Forum - Décès de Nino Manfredi - Ultimo atto : la mort de l'horloger
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Forum : Décès de Nino Manfredi

Sujet : Ultimo atto : la mort de l'horloger


De stannino, le 7 juin 2004 à 14:20

merci Arca pour les merveilleuses phrases que tu consacres à Nino MANFREDI, mon modèle, mon exemple, mon maître (je suis comédien et je pense sans cesse à lui au moment de jouer ou de travailler un role)

je n'aurais pas mieux écrit que toi. J'aimais cet homme pour son prodigieux talent et son humanité hors du commun. Il va me manquer et nous manquer énormément. Par ailleurs, j'ai lu par-ci, par-là quelques messages de toi sur le cinéma italien et l'amour que tu lui portes. Je suis exactement dans le même état d'esprit que toi à propos de ce prodigieux et magnifique cinéma. J'ai lu que tu cherchais quelques films,

j'en ai quelques uns et je me ferai un plaisir de t'en envoyer des copies (en VHS !). Dans l'attente de correspondre avec toi,

trés cordialement

Stannino


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De Arca1943, le 13 juin 2004 à 13:39

Salut Stannino !

J'ai failli rater ton message. Alors comme ça, tu en as quelques-uns? Oh, dis-m'en plus! Dis-m'en plus!

Arca1943

(Arca1943@aol.com)


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De Arca1943, le 15 mai 2005 à 05:22

« Le cinéma est un métier curieux : ils te découvrent lorsque tu es mort. Ne te fais pas de souci, Manfredi! Tu verras combien de films on te fera faire lorsque tu seras mort. Ils t'appelleront tous ! »

  • Totò à Nino Manfredi, sur le tournage de Totò, Peppino et la malafemmina (1956).

« De cette manière-là la comédie on peut traiter n'importe quel problème, y compris le plus difficile. Si on choisit une manière trop sérieuse, on devient ennuyeux et alors il vaut mieux faire des conférences! »

  • Nino Manfredi

Ça y est. Après Ugo Tognazzi, Vittorio Gassman et Alberto Sordi, Nino Manfredi nous quitte à son tour : c'est la fin du plus grand star système comique du cinéma parlant.

Comme Charlie Chaplin a marqué l'apogée du burlesque au cinéma, entraînant le genre dans des directions que nul avant lui n'aurait cru possibles, de même les Monstres de la « comédie à l'italienne » (genre spécifique à ne pas confondre avec la comédie italienne en général) ont marqué l'apogée du grotesque – et l'ont également entraîné dans les directions les plus stupéfiantes. À leur apogée respective, en fait, aucun sujet – aussi douloureux fut-il – n'était à leur épreuve.

De même que le burlesque de Chaplin était capable d'intégrer une dimension grotesque, comme on le voit dans de nombreuses scènes de The Great Dictator ou de Monsieur Verdoux, de même le grotesque des Monstres pouvait inclure le burlesque – voir par exemple le célèbre sketch du restaurant dans Les Nouveaux monstres, ou la scène de L'Oncle indigne où le vieillard Gassman perd ses pantalons en voulant danser avec sas petite-nièce, ou bien sûr cette scène terrible de Pain et chocolat où le pauvre immigrant italien (Nino Manfredi) est sommé par le milliardaire italien (Johnny Dorelli) de lui remettre ses économies, qu'il dit vouloir faire fructifier. Ses maigres économies, Nino les a soigneusement cousues à l'arrière de son pantalon. Et comme de juste, la glissière s'est coincée. Alors le voilà qui se met à tourner sur lui-même en essayant de s'arracher le truc, sous les yeux incrédules du richard et des deux putes étendues sur le gazon de sa superbe villa…

Ce qu'on appelle une pantalonnade.

Je dis burlesque et grotesque comme on dit yin et yang. Mais le pont entre les deux, la dimension essentielle qui met ex aequo les deux plus hauts sommets du rire au cinéma, c'est le tragicomique. Les deux génies – l'un individuel, l'autre collectif, l'un d'auteur, l'autre d'équipe* – tout en pratiquant des styles d'humour tout à fait contrastés, ont véritablement en commun cette capacité, que personne d'autre n'est arrivé à égaler, de passer du rire aux larmes et vice-versa avec une aisance, une grâce qui laissent pantois. Souvent d'une scène à l'autre; mais aussi à l'intérieur de la même scène, voire du même plan. (Ainsi la scène du shaker dans Les Feux de la rampe; la scène des hommes-poulets dans Pain et chocolat).

