Forum - Le Casanova de Fellini - Erreur félinienne
Accueil
Forum : Le Casanova de Fellini

Sujet : Erreur félinienne


De paul_mtl, le 25 octobre 2006 à 14:40
Note du film : 3/6

J'ai vu ce film il y a longtemps et je peux vous dire que ce Casanova de Fellini a peu avoir avec le réel Casanova que je découvre à travers ses memoires.

Ce film m'avait plutot dégouté du personnage alors que ses memoires me fait apprecier ce libertin chretien avec son humour, ses traits d'esprit et sa connaissance de la philosophie.

Ce film, il faut le voir comme une tres libre interpretation, une oeuvre tres personnelle de Fellini qui part du mythe (et de Don Juan) pour exprimer son opinion sur le libertinage avec sa morale chretienne.

Assez décu par le propos.


Répondre

De lych666, le 25 octobre 2006 à 17:58
Note du film : 4/6

Je me souviens avoir lu un recueil des mémoires de Casanova intitulé, "Histoire de ma vie", en édition de poche, s'attardant sur quelques passages importants de la vie du célèbre séducteur. Intéressé par ce personnage extraordinaire, sa vie mouvementée et passionnante, je suis resté un peu sur ma faim car ce recueil était un peu bref, je me suis donc jeté sur le premier volume de la collection Bouquins où tout les évènements de la vie de Casanova sont raconté par lui même. Je me suis arrêté à ce premier volume car la narration devient un tantinet lourdingue quand on commence à cerner le personnage qui, je dois dire, ne se prend pas pour de la m… Je vous donne donc bien du courage pour lire ces trois volumes de 1000 pages chacun, peut-être qu'un jour, je lirai la suite, mais ce n'est pas pour demain…

Quand au Casanova de Fellini, c'est un délire propre au réalisateur qui ne transmet pas la véritable identité du personnage, mais qui se sert de sa réputation pour en inventer un autre (Donald Sutherland, un blond aux yeux bleus interprétant un italien brun aux yeux bruns)… Je n'ai pas spécialement été enchanté par ce film à l'ambiance un peu étrange, limite pas rassurante, je trouve les personnages un peu effrayants.

J'attends avec joie qu'un réalisateur se mettent au turbin pour nous pondre une œuvre fidèle et chiadée… Un Milos Forman ou quelqu'un comme ça serait le bienvenu…Mais bon, je n'ai pas encore vu toutes les adaptations,est-ce-que la dernière en date, celle de Lasse Hallstrom, vaut elle le coup?


Répondre

De starlight, le 25 octobre 2006 à 18:26
Note du film : 5/6

Qu'importe que le personnage "brossé" par Fellini soit conforme à la biographie du héros… Nous sommes dans un monde "félinien" et le titre souligne bien cette appartenance "Casanova de Fellini"…

Nous sommes très proches de certaines mises en scène d'opéra dont l'audace picturale ferait frémir les librettistes de l'époque…

Ajoutons que la très belle musique de Nino Rota vient "appuyer" (avec humour)certaines scènes !…


Répondre

De paul_mtl, le 25 octobre 2006 à 18:30
Note du film : 3/6

J'ai empunté aussi ce livre de poche "Histoire de ma vie" qui contient les extraits de l'edition originale (avec les italianismes de l'auteur) mais que je n'ai pas encore lu, juste feuilleté.

J'ai commencé par un livre qui se base sur la version remaniée de Laforge et complete mais réduite aux années 1744 a 1756. On garde ainsi les enchainements et le rythme. Je lirai ce livre de poche pour les extraits qui sont avant et apres cette periode. Le personnage a effectivement beaucoup d'amour-propre ce qui m'apparait comme un obstacle à un amour durable.

Ceci dit il faut resituer le personnage au XVIIIe siecle avec la mentalité mais pour cette époque il a un style et des idées relativement modernes. J'ai lu les 200 premiere pages d'un trait et c'est vrai que parfois certains passages interesseront plus l'historien que le lecteur d'aventures.

