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Forum : Police Python 357

Sujet : Sommet du polar français


De verdun, le 20 juin 2006 à 23:37
Note du film : 5/6

Après la mort de Jean-Pierre Melville en 1973, Alain Corneau s'est affirmé comme le maître du polar à la française.

Hormis ce Police Python 357, on citera Le choix des armes, Le cousin et surtout Série noire, marqué par une composition incroyable de Patrick Dewaere.

Ici Alain Corneau a mis tous les atouts de son côté pour nous donner une œuvre forte.

Le scénario repose sur une mécanique passionnante: un flic chargé d'une enquête qui va le désigner comme le coupable d'un meurtre sordide. On marche d'autant plus que le film alterne habilement la psychologie et l'action brute, jusqu'à un final apocalyptique, qui nous montre – un peu trop ? – que le cinéaste connaît les films de Don Siegel sur le bout des doigts.

Le casting est parfait: si Yves Montand m'a pas parfois agacé dans certains de ses rôles, ce n'est pas le cas ici. Il donne la réplique à une Simone Signoret qui émeut dans son rôle de femme au bout du rouleau. Et c'est l'occasion aussi de rendre hommage au trop peu célébré François Périer malgré une carrière exemplaire.

Le tout porté par la bo sombre et lyrique, à l'image du film, de Georges Delerue.

Immense réussite d'un genre disparu: comparez ce film à Julie Lescaut!!


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De David-H, le 6 février 2007 à 19:43
Note du film : 6/6

Faute à la boulimie de la télé, les bons policiers sont aujourd'hui denrées rares au cinéma. Corneau, la preuve justement, se réduisant même à tourner un remake superflu du 'Deuxième Souffle' (Lino Ventura s'en retourne dans sa tombe). Mais on le sait, ce n'était pas le cas entre 1955 et 1980. Cette période avantageuse nous permet désormais de savoir au préalable à quels polars faut-il jeter un œil plus attentif. Aisé pour notre propre plaisir bien sûr, moins pour que nous en donnions un avis plus juste et honnête, fatalement.

Ceci dit, il faudrait être sacrément malhonnête pour ne pas reconnaître que 'Police Python 357' (1976) sort du lot. Le mécanisme du récit, le soin et l'esthétisme s'y référant, démontrent que Corneau, lui qui n'avait pourtant qu'un seul et moyen film à son actif ('France, société anonyme', 1974), maîtrisait déjà son sujet. Pas surprenant qu'Yves Montand, alors au faîte de sa gloire, son épouse Simone Signoret, et le glorieux François Périer se laissèrent convaicre par l'aventure de ce réalisateur cinéphile, ex-assistant de Costa Gavras et adepte de Fritz Lang et de Jean-Pierre Melville. D'autres éléments, d'ordre psychologique (des personnages) voire géographique (le choix du lieu, atypique, Orléans) agrementent cette fiction haletante qui n'a pris la moindre ride, même si certains devront se montrer indulgent avec l'époque (Peugeot 404, cabines téléphoniques…).

Mais tout comme dans 'Le cercle rouge' ou le 'Dernier domicile connu', la perfection perdure tout au long du film, ne perdant rien de son suspense. Quelques rares voix se sont élevées contre une fin accélérée, mais ce n'est pas clairement justifié. Corneau entrait, cette fois, bel et bien dans la cour des grands et ignorait encore qu'il allait réaliser trois autres perles noires consécutives, 'La menace' (1977), 'Série Noire' (1979) et 'Le Choix des Armes' (1981). Des films (ou des Dvd) à conseiller à la jeune génération, probablement moins bien influencée par ses plus récents films, 'Le cousin' (1997), et surtout le piètre 'Prince du Pacifique' (2000). Même s'il est vrai qu'il y eut 'Stupeur et tremblements' (2003) depuis…


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De Steve Mcqueen, le 5 juillet 2015 à 18:16
Note du film : 5/6

Je me joins au concert de louanges qui précèdent…

Police Python 357 est un polar baigné dans une étrange ambiance mortifère, filmé dans des lieux que l'humanité semble avoir désertée : tours d'immeubles sinistres, intérieurs bourgeois sans âme… A l'image du générique qui voit Yves Montant fabriquer lui-même les balles de son revolver, le film est méthodique, dépouillé, glacé.

Tous les personnages sont des solitaires en quête d'eux-même, de Ferrot (Yves Montand) qui voue un culte fétichiste à son révolver (le fameux Python 357 du titre), à Ganay (François Périer) qui semble trouver une échappatoire dans dans relation adultère avec Sylvia Léopardi (Stefania Sandrelli) qu'il finira par assassiner, en passant par Thérèse Ganay (Simone Signoret), à demi paralytique et qui semble morte depuis longtemps…

Chargé d'enquêter sur le meurtre de Sylvia, dont il était aussi l'amant, Ferrot use de tous les stratagèmes pour esquiver les preuves qui l'accusent (alors qu'il est innocent), quitte à se défigurer, quitte à passer un témoin à tabac.

Le film déroule un engrenage infernal, où les individus sont broyés par des forces qui les dépassent, par le poids d'un Destin impitoyable qui les écrase sous une chappe de plomb.

La psychologies est réduite au strict minimum, seuls comptent les actes des protagonistes, ce qui confère au film un aspect un peu désincarné, lorsque brusquement l'émotion surgit au détour d'une phrase (quand Simone Signoret déclare : "Je pense que Dieu est immobile"), d'un regard voilé (Yves Montand pleurant la femme qu'il aime).