Le spectateur qui voudrait se faire une idée de la "rencontre au sommet" que je lui propose aura avantage à comparer ce qui est comparable. Chaplin et le star-système satirique des " monstres " – Gassman Manfredi Sordi Tognazzi – furent partiellement contemporains. Alors disons, pour l'un, la partie de son oeuvre où Chaplin arrive au parlant; et pour les autres, l'explosion initiale de la comédie à l'italienne (1958-1963, du Pigeon aux Monstres) – en glorieux noir et blanc !

Ce fut l'invention d'un nouveau genre comique. Hélas, pour des raisons idéologiques reliées à la mentalité antipopulaire et formaliste de la critique festivalière des sixties, thuriféraire forcenée de la fameuse "théorie des auteurs", nous n'avons pleinement connu, en France et au Québec, que la "phase terminale" du genre – seconde moitié des années 70 – où le comique est déjà rongé par le tragique comme par un acide… (Mais ce "virage au noir", en passant, ça aussi, c'est un point commun dans l'évolution des deux humours : voir Monsieur Verdoux, sommet d'humour noir, ou Les Feux de la rampe, où le comique s'efface devant le mélodrame.)

Pour mieux comparer ce qui est comparable, on peut aussi proposer une communauté thématique : les titans du tragicomique prennent l'Histoire à bras le corps. Quand je parlais de s'attaquer à des sujets réputés impossibles… que diriez-vous d'une comédie, d'une farce sur le fascisme, sur la Première et la Deuxième Guerre mondiales ?

Voilà bien les sujets pas drôles par excellence, non? Eh bien, ils l'ont fait ! Et c'est là, il me semble, qu'on peut le mieux délimiter les contrastes et les ressemblances entre ces deux Himalayas du cinéma comique : l'air raréfié des plus hauts sommets que l'on respire, d'une part, dans Le Dictateur, et d'autre part, en ordre chronologique des événements, dans La Grande guerre, La Marche sur Rome, Anni ruggenti, Le Fédéral, La Grande pagaille, Une Vie difficile et Nous nous sommes tant aimés.

Ce sont ces films qui font dire à Fruttero et Lucentini, que les comiques italiens d'après-guerre « ont compris le fascisme mieux que beaucoup d'historiens ». Mais je ne gloserai pas, ici; ce serait cruel, puisqu'aucune de ces comédies italiennes n'est disponible sur DVD… pour le moment. Je signale par contre que, sur ce site, on peut lancer des pétitions; à bon entendeur, salut.

Quiconque a vu Anni ruggenti, Les Aventures de Pinocchio ou Pain et chocolat le sait : des quatre « monstres » classiques, Nino Manfredi est celui dont la filiation avec Chaplin est la plus évidente. Et il avait aussi en commun avec lui d'être perfectionniste jusqu'à la maniaquerie. D'où le surnom que lui avait donné Dino Risi :

« Je l'appelais l'horloger. Un acteur avec une loupe dans l'oeil, attentif aux plus petits détails. Connaisseur comme peu d'autres des mécanismes pour faire rire. Un professeur des sciences du rire. Tout calculé, mais de manière à ce que ça semble naturel. » (cité dans Valerio Caprara : Dino Risi, maître de la comédie italienne).

Mais laissons Manfredi lui-même nous en parler :

« Totò m'a donné cette merveilleuse liberté du corps, du mouvement. De fait, je passe pour le plus grand casse-pieds du cinéma parce qu'au début, quand je n'avais pas encore fait de mise en scène, je demandais toujours quel objectif se trouvait sur la caméra. Je voulais connaître la nature du cadre car, si je dois m'exprimer seulement avec le visage, je le fais; par contre, si les bras sont également dans le champ, je dois jouer avec les bras; si les pieds sont dans le champ, je dois aussi utiliser mes pieds. Le jeu est différent si l'expression doit venir de tout le corps ou si elle est concentrée sur le visage, les yeux, la bouche… Trop peu d'acteurs, je crois, tiennent compte de ces éléments. » (Entrevue avec Jean Gili).

Quand je pense à Nino Manfredi, mille et unes scènes à se rouler par terre ou à pleurer à chaudes larmes, mille et un personnages me reviennent en mémoire. Cela va du sketch « Ornella » de Vedo nudo, où l'acteur est vraiment sublime – aussi hilarant que prenant – dans le rôle d'un type qui découvre peu à peu, puis accepte, son homosexualité… jusqu'au grand-père adoré de la petite Mima, laquelle, à 8 ans, n'a évidemment pas idée de ce qu'est un capomafia… en passant par son incarnation extraordinaire de Girolimoni, un innocent qui fut détruit par le fascisme, dans Girolimoni il mostro di Roma, drame historique méconnu de Damiani… et le cardinal drôlatique de Au nom du Pape roi !

