Je vais me facher !

Ah, mais nous marchons ici sur des oeufs : l'ami Impétueux nous a souvent confié – avec une honnêteté qui l'honore – à quel point l'indifférait ce fameux pays du Soleil levant et sa production audiovisuelle. Mais qui sait ? Peut-être un jour une heureuse coïncidence – comme tomber par hasard sur un vrai bon film de sabre à la télé, un soir de pluie – verra fléchir son impétueuse résolution.

En ce qui me concerne je dois avouer qu'à part Les Sept samouraïs et Les 47 ronins, que j'ai vus à la cinémathèque il y a plusieurs années, c'est pour moi une découverte toute récente, tenant essentiellement au fait que le club vidéo au coin de ma rue dispose d'une d'une "section asiatique" étonnamment musclée. Pendant un temps, j'ai surtout loué des films de peur récents, mais après quelques bonnes pétoches comme Shutter – qui du reste n'est pas japonais mais sud-coréen – il n'y en avait plus. Et comme je devais absolument tromper mon impatience de revoir enfin Une vie difficile que ma maman doit me ramener des Europes*, il me fallait me lancer dans autre chose, tout film italien contribuant à remuer le fer dans la plaie. C'est alors, essentiellement par hasard, que j'ai vu Goyokin, qui m'a fait sortir le coeur de la poitrine… et voilà, j'étais tombé dans un nouveau baril de potion magique. Tant qu'on est dans les années soixante, s'entend : à l'aube des années 70, il y a une évidente coupure (pardon pour l'atroce jeu de mots) et les films de samouraïs qui se font à partir de là ne me disent absolument rien : machins pour ados avides de douches d'hémoglobine.

Cela dit, vous serez sans doute fort déçu d'apprendre que je reste un spectateur incurablement primaire, l'homme du premier degré. Rébellion par exemple a beau être construit comme une implacable tragédie grecque, au fond je regarde ça surtout comme un western et je guette le moment où Toshiro Mifune va enfin dégainer son sabre et éventuellement se mesurer avec le gardien des frontières Tatsuya Nakadai ! (Même si avant de se battre les deux samouraïs doivent d'abord nourrir le bébé, bien entendu).

(*) Je n'ai jamais su d'où sortait cet amusant québécisme : dans une certaine langue populaire, on dit "dans les Europes" plutôt que "en Europe", allez savoir pourquoi.