J'ai le souvenir d'un beau film austère et melvillien, parfois limite caricatural (les malfrats), parfois juste (les dealers de banlieue). Je suis surtout curieux de revoir Depardieu, à l'époque où il savait encore ce qu'il faisait. C'est un de ses grands rôles de loubards. Je pense que ça a dû vieillir, comme tous les polars de cette période, mais il me tarde d'y jeter un coup d'oeil.
Ce qui est surtout frappant dans ce film, c'est de voir des seconds rôles comme Gérard Lanvin ou Richard Anconina,
qui semblent parfaitement à leur place, alors qu'on a souvent eu du mal à les accepter dans les têtes d'affiche. Le manque de relève a souvent propulsé des acteurs sans doute valables, mais pas prêts, au vedettariat, et très peu ont tenu la distance. C'est seulement aujourd'hui, à 50 ans, que Anconina
et surtout Lanvin
ont acquis une certaine épaisseur.
Après revision, le film tient étonnamment bien le coup, malgré le jeu crispé de Montand peu crédible en ex-caïd nommé Noël Durieux (sans tomber dans le cliché, j'ai rarement vu un nom qui fasse aussi peu caïd !), de Deneuve
glacée et comme absente, et de Lanvin
et Galabru
très moyennement convaincants en flics. Ce qui fait fonctionner Le choix des armes,
envers et contre tout, c'est Depardieu,
dans un de ses grands rôles : chien fou enfantin et dangereux, il compose un vrai antihéros de film noir. Parmi les seconds rôles, Jean-Claude Dauphin
et Anconina
sont excellents, la BO de Philippe Sarde
apporte énormément au film.
Il s'en faut de peu pour que Corneau ait signé un vrai classique du genre. Peut-être un cast plus pointu (Ventura
qui trimbalait derrière lui toute cette mythologie, à la place de Montand,
par exemple), un peu moins de répliques "signifiantes" sur la violence et le changement de mentalités… A voir de toute façon pour l'hallucinant numéro de Depardieu.
La scène du braquage de la station-service ("Faut m'laisser !!!") et son pétage de plombs est stupéfiante.
Oui on dirait un affrontement entre le héros des Valseuses et un gangster des polars noirs des années 60 comme les aimaient Gabin et Ventura .
Et la scéne ou Depardieu braque la station service je pourrais me la repasser vingt fois par jour .
C'est bien le rythme et la vivacité qui font d'abord l'intérêt du Choix des armes et qui permettent de passer au dessus d'un scénario un peu funambulesque. Qu'est-ce que j'entends par là ? Non pas un scénario vraiment compliqué, fuligineux, incompréhensible, comme il en existe tant et tant : non, le récit est bien maîtrisé et clairement conté. Mais plutôt parce que le scénario, de Michel Grisolia (à qui on doit notamment Flic ou voyou,
agréable polar parodique de Georges Lautner
avec Jean-Paul Belmondo)
est assez mécanique et que, comme toutes les mécaniques, il manque un peu de chaleur et de chair.
Ce qui ne rend pas du tout, pour autant, le film négligeable. Je l'ai souvent dit et le répète : ce qui est primordial, dans un thriller de genre, c'est le rythme, le halètement qu'on ressent en suivant ses péripéties, le fait qu'on ne puisse pas décrocher de l'histoire racontée, quel que soit son degré de vraisemblance. D'autant qu'il y a dans Le choix des armes quelque chose qui est toujours intéressant : la collision entre deux mondes, doublée ici d'une collision entre deux générations.
Talent singulier d'Alain Corneau, réalisateur disparate, capable du meilleur, crasseux (Série noire)
, janséniste (Tous les matins du monde)
, nerveux (Police python 357)
, exotique (Stupeur et tremblements)
et du pire, poussif (La menace)
, niais (Le prince du Pacifique)
, scandaleux (le remake du Deuxième souffle)
… Trotskyste, en plus. Et mort sans qu'on en parle plus guère .
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