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Forum : Péril en la demeure

Sujet : Typique d'une époque


De vincentp, le 4 juillet 2009 à 10:07
Note du film : 5/6

4,8/6. Le mode de vie bourgeois a fait les choux gras du cinéma français et européen au cours des années soixante-dix, début des années quatre-vingt. Péril en la demeure en est une bonne illustration. Très bien écrit et filmé, même si on peut avoir un peu du mal à adhérer à certains développements, qui suprennent par leur crudité. Ex : Anémone montrant ses fesses, pas très esthétiques, à la caméra. Ceci est peu au regard des qualités du film, lequel réussit à créer une ambiance inquiétante dans un milieu en apparence ordinaire, en réalité un monde parallèle au nôtre, reposant sur la manipulation et les faux-semblants. Un monde rendu crédible, par de petits détails, telles ces prises de vue sondant les regards, observant les froncements de sourcils… Il y a aussi ces raccords très imaginatifs, et vaguement inquiétants… L'absence de personnages secondaires intégrés dans la cité, participe à cette ambiance inquiétante (une recette qui fut employée par Brian Clemens pour bâtir l'univers onirique de la série The avengers). Tout le contraire d'un Maurice Pialat, par exemple, lequel intègre ses récits dans un cadre sociologique proche de la réalité. Ce film m'a d'autre part fait penser à Blue velvet (le regard décalé des parents de Daniel, si fier de leur fils…).

Péril en la demeure constitue un prolongement finalement logique de thèmes identiques abordés un peu plus tôt par Pasolini (Théorème), Losey (Cérémonie secrète), Bunuel (Belle de jour, Le charme discret de la bourgeoisie), voire Ingmar Bergman, creusant les névroses, décryptant les mécanismes d'asservissement de la pensée des classes sociales dominantes. Mais Deville mixe à ce sujet une seconde thématique, celle de la manipulation mentale, des apparences, également typique des années soixante-dix (Blow-up,Conversation secrète…).

Nombreux furent les cinéastes français (ou assimilés) à se pencher sur les moeurs de la bourgeoisie (ce courant semble s'être un peu tari aujourd'hui) : Mocky, Rivette, Godard, Chabrol, Deville, Malle…, chacun dans leur style, ou l'oublié Jean-François Adam avec l'excellent Retour à la bien-aimée, sorte d'aboutissement cauchemardesque des travers de la vie de bourgeois.


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De kfigaro, le 6 juillet 2009 à 10:13
Note du film : 5/6

En réalité, Anémone s'était déjà montrée dans le plus simple appareil dans le peu connu Le Couple témoin de William Klein (et on ne voyait pas que ses fesses…).

Sinon il s'agit d'un polar d'excellente facture, Deville excellant effectivement à décrire les ambiguïtés du mode de vie bourgeois comme jadis un Bunuel ou un Chabrol. La musique y joue également un grand rôle, vu que l'acteur principal est professeur de guitare classique. Deville utilise presque toujours la musique classique comme "musique de fosse" voire même comme "musique de source" notamment dans "Le paltoquet" (et très peu voire aucune musique originale) et le classique est souvent (et à juste titre) socialement relié au "bon goût" bourgeois d'un point de vue sociologique.


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De Pianiste, le 8 octobre 2014 à 23:14

Péril en la demeure est encore un bon suspense ou la sublime Nicole Garcia dévoile tous ses charmes pour utiliser Christophe Malavoy qui ne peut qu'y succomber. L'intrigue est prenante et il émane du film une réelle sensualité. Il mérite d'être regardé plusieurs fois pour bien le comprendre. On peut parfois se laisser distraire par les atouts charnels de la belle et en perdre le fil conducteur.

Un film captivant du début à la fin….


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De DelaNuit, le 18 juin 2021 à 15:43
Note du film : 5/6

Surprenant, en revoyant ce Péril en la demeure, combien le personnage de Christophe Malavoy est l'objet du désir de tous les autres personnages. De son élève et de la mère de celle-ci (Nicole Garcia) dont il devient l'amant, mais aussi de la voisine (Anémone) qui joue les voyeuses, et même du tueur à gages (Richard Bohringer) dont l'intérêt plus qu'amical, bien que jamais nommé, est pourtant clair.

Habituellement, dans les films noirs, c'est une jolie femme (fatale ou faussement telle) qui assume le rôle de point de mire… Etre désiré ne l'empêche cependant pas de se trouver instrumentalisé par chacun selon ses besoins : pour se débarrasser d'un mari encombrant, pour tromper son ennui, ou pour sortir avec élégance d'une vie devenue insupportable. Malavoy, amant troubadour de passage faisant résonner les accords de Granados dans de grands espaces vides, se trouve ici le révélateur de tout ce monde étrange et prédateur tapi dans la torpeur des maisons bourgeoises provinciales…

Si le scénario peut sembler difficilement crédible, l'atmosphère du film et cette originalité du positionnement des personnages valent, à mon avis, encore le détour plus de 35 ans après sa sortie.