J'ai relativement sauté tres peu de passages. C'est un homme d'esprit qui sait raconter même si parfois il fait trop de digressions érudites ou mondaines pour l'intensité de l'action. Sinon j'ai fait un petit récapitulatif sur Casonava avec toutes les ref. sur
http://www.dvdclassik.com/phpBB2/viewtopic.php?t=23037

L'édition complète de "Histoire de ma vie" est composé de 3 livres de 1500p environ.


Répondre

De paul_mtl, le 25 octobre 2006 à 18:57
Note du film : 3/6

Qu'importe que le personnage "brossé" par Fellini soit conforme à la biographie du héros.

Qu'importe oui si on a lu sa biographie mais c'est une minorité de personnes.

Quand je l'ai vu je me suis désinteressé du personnage réel.

Le récent Casanova m'a donné le gout d'en savoir plus et je remercie le réalisateur qui a fait une fiction plus attrayante.

Je trouve la biographie du personnage bien plus riche, intelligente et interessante que la fiction de Fellini et c'est souvent ainsi.

Fellini a fait un mélange de mythe, de Don Juan, … et le résultat est presque l'antithese du personnage réel.

Alors "n'est pas conforme" m'apparait comme un doux euphemisme.


Répondre

De droudrou, le 25 octobre 2006 à 19:28

D'accord avec toi, mais le monde de Fellini est le monde de Fellini. Il n'est pas le premier réalisateur à prendre un sujet et lui donner sa vision vraiment personnelle quitte à ce que certains détails puissent devenir outranciers par rapport à la vision du géniteur de l'oeuvre. L'avantage est que parfois des détails insignifiants prennent soudain une importance hyper valable dans la mesure où le lecteur ou le public en temps ordinaire les aurait occultés.

C'a été le cas aussi avec Kubrick et c'est ainsi qu'il a pu se fâcher avec les auteurs qui ont travaillé avec lui. Je pense que les cas les plus flagrants sont Burgess et Nabokov mais aussi Sch… enfin "Eyes wide shut". Barry Lyndon qui est un chef d'oeuvre m'a paru d'autant plus fort en termes de réalisation dans la mesure où, après lecture, je l'imaginais intransposable pour le cinéma.

Ce n'est donc pas pour cela que les 2 oeuvres soient à rejeter.


Répondre

De lych666, le 25 octobre 2006 à 19:35
Note du film : 4/6

J'aurai plutot pensé à Stephen King dans un premier temps, vexé de l'interprétation très libre de son Shining… Kubrick aurait affirmé que son livre n'était pas terrible mais que son film allait l'améliorer… Culotté le bonhomme. En tout cas, le film Shining est génial…


Répondre

De paul_mtl, le 27 octobre 2006 à 13:48
Note du film : 3/6

Voilà, j'ai terminé "Casanova Memoires 1744 – 1756" par l'évasion de la prison des plombs.

Un des passages essentiels du livre dont j'ai verifié dans "histoire de ma vie" (extraits,350p) n'a que la phase finale. Dommage.

Ce livre donne un apercu du texte complet mais y retranche trop de passages interessants. Et comment pourrait il en être autrement si on retranche les 9/10eme d'un bon livre ? Je suis d'accord que plusieurs aventures amoureuses ne sont pas essentiel et redondantes mais j'aurrai deja de la difficulté à retrancher 3/10eme du livre.

Dans les oeuvres completes, on note que Casanova n'a pas terminé sa biographie (de 1774 a 1798) dont il nous reste que les titres de chapitre. Je terminerai pas une opinion flateuse de cet aventurier italien du XVIIIe siecle qui a parcouru l'Europe.

"J'ai beaucoup voyagé, beaucoup étudié les hommes individuellement et en masse mais je n'ai trouvé la vraie sociabilité que chez les Français; car eux seuls savent plaisanter, et la plaisanterie fine et délicate, en animant la conversation, fait le charme de la societé."


Répondre

De myrtho, le 23 août 2007 à 17:26

Tina Aumont s'était un jour définie comme une "midinette métaphysique" ; elle était en tout cas le paradoxe incarné. Altière et somptueusement brisée, familière et mythique.

