou trois minutes du film. J'ai aussi remarqué que L'exorciste a toujours bien plu aux jeunes ados de 13/14 ans, que leur puberté pousse à aller chercher des images chocs et aussi parce que leurs parents leurs interdisent souvent de voir le film.

Tous ces spectateurs, tous ces prétendus admirateurs du film de Friedkin m'emmerdent profondément ! Ils m'emmerdent, parce que depuis vingt ans ils font passer L'exorciste pour une grosse connerie. Les résumés rapides dans les cours de récréation (lycée ou collège) font du mal au film.
Pour beaucoup de gens, qui n'ont pas vu le film, L'exorciste ne peut être qu'une grossièreté, justement parce que sa réputation a été salie par des spectateurs de piètre qualité.

Les spectateurs qui voient L'exorciste aujourd'hui ne tiennent pas compte de la merveilleuse réalisation de William Friedkin, ils ne regardent pas les magnifiques éclairages, ils n'entendent pas la musique d'Ennio Morriconne, ils ne comprennent pas l'incarnation philosophique du film… Non ! Ils se croient dans un épisode de X Files !

Bizarrement personne ne mentionne jamais l'excellent jeu des interprètes de L'exorciste.
Ellen Burstyn que je ne connaissais pas du tout et que je n'ai vu nulle par ailleurs que dans L'exorciste est parfaite. C'est avec réalisme, qu'elle interprète, une femme honnête, droite, bonne mère, dépassé par une situation inexplicable. Jason Miller homme de Dieu sympathique, s'interrogeant sur sa foi. Lee J. Cobb en flic tranquille, Max von Sydow en prêtre exorciste… Si les interprétations sont excellentes, c'est parce que les personnages sont parfaitement bien dessinés. Les acteurs n'ont plus qu'à entrer dedans, tels que dans un costume sur mesure. Pas un détail de personnalité, de psychologie n'est oublié chez les principaux protagonistes de cette sombre histoire.

La force horrifique du film réside autant dans ses images que dans son son. Pour trouver la voix du démon Friedkin fit, parait-il, appel à une ancienne alcoolique atteint d'un cancer. Pour la v.f, j'ignore, comment ça s'est passé.
Toujours est-il que même dans la version française, lorsque l'on voit le père Karras écouter des enregistrements de paroles à l'envers, le soir seul dans sa petite chambre, on a la trouille. Comme si l'enregistrement nous faisait écouter l'enfer de Satan tel qu'il doit se dérouler.

Les premières angoisses, arrivent bien avant que la petite fille commence à s'enfoncer des crucifix dans le sexe ou à devenir difforme. Le passage ou les deux docteurs assistent, aux mouvements de Regan qu'ils prennent pour des spasmes musculaires et que l'agitation emmène la gamine vers des hurlements insupportable met déjà mal à l'aise.

Il y avait devant les cinémas (en France peut-être aussi ?), on le sait, des ambulances. Des malaises avaient parait-il eu lieu chez certaines personnes. Le film était à l'époque quelque chose de nouveau. Un film avec des images extrêmes, tel que le public n'en avait jamais vues. Il faut savoir que c'est L'exorciste qui provoqua la faillite définitive et démoda la Hammer. Il est bien évident que Dracula ou Frankenstein n'étaient plus dans le coup. Un souffle nouveau venait de naitre sur le cinéma fantastique. Souffle qui entrainera dans les années qui suivent La grande menace, La malédiction

Ce qui est intéressant aussi dans L'exorciste, c'est à quel point on pourrait penser aujourd'hui que le film aurait pu être réalisé par Spielberg. C'est un film qui lui ressemble. Dans la plupart de ses films : E.T. l'extra-terrestre, Les Dents de la mer, Poltergeist, c'est souvent une petite famille tranquille, qui se retrouve débordée par des évènements étranges. Il apparait comme une évidence que quelques années plus tard ça ne pouvait être que lui qui pouvait réaliser dans la même veine Poltergeist, dont la finalité rappelle un peu celle du film de Friedkin.

L'exorciste c'est plus qu'un film d'horreur. Le schéma ressemble plus à celui d'un film dramatique. L'exorciste c'est un film sur le diable, mais c'est aussi un film sur la maladie, sur la schizophrénie… Si la possession était officiellement reconnue comme crédible, il deviendrait alors évident que L'exorciste n'est pas un film d'horreur, mais bel et bien un drame. Un film grave sur l'incapacité d'un système hospitalier américain à court d'argument. Un film sur une société toute entière. Sur le mal personnifié, désinhibé. Rien ne laisse soupçonner au départ, du moins à partir du moment ou l'on quitte l'Irak pour aller à Georgetown, que nous sommes dans un film fantastique. Ce sont des petites scènes du quotidien, des gens réalistes qui sont filmés. On n'entend pas de musique inquiétante, aucun évènement à proprement dit surnaturel ne survient. Tout est lucide, sauf une chose le mal dont est atteint Regan.

Pour avoir connu à une époque un prof de français très catholique et très sérieux, un vieux prof à l'ancienne, dont un élève ne peut mettre, la parole en doute, je m'étais fortement interrogé lorsque celui-ci avait affirmé avoir été contacté et pour prier dans exorcisme en Italie.
Comment un type aussi sérieux que lui, aussi lucide, aurait-il pu inventer un tel mensonge ? Depuis, je dois le dire, le sujet de l'exorcisme et des cas de possession, m'a toujours intéressé.

William Friedkin a réalisé un chef-d'œuvre. Un film phare dans le domaine du fantastique, qui pousse les portes du genre pour moderniser un style que l'on croyait déjà à l'époque essoufflé. Un film maudit pour certains. Un film dont on a même dit qu'il avait porté malheur à l'équipe de tournage… Un film mystérieux… Fascinant…


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De verdun, le 13 septembre 2014 à 02:11
Note du film : 2/6

J'aime bien le cinéma de Friedkin mais je ne comprend guère l'enthousiasme général pour ce film.

Le casting est beau, la musique de Mike Oldfield mythique et les séquences d'ouverture possèdent une certaine grâce mais pour le reste, je n'ai pas ressenti le moindre frisson face à une oeuvre qui me semble avoir beaucoup vieilli, parfois plus ridicule qu'autre chose.

Je suis sans doute passé à côté de quelque chose , pourtant j'adore les séries B d'épouvante.


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De Arca1943, le 13 septembre 2014 à 02:43
Note du film : 5/6

«Je ne comprend guère l'enthousiasme général pour ce film… »

L'explication m'apparait toute simple: c'est que comme les Vikings, vous ne connaissez pas la peur.


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