Il n\'est peut-être pas inutile de rappeler aux plus jeunes que Maurice Pialat fut un des grands réalisateurs français de ces trente dernières années, aux côtés de Jacques Rivette,
Eric Rohmer,
Alain Resnais
…
Sous le soleil de Satan, adaptation de l\'oeuvre de Bernanos, est précisément un modèle d\'adaptation littéraire. Le film ne souffre d\'aucun temps mort (d\'ailleurs inexistants chez Pialat), les péripéties s\'enchainent parfaitement et portent les différents concepts de l\'ouvrage d\'origine (le profane, le sacré,…).
Le cinéaste filme avec sa perfection coutumière des tranches d\'émotion de la vie de plusieurs personnages, qui nous émeuvent, ou en tous les cas ne nous laissent pas indifférents.
Autre qualité récurrente évidente de ce long-métrage : la représentation très réussie de la vie ordinaire de personnes humbles, représentés dans leur habitat de la campagne. On est loin du côté glamour d\'un certain cinéma.
Dernier point à noter : une photographie sublime, notamment lors des scènes noctures.
Un film magnifique, certes un peu cérébral, mais qu\'il ne faut avoir vu !
Comme je viens de relire le roman difficile et puissant de Georges Bernanos, je me suis demandé comment l'étrange Maurice Pialat avait pu transcrire à l'écran un récit aussi intense et si souvent centré sur les mouvements de l'âme, les événements extérieurs (le meurtre de Cadignan/Alain Artur par Mouchette/Sandrine Bonnaire,
par exemple) n'étant presque que des marches qui permettent d'élever la réflexion et l'angoisse spirituelle. On conviendra aisément que la démarche, rare en soi, n'est pas très aisée à relater au cinéma.
Ah, ah, la sainteté ! Voilà le mot lâché et qui n'est pas facile lorsqu'il touche ces hauteurs-là ! Comme il est difficile à comprendre, beaucoup plus que pour l'effusion de charité de Monsieur Vincent ou de L'abbé Pierre
ou même pour l'amour brûlant de Thérèse
! Là où Dieu vous appelle, il vous faudra monter, monter ou vous perdre, dit Menou-Segrais à Donissan ; ce à quoi répondent, en sens inverse les confidences de Mouchette au docteur Gallet (Yann Dedet)
sur le vertige de se laisser glisser… N'empêche que la difficulté de l'ascension est bien près de venir à bout du courage, de l'obstination de Donissan.
Le travail de la Grâce qui fait de Donissan, être fruste, médiocrement doué, après son entretien avec son Supérieur un prêtre qui fait céder peu à peu ses propres limites, au point où Satan s'en aperçoit, s'intéresse à lui et tente de l'anéantir, n'est pas chose facile à montrer : Maurice Pialat, au prix d'ellipses qui demandent, de fait, un effort du spectateur, parvient à en faire saisir le lent difficile cheminement. Voilà un film qui exige qu'on n'y baisse pas une seconde l'attention sous peine de s'y retrouver perdu.
Lumière grise, mouillée de l'Artois. Sensation de froid intense durant tout le film. L'Enfer, n'est-ce pas ?
Page générée en 0.0039 s. - 5 requêtes effectuées
Si vous souhaitez compléter ou corriger cette page, vous pouvez nous contacter