Tout se termine par une fusillade dantesque, magistralement filmée, qui scellera le pacte du silence entre Ferrot et Ménard (son adjoint) qui a tout deviné, un pacte scellé dans le sang et la poudre.

Alain Corneau réalise une oeuvre marquante, un polar lugubre et froid, hanté par des personnages guettés par une dépersonnalisation qui les font ressembler à des spectres…


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De Impétueux, le 14 novembre 2018 à 17:05
Note du film : 4/6

1976, c'était l'époque où Yves Montand était au sommet de sa notoriété et de ses succès cinématographiques. Entre Z de Costa Gavras en 1969 et Garçon ! de Claude Sautet en 1983, il n'y a pas un grand réalisateur français (Philippe de Broca, Jean-Pierre Melville, Jean-Paul Rappeneau, Henri Verneuil et même Jean-Luc Godard) qui n'ait fait appel à lui. 1976, c'était aussi la dernière fois que l'acteur et sa femme, Simone Signoret tournaient ensemble (et à vrai dire, ils l'ont assez peu fait depuis Les sorcières de Salem de Raymond Rouleau en 1957. Le metteur en scène, Alain Corneau tournait là son deuxième film et ce début était plutôt réussi, quoiqu'il soit tissé d'invraisemblances.

Mais Corneau, avec son scénariste Daniel Boulanger a élaboré une histoire intéressante et finalement assez bien fichue, dominée surtout par la relation singulière, à la fois vénéneuse et évidente qui unit l'amant entreteneur, le Commissaire divisionnaire Ganay (François Périer), sa maîtresse Sylvia Leopardi (Stefania Sandrelli) et Thérèse Ganay (Simone Signoret), richissime et impotente qui admet, couvre et protège la double vie de son mari.

Au milieu de ce trio – qui n'a rien d'invraisemblable, qui a même un certain fumet de réalité – l'inspecteur Marc Ferrot (Yves Montand) apparaît comme un personnage presque incongru, un cow-boy solitaire qui n'apprécie rien tant que de travailler en solo, de n'avoir que le minimum de contraintes administratives et qui n'est jamais aussi heureux que lorsqu'il utilise son revolver, un Colt de gros modèle, qu'il emploie d'ailleurs sans un vertueux discernement (à nos yeux patelins d'aujourd'hui). Il est assez constamment dupé, en tout cas manipulé, même s'il s'en sort finalement mieux que tous les autres (et ce n'est pas bien difficile, à dire vrai, puisque les autres protagonistes sont morts). La chose est particulièrement sensible au début du film, qui est, il faut le dire, au moment où il pose les cadres du théâtre, extrêmement clinquant, pompeux, emphatique et faux, d'autant qu'il est nourri d'assez médiocres dialogues.

Mais, ce qui n'est pas si fréquent, à mesure que le film progresse, il se bonifie, exception faite de la scène finale, sur un parking de supermarché, où des bandits ont attaqué un camion de transport de fonds où Ferro/Montand se comporte en superman souverain. Mais tout ce qui tourne autour de la traque de l'assassin de Sylvia/Sandrelli, le redoutable et remarquable jeu de dupes qui s'établit autour de fausses pistes, d'une sorte d'accumulation de bêtises, d'imprudences et d'erreurs autour de Ferrot est excellent. Et en premier lieu le mal que le malheureux se donne pour ne pas conduire l'enquête comme il faudrait qu'elle le soit, au grand désarroi de ses subordonnés Ménard (Mathieu Carrière) et Abadie (Vadim Glowna). Comment, au demeurant, pouvoir oublier le très joli coup du vitriol dont s'asperge lui-même Férot afin de se soustraire à la confrontation prévue avec les témoins qui ont repéré ici et là sa gênante présence aux côtés de Sylvia ? Très originale idée de scénario en tout cas.

Trop d'invraisemblances, néanmoins. Par exemple, après la mort de Sylvia, dès que l'enquête commence et qu'on réunit des informations sur la jeune femme, personne ne semble se préoccuper de l'appartement où elle vivait : qui l'a acheté ou l'a loué ? On pourrait sûrement remonter assez vite au Divisionnaire Ganay/Périer. Quant au dépiautage dévastateur de ce même appartement par Férot, qui y cherche – et y trouve – des tas d'indices, ça dépasse un peu le domaine du réalisme.

Ne boudons pas notre plaisir : les acteurs sont excellents, la musique (de Georges Delerue) bien efficace et la calme vacuité de la ville d'Orléans tout à fait adaptée à la médiocrité des situations…


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De verdun, le 23 mars 2021 à 14:48
Note du film : 5/6

L'intrigue élaborée par Daniel Boulanger et Alain Corneau s'inspire étroitement de The big clock de Kenneth Fearing, roman noir de 1946; comme nous le précise Wikipedia, Police Python 357 a pris The big clock comme source d'inspiration, mais sans le citer, car Alain Corneau n'avait pas pu en acquérir les droits.

Police Python 357 ressemble donc avant tout à La grande horloge et Sens unique, deux adaptations officielles du roman de Kenneth Fearing.

Cette histoire d'un homme qui doit se disculper d'un crime qu'il n'a pas commis se retrouve aussi dans Scandal Sheet, écrit par Samuel Fuller. Fuller accusa d'ailleurs Kenneth Fearing d'avoir plagié son histoire.

De tous ces films traitant de la même histoire, Police Python 357 me semble, malgré certaines scories et certains outrages du temps, le plus marquant car il ajoute une vraie épaisseur humaine et une vraie mélancolie à la brillante mécanique de départ.


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