La France l'a ignorée, savoir si elle en souffrait… elle préférait parler de ceux qu'elle aimait, Pierre Clémenti, Jane Fonda… pas d'elle, tant qu'elle vivait elle appartenait à la vie qu'elle irradiait, irritante, drôle et simple comme ceux qui n'en font pas un genre. N'allez pas entendre, naturelle, le temps, la maladie ne l'ont jamais enlaidie. Enfant je priais pour qu'il épargne la beauté, les œuvres d'art finalement j'aurais été exaucée, chèrement au prix de l'absence. Elle voulait tourner avec Almodovar, je n'ai pas su l'aider autant que…

Alors au nom du cinéma redonnez lui l'éternité, celle des salles obscures. Tina embrasse Pierre pour moi et longue vie à Jane Fonda. Damien un peu plus seul


Répondre

De DelaNuit, le 11 février 2008 à 18:32
Note du film : 4/6

A la vision du film de Fellini, il apparaît en effet que son personnage est beaucoup plus proche du mythe de Don Juan.

En effet, le véritable Casanova était un séducteur libertin heureux de vivre qui se plaisait à tirer de la vie bien des plaisirs, autant qu'à en donner.

Le personnage littéraire de Don Juan, à l'inverse, est omnubilé par son besoin compulsif de conquérir les femmes pour les abandonner aussi tôt et, ténébreux, ne semble guère heureux de vivre…

Le Casanova de Fellini semble un mélange des deux. Libertin vénitien par l'apparence, séducteur compulsif éternellement insatisfait par le comportement. Au final un personnage ambigu, certes peu sympatique.

Le film lui même semble jouer sur ces deux tableaux. Formellement splendide en images, décors, costumes, musique… il me laisse au fond une impression de malaise.

Si le but de Fellini était de brocarder les séducteurs impénitents, c'est gagné !

Je me demande si ce film connut un réel succès lors de sa sortie, et comment il fut reçu par les mâles séducteurs italiens au sang chaud, auxquels il renvoyait une image peu glorieuse…


Répondre

De Pamina, le 11 février 2008 à 18:55
Note du film : 5/6

Impression de malaise ?… Oui et non, car à l'époque de la sortie du film, Fellini avait un passé provocateur (je pense notamment à la "Dolce Vita" et au "Satyricon") qui était connu de tous… Cette vision très personnelle de la vie s'apparente beaucoup à la "Commedia dell' Arte"… On allait voir Fellini pour s'attendre à quelque-chose "hors du commun"… et il est vrai qu'en Italie à l'époque (j'y étais) il y avait les "anti" et les "pro"… mais je pense que l'on a dû retrouver cette dualité dans d'autres pays !

Pour en revenir au "Casanova" : l'une des images fortes est celle où il se retrouve dans un immense lit à baldaquin, accessible par une échelle… tel un poulailler… avec une dizaine de femmes jacquassant à qui mieux mieux…

Un film-opéra qui doit beaucoup notamment à l'interprétation de Donald Sutherland, véritable automate de l'Amour… et dont les exploits sont ponctués par la présence d'un oiseau (phoenix ??)… s'égaillant sur des notes de musique signées Nino Rota…

 

Répondre

De Arca1943, le 11 février 2008 à 19:38
Note du film : 4/6

«  …les mâles séducteurs italiens au sang chaud… »

Ça fait pas un tout petit peu cliché touristique ? Autrement le "malaise" qui m'a pris devant ce film est surtout d'une machine brillante, mais qui s'exerce à vide. Malgré la tonalité plus sombre qu'à l'ordinaire, les dessins de Topor et Sutherland, j'ai une impression de déjà vu et de redite.

Sur le même sujet, je préfère de loin le Casanova de Comencini.


Répondre

De DelaNuit, le 12 février 2008 à 18:50
Note du film : 4/6

Vous avez raison, ma formule est très cliché. Je la tiens d'une italienne de mes amis, laquelle m'enseigne sa langue natale et m'entretient régulièrement et avec humour des comportements de ses compatriotes.

