Ce Fellini est un pur chef-d'oeuvre, dans un registre voisin de La Dolce vita.
Film choral – mais ce n'en est pas l'invention : voir à ce sujet Dimanche d'août
de Luciano Emmer –
I Vitelloni est aussi un de ces films qui contribuent à nous montrer une Italie antitouristique : ce que ça peut être étriqué, la vie dans une station balnéaire…
Des séquences remarquables (les mouvements de foule, la méditation du groupe en bord de mer…).
Lointains cousins du plus récent « Tanguy », les Vitteloni – « inutiles » en Italien- sévissaient un peu partout en Italie et en Europe, au terme de la seconde guerre, période suscitant moult incertitudes d'avenir. L'une des première œuvres de Fellini décrit avec poésie et magie la vie de cinq jeunes trentenaires oisifs, tous fils à papa, n'ayant pu exploiter à bon escient une certaine forme d'intelligence, et que le travail écoeure inexorablement…
Plus de cinquante années se sont passées depuis cette fiction, et même si les insouciances d'hier se sont aujourd'hui pour la plupart dissipées, que d'actualité, que de proximité, que de similitudes avec la jeunesse européenne actuelle, tendant à un luxueux -mais parfois dangereux- confort, celui du domicile parental*.
Visiblement, et c'est là un autre intérêt de ce merveilleux film, bon nombres d'éléments autobiographiques font référence à la jeunesse de l'un des maîtres du cinéma, ce dernier ayant malheureusement tendance à être progressivement oublié par le public actuel, mais qui continue néanmoins à inspirer plus d'un réalisateur.
Si vous vous voulez donc vous initier à une œuvre majeure de Fellini, saisir pourquoi ce réalisateur fut donc si célèbre, commencer par ces « Vitteloni » ne serait certainement pas une idée saugrenue, tant il incarne par ailleurs une large période de ce fameux cinéma italien de la grande époque…
À part le magnifique Amarcord, film moins hermétique que les autres, plus humain et accessible au commun des mortels, les Fellini
succédant à Satyricon
sont des oeuvres certes belles à regarder, mais où il est difficile de trouver son compte. Mais c'est vraiment un avis personnel et peu partagé.
Amarcord est en effet un cas à part, qui fait pour ainsi dire le pont entre le Fellini des Vitelloni
et celui du Satyricon.
Pour ma part, j'aime autant celui d'après que celui d'avant, mais disons qu'avec Casanova
et La Cité des femmes,
j'ai eu l'impression que la superbe machine commençait à tourner un peu à vide. Heureusement, la trajectoire du maestro n'est pas aussi rectiligne qu'il y paraît : que trouve-t-on, coincé entre ces deux Fellini
"grand style", célébrés par les dithyrambes susnommés? Le croustillant Répétition d'orchestre,
réjouissante pochade soi-disant "mineure" que je recommande chaudement "au commun des mortels"… Dans la même période, son documentaire sur Les Clowns
est aussi un "petit film" chaleureux et sympathique, avec notamment l'amusante Annie Fratellini.
J'ajouterais encore Ginger et Fred,
comédie satirique prenant pour cible la télévision et qui n'appartient pas non plus à la veine "onirique" de l'auteur, que pour ma part j'adore même si je comprends ma copine qui trouve que «c'est comme manger du gâteau trop riche».
Comme le remarque intelligemment le commentateur du DVD, le critique Jean Collet, il n'y a pas de récit structuré dans les films de Federico Fellini, mais une suite de vignettes, de portraits ciselés, de brèves images, de séquences qui figent la réalité de chacun ; mais il n'y a pas de vrai rapport entre les protagonistes. Le personnage principal, Fausto (Franco Fabrizi)
, de parfaite veulerie, prêt à tout dans sa manie de séduire, ne connaît pas de véritable histoire ni avec sa femme Sandra (Leonora Ruffo)
, ni avec quiconque : il n'est que rideau de fumée, encore moins consistant toutefois que son beau-frère Moraldo (Franco Interlenghi)
, seul personnage positif, sans doute, mais friable, inconsistant, incertain.
On peut penser que les dernières images, celles où Moraldo prend le train et quitte la ville sont la représentation de Federico Fellini lui-même fuyant Rimini pour se bâtir un destin. Qui de nous n'a pas connu à trente ans, le besoin de prendre la route ?
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