Note : 3,5

Les stars de cinéma Luisa Ferida et Osvaldo Valenti sont dans un camions en compagnie de Résistants italiens.

Valenti: « Où est-ce que vous nous emmenez ?
Le Résistant: « On vous a trouvé une planque. Vous n'êtes plus en sécurité à Milan. »
Valenti: « Mais les Allemands sont en train de négocier leur reddition. Bientôt tout sera terminé ! »
Le Résistant: « Le problème ce ne sont pas les Allemands ou les fascistes; le problème, ce sont les nôtres. »

C'est quand ils ne sont pas là qu'on réalise le mieux le talent de Rulli et Petraglia, qui ont travaillé sur plusieurs Giordana, mais pas celui-ci, hélas. Les allez-retours entre passé et présent sont trop nombreux, et m'ont semblé un peu mécaniques. Plusieurs personnages secondaires m'ont paru figés, pas vraiment campés, et si on comprend que le couple central est formé d'un hystrionique et d'une passive, qu'ils étaient viveurs et dissolus, qu'ils étaient probablements bons acteurs et en tout cas adulés du public, pour le reste on en a assez peu à se mettre sous la dent.

Monica Bellucci fournit un effort méritoire, elle me semble un peu plus habitée que de coutume, mais elle est trop âgée pour le rôle (la Ferida fut fusillée à 31 ans tandis que la Bellucci est une splendide quadragénaire). Luca Zingaretti, en revanche, en met beaucoup mais ça marche : selon moi une star italienne des années 30 pouvait très bien être comme ça, pompeur d'air, rigolard et infantile. Amusante la scène du tournage de Richard III, où il déclame des chiffres au lieu du texte devant le metteur en scène courroucé : « Ben quoi, de toute façon tu vas me faire doubler par Untel ! »

J'ai bien aimé les quelques scènes de tournage, les bandes de propagande et les archives de la Mostra de 1934 (même si je suis trop peu savant pour mettre des noms sur les visages). La séquence d'ouverture en glorieux noir et blanc est très belle et laisse présager un bien meilleur film. La scène où Valenti vide son sac devant Attilio Cardi, directeur général de la cinématographie, ne manque pas de sel. Et quand Cinecittà se déplace à Venise pour cause de chute de Rome, là on sent quand même le côté bord de l'abîme. Le film s'améliore à partir de ce moment-là.

Vu que Giordana n'est pas un deux de pique, il y a comme ça de bonnes scènes, perdues dans un ensemble un peu terne, mais juste assez pour que j'appréhende l'effet qu'aurait pu me faire un film plus réussi sur le même sujet, à moi spectateur : déchiré entre mon amour du cinéma et ma haine du fascisme. Cependant j'apprends qu'Osvaldo Valenti fut membre de 1943 à 1945 des Decima Mas de la République de Salò. Mettons que ça rend mon choix moins difficile. Par contre la Ferida, un résistant aurait pu regarder dans l'autre direction pendant qu'elle s'enfuyait… d'autant plus qu'elle était enceinte au moment de sa mort.

Sur ce sujet, Laissez-passer est pourtant un film estimable… Mais je me suis mal fait comprendre : les échos dont je parle, c'est que quelqu'un – l'estimable Giordana justement – aurait enfin réussi à faire de Monica Bellucci une actrice : et c'est là qu'un Italien aurait réussi là où les Français (et les Américains) ont échoué !

Quoiqu'il en soit, vu le sujet, ça me donne envie de revoir Telefoni bianchi, ne serait-ce que pour la vraie/fausse exécution de Gassman…

Ah ! Possible… A vérifier, donc. Mais après Shoot 'em up et le dernier Corneau (impardonnable) désolé, mais je passe mon tour.