J'imagine qu'elle sait de quoi elle parle… J'imagine surtout qu'en bonne méditerranéenne, elle n'hésite pas à forcer le trait !

Quoi qu'il en soit, lorsqu'on aime le cinéma ancien, on ne craint guère les clichés. L'important est que les réalisateurs les manient habilement au service d'un bon scénario.

Dans le Casanova de Fellini, j'ai trouvé finalement bien triste que le héros aux appétits sexuels insatiables et compulsifs en soit réduit à trouver l'âme soeur auprès d'une femme automate aux gestes mécaniques…

En ce qui concerne le vrai Casanova, je vous rejoins totalement, replongeons-nous dans le touchant Casanova, un adolescent à Venise de Comencini..


Répondre

De Impétueux, le 12 février 2008 à 19:12
Note du film : 3/6

Je vous rejoins tout à fait, chers amis ! C'est même, à mes yeux, assez ennuyeux, répétitif et lassant, malgré des images réussies…

je crois bien que c'est le dernier Fellini que je suis allé voir : la lassitude m'avait gagné…

Et le ravissant film de Comencini, évidemment moins médiatisé, est le contre-exemple éclatant…


Répondre

De Arca1943, le 12 février 2008 à 19:36
Note du film : 4/6

« Je crois bien que c'est le dernier Fellini que je suis allé voir : la lassitude m'avait gagné… »

Ah quel dommage, vous vous êtes arrêté juste avant la réjouissante pochade Répétition d'orchestre, qui est un vrai petit bijou !


Répondre

De pamina, le 12 février 2008 à 20:11
Note du film : 5/6

Je voudrais poser une question (qui n'est sûrement pas indiscrète) à Impétueux.

Vous dites : "vous êtes arrêté à un certain moment dans la filmographie de Fellini"… Ceci me fait penser que j'ai lu dans l'un de vos commentaires que "vous n'aviez jamais visionné l'oeuvre d'Alfred Hitchcock"… Ai-je rêvé ?… et dans l'affirmative, quelle en est la raison ?… Si cela s'avère juste, cela me surprend pour quelqu'un qui semble avoir des connaissances approfondies de l'ensemble des réalisateurs de ce Monde !


Répondre

De vincentp, le 12 février 2008 à 22:34
Note du film : 6/6

C'est vrai : il ne connait quasiment rien de Fritz Lang, Hitchkock, John Ford, Ozu, Kurosawa, Mizoguchi, Ray, Walsh, et j'en passe. Ses connaissances sont essentiellement centrées sur le cinéma français de type classique des années 30 à 70, avec des écarts pour quelques films d'horreur et érotiques contemporains. Un des films les plus appréciés par Impétueux s'appelle d'ailleurs "ah les belles bacchantes".


Répondre

De Arca1943, le 12 février 2008 à 23:35
Note du film : 4/6

Mais Impétueux est un enthousiaste de Kubrick, Kusturica, Mikhalkov


Répondre

De vincentp, le 13 février 2008 à 12:07
Note du film : 6/6

…et de Rohmer. Vous avez raison Arca : Impétueux ne laboure pas toute la campagne, mais il laboure un champ à fond dès lors que celui-ci répond à certains de ses critères (bien mystérieux).


Répondre

De Impétueux, le 13 février 2008 à 17:37
Note du film : 3/6

Oh là là, que d'honneur (et que de sarcasmes !) sur mes goûts qui ne méritent ni cet excès d'honneur, ni cette indignité ! Cette glose sur mes préférences et mes ignorances n'est pas de très bon goût et j'ai un peu de réticence non pas à me justifier, mais à expliquer des travers qui tiennent à mon âge, à mon caractère, à mon histoire intime, à mon éducation, toutes choses qui n'ont pas en soi grand intérêt pour les lecteurs de ce site. Mais comme Pamina me fait l'honneur de m'interroger directement, que AlHolg et que Vincentp se moquent (gentiment j'en conviens) de moi et que Arca prend un peu ma défense, je ne vais pas me dérober.

