Très peu connu, trop peu connu… Ce film de Pialat est pourtant remarquable, par le fond et la forme. Il montre des faits et gestes ordinaires de la vie d'une famille auvergnate, mais qui sont universels : la peine face à la disparition d'un être cher, le regret des disputes futiles du quotidien. Les gens ordinaires du terroir, et leur accent rocailleux participent au déroulement de cette histoire, lui conférant un caractère très authentique.
Pialat -fidèle à ses habitudes- refuse le spectaculaire : par exemple, le film se termine sur une pièce qui s'éteint, et une voiture qui quitte une modeste bourgade. Mais le tempo, les prises de vue liés à ces instants ordinaires possèdent une puissance évocatrice peu commune, et renvoient à moults idées. Auparavant, quelques plans fixes ont représenté des objets appartenant à la personne qui passe de vie à trépas : des photos liées à sa jeunesse, une croix qui témoigne de son mode de pensée. Beaucoup d'idées, mais aussi une émotion intense traversent ainsi cette histoire.
Pialat pose via ce long-métrage (et au travers de son oeuvre, d'une manière générale) une simple question, "qu'est ce que la vie ?". Il nous invite à réfléchir et à agir pour mieux organiser la nôtre. A nous aider à mieux hiérarchiser ce qui est important et ce qui ne l'est pas. A considérer au mieux notre semblable, au travers des actes de la vie quotidienne.
Un cinéaste majeur dont l'oeuvre est indispensable !
Nb : pas de doute, les auvergnats remplacent les S par des CH, style "ch'suis un auvergnat". Je m'étonne que "l'auvergnat" du forum de dvdtoile -si attaché à sa région- parle lui un français sans accent.
À force d'écrire et presque de proclamer que le cinéma de Maurice Pialat me déplaisait, me hérissait, m'exaspérait, je m'y suis insidieusement laissé prendre. J'ai l'air malin, maintenant d'avoir écrit que j'étais imperméable à cette façon de filmer, à ces sujets rugueux, à cette violence abrupte, presque méchante…
La gueule ouverte est moins le récit d'une mort évidente, annoncée et affreuse, celui de Monique (Monique Mélinand)
, rongée par un cancer dévorant, que celui de ce qui se passe pendant la longue agonie chez ceux qui l'entourent : médecins et infirmières, indifférents, compétents, habitués ; voisins chargés des mots de la banalité ordinaire ; surtout Roger, le mari (Hubert Deschamps)
, Philippe, le fils (Philippe Léotard)
, Nathalie, la belle-fille (Nathalie Baye)
qui comme nous tous sûrement, ne parviennent pas à saisir le mystère de la mort et ce que sera la disparition, en tout cas jusqu'à ce que le cercueil se referme…
Pialat pose d'emblée les choses, avec sécheresse et clarté : une femme qui va mourir, un mari qui a couru la gueuse toute sa vie, un fils qui en fait autant, une bru avec qui il y a de la distance. En cinq minutes le film est posé. Les séquences s'enchaînent avec une certaine brusquerie, le cinéaste néglige souvent d'expliquer les choses, laissant le spectateur à l'évidence de la mort annoncée. Est-ce qu'il y a besoin de gloser sur la froideur des rapports entre le père et le fils ? Est-ce qu'on a besoin de savoir pourquoi le fils trompe compulsivement sa femme ? Pourquoi le père en a fait autant toute sa vie et ne peut pas résister à une jolie tournure ? C'est un cinéma qui capte la vie, qui filme la vôtre, vue par vos voisins, ou celle de vos voisins, vue par vous, vue ou entraperçue plutôt… Sait-on les choses ?
C'est ce que fuient Philippe et Nathalie dans le travelling arrière final, qui est de toute beauté. L'ennemi a dépassé la crête et descend vers la vallée…
Distribution lumineuse, à l'exception, sans doute de Nathalie Baye, transparente (mais possiblement souhaitée ainsi). Hubert Deschamps
est parfait, grognon, grincheux, taciturne et, pourtant l’œil toujours allumé par une possible gaudriole ; Philippe Léotard
allie fragilité et égoïsme ; et Monique Mélinand
(qui fut la dernière compagne de Louis Jouvet)
meurt avec un talent fou.
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