5,4.
Une lumière impressionniste (très beau travail de Jörgen Persson), mais aussi un esprit impressionniste : les deux personnages regardent le monde comme s'ils ouvraient les yeux pour la première fois. Ils découvrent la beauté de la nature éclairée par le soleil et balayée par le vent. La dureté des lois sociales des adultes -l'argent fait la loi-, alors que l'univers des enfants est doux. Une touche énigmatique donne un cachet particulier à Elvira Madigan. Un très beau classique, enchanteur, à condition d'adhérer à l'esprit du film et à un rythme assez lent.À ce moment-là, si l'on est un minimum bon public, on a presque oublié le carton qui ouvre le film et qui a indiqué d’emblée que les deux jeunes gens se sont suicidés le 19 juillet 1889.
J'ai presque songé au Bonheur (1965), le beau film d'Agnès Varda où on ressent la même impression d'inconscience heureuse (et qui se termine presque aussi mal). Les jours heureux passent sans grandes péripéties, sauf lorsque les amants, quand les journaux commencent à parler de leur disparition, doivent changer de résidence. Car tout n'est pas simple. Elvira avait 21 ans, Sixten 34 (ce qui n'est pas visible à l'écran, mais peut passer) ; mais surtout – on l'apprend fortuitement – Sixten en désertant, a abandonné sa femme Henrietta et ses jeunes enfants Christian et Louise. Voilà qui est tout de même beaucoup moins joli, n'est-ce pas ?La vie, la vie courante, la vie commune, la vie quotidienne se resserre autour d'eux ; presque plus d'argent, des moyens de fortune pour s'en procurer. Et au bout du compte, l'évidence qu'il n'y a pas d'autre issue que le suicide. Qui survient.
Quoi d'autre ? Je conçois facilement que le réalisateur se soit refusé à porter le moindre jugement moral, vertueux sur l'histoire – tout à fait exacte, au demeurant – de cette passion folle, mortifère, aveugle : on croirait voir des enfants inconscients jouer avec la beauté d'un été qui ne décide pas à se jeter dans l'automne. Vont revenir les frimas ; les coups de feu claquent ; arrêt sur l'image ensoleillée d'Elvira qui vient de recevoir la balle et Sixten retourne son arme contre lui.Le film a connu un certain succès et l'actrice (dont la vie fut assez épouvantable ; se reporter à Wikipédia) a reçu le prix d'interprétation féminine à Cannes en 1967. Je ne l'ai regardé que grâce à l'absolue euphonie du titre, chose qui me prédispose toujours bien, mais qui me fait essuyer de grandes déceptions. Pas de regrets parce qu'il y a une douce sensualité dans le parcours des deux bêtas illuminés. Mais voilà un film à ne pas proposer à une adolescente romantique…
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