Je vais d'ailleurs commencer par citer Arca qui sur le fil du difficilement nommé Kin'yû fushoku rettô: Jubaku explique sa récente conversion aux films de samouraïs : Au cours des six derniers mois, j'ai connu une véritable frénésie de films de samouraïs. Il est vrai que j'ai la mentalité d'un trekkie : après avoir vu trois comédies à l'italienne, il fallait que je les voie absolument toutes, et la même chose s'est produite avec cet autre genre. (c'est moi qui souligne il fallait que je les voie absolument toutes). C'est bien ce que je fais, avec Duvivier, mais aussi Guitry, les nanars français des années Cinquante ou Kubrick et Kusturica.

Après Arca, voici Julien Gracq (j'espère qu'Arca appréciera le rapprochement) expliquant pourquoi il y aura de moins en moins de lettrés pour goûter ses œuvres : Conséquence d'une culture à dominante de plus en plus horizontale (toute la littérature actuelle du monde) et de moins en moins verticale (le prestige des anciens).

En d'autres termes, peut-on tout apprécier ? Oui, répond notamment Vincentp, qui butine et picore tel le charmant jeune rouge-gorge qu'il est, un peu partout, ici et là. Non, ai-je depuis longtemps répondu : le temps nous est à tous compté, à moi un peu davantage, puisque je ne suis pas tout jeune, et je n'ai plus le loisir, ni l'envie de me pencher sur ce qui ne m'intéresse plus (Fellini ou le western) ou ne m'a jamais intéressé (l'Asie, et donc le cinéma japonais, coréen, chinois ou indien).

Mes failles, mes gouffres, mes précipices sont à la mesure des quelques réelles connaissances ou admirations que j'ai ; je n'en tire ni gloire, ni chagrin, ni dépit ; je veux bien admettre que je passe à côté de beaucoup de choses ; et alors ? n'est-ce pas le lot commun ? choisir (un métier, une destination de vacances, un appartement, ou même une femme – ou un homme -), c'est forcément éliminer.

Et si cela intéresse encore Pamina (ce qui témoignerait d'une belle patience, à lire tant de mes billevesées), je la renvoie au fil de L'Intendant Shansho où nous avions déjà débattu de sujets analogues…


Répondre

De florianep, le 27 mai 2008 à 21:28
Note du film : 3/6

Je vote pour une nouvelle édition dvd digne du film de Fellini. L'édition existante chez l'éditeur carlotta, est une catastrophe au niveau du transfert de l'image, alors que les principales qualités de se film sont justement ses richesses plastiques, que l'ont ne retrouvent absolument pas dans l'édition dvd existante !


Répondre

De Impétueux, le 11 mai 2021 à 16:27
Note du film : 3/6

Est-ce que Federico Fellini, né à Rimini, en Romagne, nourrissait une petite jalousie informulée pour la somptuosité glorieuse de la République de Venise et la place que la Sérénissime a laissée dans l'Histoire ? ? On serait presque fondé à se le demander en voyant l'aigreur de sa peinture et ce que l'on pourrait appeler presque de l'agressivité envers l'un des plus célèbres de ses enfants. Le léger, cavalcadant, spirituel, libertin, profond Giacomo Casanova que le cinéaste présente – on l'a dit beaucoup et davantage – comme une sorte de marionnette ridicule, misérable, pathétique, même, en ses derniers jours, en faisant mine de ne pas avoir compris combien le chevalier de Seingalt, nom que Casanova s'était donné, représente à lui tout seul l'esprit du 18ème siècle ?

La vraie question est, d'ailleurs, celle-ci : si grand qu'il soit, un réalisateur peut-il tourner un bon film sur un personnage pour qui il ressent de l'aversion ? C'est vraiment ce que l'on se demande, surtout si l'on a quelque connaissance de l'Histoire de ma vie, directement écrite en français, monument brillant, leste, subtil, traversé de feux et d'orages, de victoires et de déconfitures où Casanova, né en 1725 et mort en 1798, conte ses aventures jusqu'à 1774, où il atteint la cinquantaine. Près de 4000 pages en trois gros volumes de Pléiade où l'on ne s'ennuie pas une minute, emporté par le torrent d'aventures qui en fait la trame.