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De Impétueux, le 17 octobre 2023 à 14:10
Note du film : 4/6

Bizarre de constater combien Michel Deville, qui a eu du succès, de la notoriété et même davantage dans le quatrième quart du siècle dernier, qui avait du talent et qui explorait une veine légère, funambulesque, sensuelle et même souvent érotique, d'un esprit très français, très libertin, a disparu complétement des mémoires. Je crois que c'est bien dommage alors même que je n'ai jamais été un absolu thuriféraire de ses productions. Mais au fait pourrait-on vraiment être admirateur sans limite de Crébillon ou de Nerciat et les mettre au même niveau que Diderot, par exemple, alors pourtant que l'on peut apprécier La nuit et le moment ou Félicia ou mes fredaines mais ne pas les placer au sommet de la littérature ?

Ben, c'est un peu ça, Deville ; j'ai jadis beaucoup aimé Benjamin ou les mémoires d'un puceau en 1968, Raphaël ou le débauché en 71 (deux beaux rôles de Maurice Ronet et de Françoise Fabian) en 1971 et aussi l'excellent Mouton enragé en 1974. Du rose et du gris, du souriant et de l'acerbe, du troublant et du désespéré. Sensualité et vide existentiel. Il se peut que ce soit parce que cette France-là, à la fois sage, prude et troublante, chérissant la transgression et respectant les règles de la vie commune : c'est ce que l'on appelle civilisation, que certains fustigent sous le nom d'hypocrisie. Mais ce cinéma s'est dégradé très vite : ridicules Paltoquet en 1986 ou Nuit d'été en ville en 1990…

Il faut bien dire que Péril en la demeure est doté d'un scénario absolument invraisemblable, souvent exaspérant. Ce qui est bien, c'est que Michel Deville n'y attache aucune espèce d'importance, en quoi il a bien raison ; le scénario, dans ce genre d'oeuvres, c'est de l'eau qui coule et qu'il faut bien laisser couler pour faire avancer un tant soit peu le film et parce que le public exige qu'il y ait une histoire. Mais finalement si, dans ce film-là, il n'y en avait pas, qui en serait vraiment gêné ?

Bien voilà : un garçon séduisant, glandeur majuscule, David Aurphet (Christophe Malavoy) (Aurphet comme Orphée, vous voyez ce que je veux dire ?) va donner des cours de guitare à Viviane Tombsthay (Anaïs Jeanneret), fille d'un couple très aisé, Graham (Michel Piccoli) et Julia (Nicole Garcia). D'emblée on voit que Julia est séduite par David, beau garçon un peu perdu. Elle se jette à son cou, sans dissimuler beaucoup cette attirance à son mari. Celui-ci est-il indifférent, insouciant ? Ou bien peut-être complice des débauches de sa femme ou excité par elles comme l'est Jean-Louis Trintignant dans un autre film de Michel Deville, en 1981, Eaux profondes avec Isabelle Huppert ? Ou bien autre chose encore ?

Des personnages connexes et assez fascinants : la voisine du couple Tombsthay, Edwige Ledieu (Anémone), qui a de la singularité et du vice en elle et qui joue on ne sait quel jeu ; et Daniel Forest (Richard Bohringer) qui est un nettoyeur, venu dans la ville pour éliminer quelqu'un et lui dérober de précieux microfilms. Voilà un bien grand entrelacs au milieu d'une histoire assez classique de coucherie d'une grande bourgeoise un peu nymphomane avec un beau garçon assez éberlué que tant de monde le désire et veuille lui donner du plaisir ?

On ne comprend pas toujours ce qui s'ensuit de ce sac de nœuds. Là encore voilà qui n'est pas un reproche fondamental et on trouve beaucoup plus compliqué chez David Lynch par exemple, mais avec un tout autre brio et bien plus d'inventivité dans le creusement des personnages et des situations ; on a l'impression que Michel Deville veut rincer l'œil du spectateur en lui montrant avec une certaine complaisance la nudité de Christophe Malavoy et de Nicole Garcia ; je n'ai rien contre, mais lorsque j'écris complaisance, il faut lire que ces nudités-là n'ont pas beaucoup de nécessité ni même d'utilité ; les conversations singulières entre David/Malavoy et Edwige/Anémone ont du point de vue érotique, beaucoup plus d'impact.

Le film s'achève dans un chaos sanglant qui n'est pas intéressant parce qu'il ne correspond, lui non plus, à rien ; mais naturellement il faut bien terminer sur quelque chose. Pourquoi pas sur l'absurde explosion de la maison et le départ de David avec Viviane/Jeanneret qui arrive là comme un cheveu sur la soupe ?


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