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Critique


De dumbledore, le 1er mars 2004 à 09:44
Note du film : 6/6

Robert Altman a eu une période révolutionnaire. Révolutionnaire du cinéma bien entendu. On lui doit ainsi MASH qui proposait aussi bien des personnages décalés et inhabituels qu'une bande-son souvent incompréhensible, jouant le chevauchement des dialogues au point d'atteindre le brouhaha. Le chaos est au centre du film, formellement et thématiquement.

Deux ans plus tard, Robert Altman remet le couvert et craquelle le film policier lentement mais sûrement jusqu'au point de le détruire. Au départ, pourtant, que du conventionnel. D'abord, il nous propose comme personnage principal un archétype du genre : Philip Marlowe la création de Raymond Chandler. On retrouve son caractère individualiste, blasé et distant : un humour toujours acerbe, dernier rempart à la réalité trop déprimante. On a également la blonde vamp incontournable qui engage Marlowe et qui se révèlera bien sûr manipulatrice. On a également les flics lassés, l'ami infidèle, les mafieux avec leurs codes et morale. Bref, tous les canons du genre.

Tout y est ! Toutefois le film ressemble à rien de ce qu'on a pu voir jusqu'ici. Altman se focalise en réalité sur les temps morts de l'action, tout ce qui aurait été ellipsé dans une narration classique. Pire, il évite l'action et le suspens et signe finalement un film anti-dramatique. Le début du film est à cet égard sublime : pendant un quart d'heure on suit Philip Marlowe en plein déboire avec son chat qui n'a rien à manger et qui l'empêche de dormir. L'histoire principale (le suicide d'un ami qui aurait tué sa femme et l'enquête qui s'en suit) débarque longtemps après, et se retrouve même oublié pendant un temps avant de revenir et culminer dans une fin tout à la fois paradoxale (surprenant) et sublime.

Ce n'est pas l'histoire qui intéresse le réalisateur. C'est la description d'un monde qui ne veut plus rien dire et qui s'incarne dans tous les personnages secondaires. Les voisines qui passent leur temps à fumer et à se trémousser à poil sur le balcon en recherche de spiritualité, le couple « hollywoodien » classique, c'est-à-dire cliché, constitué par un écrivain alcoolique et impuissant marié à une blonde de la moitié de son âge, ou bien encore des flics dépassés, ou bien pour finir une petite frappe mafieux, clone de Al Pacino et accompagné d'un Arnold Schwarzenegger petite tête gros bras, tout à la fois extraordinairement dangereux et qui se dégonfle comme une baudruche.

Au milieu de tout un monde de superficialité, d'image, reste le privé (image du réalisateur Altman dans une Hollywood insensée ?) qui garde tous ses sens au prix d'un réalisme cher à payer.

La mise en scène de Altman est sublime, dans le rythme d'abord qui enchaîne magistralement des « faux plats », et dans les cadres et mouvements d'appareils très suaves, très discrets.

Seule une scène est totalement ratée, sans imagination, celle de Elliott Gould dans le commissariat mexicain se faisant raconter les conclusions du légiste et du flic. Tout y sent l'artificialité.

Une scène ratée pour autant de réussies, maigre prix à payer pour un bijou à découvrir de toute urgence.


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