Aventures picaresques et aventurier magnifique bien sûr. Libertin et séducteur, nécessairement et grandement, mais aussi musicien, romancier, historien, joueur, bretteur, philosophe, physicien, mondain, de plain pied avec les Princes comme avec les comédiens, ne respectant pas grand chose, si ce n'est, le plus souvent, sa dignité et son honneur, voyageur qui a sillonné l'Europe civilisée, des multiples États italiens aux multiples États allemands, de l'Espagne à l'Angleterre, de la France à la Pologne et jusqu'à la lointaine Russie. Tout cela et bien d'autres choses, commensal du Cardinal de Bernis, de Voltaire et de Cagliostro

Mais si Fellini présente son film, en un carton d'introduction, comme librement adapté de l'histoire de ma vie, on se demande pourquoi cette liberté, acceptable au demeurant, ne semble avoir pour objet que de ridiculiser un personnage dont la complexité intellectuelle et l'intelligence aiguë ne méritent en rien le sarcasme perpétuel.

Le choix de Donald Sutherland pour incarner le rôle n'est en soi pas mauvais. Casanova était de très haute taille, de teint coloré, de front bombé ; ses contemporains ont moins loué sa beauté que son magnétisme, mais il n'était ni vaniteux, ni puéril comme on le montre là. Ce qui ne va plus du tout, c'est le survol assez hargneux des épisodes de sa vie par un cinéaste grincheux. J'entends bien que dans le foisonnement coruscant des aventures et des rencontres, il n'était pas concevable de représenter tous les épisodes d'une vie vécue – en tout cas jusqu'à la cinquantaine – à bride abattue. Mais si Fellini avait simplement respecté son sujet, n'aurait-il pas dû, dans un film qui dure tout de même plus de deux heures et demie, concentrer l'intrigue sur quelques épisodes marquants qui ponctuent le récit ?

Avec le cinéaste on picore, on sautille, on survole, on traite avec désinvolture la fameuse évasion des Plombs (les prisons ainsi couvertes, véritables enfers), dont la narration est un extraordinaire thriller, on saccage l'aventure ambiguë et rouée avec la religieuse MM (Margareth Clementi) et son protecteur-voyeur, l'abbé et futur cardinal de Bernis, alors ambassadeur de France, on aborde à peine celle vécue avec Henriette (Tina Aumont), mystérieuse grande dame libertine et un peu davantage les avanies subies par Casanova du fait de la Charpillon (Diane Kurys). Un peu mieux traitée la supercherie montée autour de la marquise d'Urfé (Cicely Browne), vieille folle imbue de kabalisme et d'alchimie.

Et sans grand scrupule par ailleurs Fellini introduit des pans entiers de son invention, sans réelle pertinence et toujours au détriment de son héros. On reconnaît bien son goût pour les disgraciés, les monstres, nains ou géants (Sandra Elaine Allen), bossus, contrefaits, sordides, malsains, gênants. Tous concourent à dégrader Casanova à l'enfoncer dans un cloaque… Ainsi la très longue séquence où s'avilit le marquis Du Bois (Daniel Emilfork, parfait, évidemment)

Que sauver du film qui, je crois a beaucoup surpris et déçu ? D'abord la ligne mélodique parfaite de la musique de l'habituel et là très inspiré Nino Rota. Ça et là quelques séquences et décors qui surprennent et flattent. Peut-être aussi les dernières séquences, tout à fait authentiques mais qui ne figurent donc pas dans l'Histoire de ma vie, où, hébergé au château de Dux, en Bohême, recueilli comme bibliothécaire par le comte Waldeim, Casanova, las, épuisé, fier encore pourtant, et hautain, est moqué et méprisé par la valetaille.

Grand personnage attachant. Film rageur. D'un jaloux ? Je ne suis pas loin de le penser.


Répondre

Installez Firefox
Accueil - Version bas débit

Page générée en 0.0065 s. - 5 requêtes effectuées

Si vous souhaitez compléter ou corriger cette page, vous pouvez nous contacter