Que d'images magnifiques! Je garde en mémoire cette scène où le beau-fils de Lyndon le provoque en duel pour demander réparation: Ryan O'Neal en premier plan, immobile, et les joueurs à la table derrière figés dans leur activité: des pantomimes photographiés par Kubrick, une véritable peinture vivante.
Cette odyssée, un peu plus courte, aurait sans doute mérité un 6 (il m'a fallu regarder les pérégrinations européennes du héros en 3 fois…).
Quoi qu'il en soit, Kubrick est au sommet de son art et marche, à coup sûr, sur les sentiers de la gloire.
Les commentaires qui précèdent sont tous intéressants et justes…
Ayant revu ce film de trois heures ce soir, en blu-ray (ce format HD respecte judicieusement le grain d'origine de la pellicule), voici mes impressions.
Sur un plan formel, Barry Lyndon est impressionnant de bout en bout (il m'a rappelé Les duellistes, qu'il surpasse probablement par la variété des décors extérieurs et intérieurs), en particulier en ce qui concerne l'aspect éclairage, pour lequel je suis assez sensible. Les amateurs de Barry Lyndon auront intérêt à regarder Les duellistes si ce n'est pas déjà fait. Un très gros travail sur le cadre de l'image, les couleurs, le rythme des déplacements aussi, pour ce film de Kubrick.
Mais la dernière heure est discutable à mon avis. Ou surprend. Barry Lyndon perd les pédales de façon incompréhensible, arrivé au faîte de sa gloire. Alors qu'il a développé une intelligence adaptationnelle exemplaire jusqu'alors. Et de plus le rythme ralentit considérablement (Kubrick veut montrer sans doute le caractère figé de l'aristocratie, laquelle tourne en rond notamment dans son jardin), et on vire au drame psychologique avec des aspects assez sordides (le duel). Un brin (très léger) de grandiloquence, de solennité aussi. Ce sont certes des choix de Kubrick, qu'il faut respecter… car l'auteur ne cherche pas à plaire mais à montrer et démontrer : la vacuité des ambitions, le caractère passéiste et peu productif de l'aristocratie sans doute aussi, la cruauté des relations sociales basées sur des normes et traditions héritées du passé.
La conclusion est en revanche à nouveau magistrale. Effectivement, ces personnages riches ou pauvres, beaux ou laids, sont tous égaux maintenant.
Autres points forts : le descriptif psychologique des personnages, notamment secondaires. En particulier, les deux nobles victimes des tricheries des joueurs de carte, et qui oscillent entre bienséance et colère. Il est (très) rare de voir des états psychologiques aussi bien rendus à l'écran. J'ai été impressionné par cet aspect.
D'autre part, Kubrick analyse tout aussi finement l'attirance physique et mentale, assez trouble, de Barry Lyndon pour les femmes. Celui-ci s'excuse auprès de sa femme pour son infidélité alors que celle-ci est dans sa baignoire, et montre ses formes. Lyndon, s'il n'avait pas été si ambitieux, aurait sans doute épousé la belle fermière germanique rencontrée par hasard. L'ambition qui le dévore le déséquilibre complètement sur un plan affectif.
Enfin, les relations sociales, politiques sont brillamment évoquées. Les valets, femmes de ménage, soldats servent de main d'œuvre corvéable à souhait à quelques individus que l'on qualifierait aujourd'hui de prédateurs. Clairement Kubrick s'en prend aux sociétés quasi-théocratiques européennes de la fin du XVIII° siècle.
Barry Lyndon est un très grand film historique, et un grand drame psychologique aussi. Il est à regarder en étant bien reposé, car il exige une forte attention du spectateur pendant trois heures.Je ne placerai pas ce soir Barry Lyndon dans ma liste des films préférés (alors que Les duellistes, si proche, y figure). En tous les cas, ce film de Kubrick fait réfléchir.
Nb : ce lundi 21 matin, pensant et repensant au film, à ses séquences diverses, j'en ai oublié l'arrêt de mon train, et ai du faire marche arrière…
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