Et le brancardier soupe-au-lait de Nous nous sommes tant aimés ! Et le malfrat maladroit de Opération San Gennaro! Et l'agent d'assurances fasciste dans l'extraordinaire Anni ruggenti ! Et le miraculé ahuri de Miracle à l'italienne ! Sans parler de Geppeto dans Les Aventures de Pinocchio, rôle pour lequel Luigi Comencini l'avait choisi dès le début parce que « Manfredi est le seul acteur capable de converser de façon crédible avec un morceau de bois ».

Et tant d'autres personnages inimitables auxquels Nino Manfredi, un des plus grands comiques de l'histoire du cinéma, a su conférer, à la fois, une drôlerie et une humanité à couper le souffle, pour le profond divertissement d'un immense publique populaire – d'abord en Italie, puis dans le monde entier – jusqu'ici au Québec, où Pain et chocolat, Nous nous sommes tant aimés Affreux, sales et méchants ont fait courir les foules et sont passés dans la mémoire populaire.

Aussi ces personnages incarnés par l'horloger ne meurent pas avec lui : car la comédie à l'italienne est éternelle.

Arca1943

(*) : « Il y a les films d'auteurs et les films d'équipe. Moi, je fais des films d'équipe » – Dino Risi.

(**) Faculté de Droit de Rome.


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De kdo43, le 11 septembre 2005 à 19:44

A Stannino

Bonjour,

Voilà longtemps que je cherche une cassette vidéo de "Pain et Chocolat" et je suis tombée tout à fait par hasard sur votre message. Ce film m'avait particulièrement émue et je reverrais le

film avec beaucoup de plaisir.

Dites-moi vite votre prix.

Pouvez-vous m'adresser un message à :

soniq.toulon@free.fr

J'attends votre message

kdo43


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De nounourse, le 7 juillet 2006 à 22:09

Quel bel hommage rendu au plus grand des acteurs italiens !

Inoubliable Nino, tu nous auras tant fait réver !


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De paul_mtl, le 8 juillet 2006 à 03:32

Oui un bel et long hommage a un des mes acteurs favoris dont

j'avais pris l'avatar sur trois autres forums.

Reste qu'il y a une interpretation toute personnelle d'Arca

mélangé heureusement avec le propos de l'interessé lui-même. ouf.

Maintenant l'exercice est tres difficile et j'eviterais pour ma part des comparaisons

soi-disant flateuses avec par exemple un Chaplin.

Totò avait dans ses premiers films un côté Charlot dont on sentait qu'il s'en inspirait

mais Nino Manfredi c'est completement autre chose, rien a voir ou presque.

Quand au tragicomique cher a Arca, c'est pour moi un aspect de la comedie

et pas son apogé comme il le croit et le dit dans plusieurs messages.

C'est juste son point de vue que je ne partage pas.

La comedie que j'apprecie c'est celle qui joue sur l'humour en demi-teinte, sur l'humanité, sur la tendresse,

et la camaraderie.

Bien sur ces acteurs italiens ont aussi un côté exagéré et passioné mais la n'est pas toute leur particularité.

Les italiens ont un humour plus complice, plus camarade que l'humour francais plus souvent individualiste et ironique.

(En italie deux hommes peuvent marcher bras dessus bras dessous sans qu'on croit qu'ils soient gay comme en France et surtout en Amerique du Nord.)

Toto et puis les autres Gassman, Manfredi, Tognazzi, Peppino, Mastroianni … ont repris cette tradition

humoristique italienne.

Chaplin est plus dans une tradition individualiste ou il tape sur le méchant sans aucune compassion.

Je découvre ce surnom L'Horloger et je trouve qu'il lui va bien pour son reguard

digne d'un horloger avec sa loupe qui grossit son oeil.

Apres le meilleur hommage qu'on puisse rendre a un acteur selon moi

c'est de voir ses films et de participer a sa diffusion.


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De amor08, le 6 mars 2012 à 23:04

huit plus tard j en suis encore malade !!!!!


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De amor08, le 6 mars 2012 à 23:32

chers arca et paul, comment ce fait il qu avec des érudits commes vous, ces magnifiques comédies n exitent pas encore en sous titrage puis je vous aider a y acceder, amor08


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