Deux filles : la plus jeune Darling Jill (Fay Spain), célibataire, sexy, un peu nymphomane convoitée par le grotesque Pluto Swint (Buddy Hackett) , candidat au poste de shérif du comté ; puis Rosamund (Helen Westcott), mariée avec un rude ouvrier, Will Thomson (Aldo Ray) , un mâle violent, brutal, fort en gueule qui exerce une attraction animale sur les femmes ; ouvrier dans une filature de coton, qui vient de fermer ses portes pour ne pas augmenter le salaire de ses employés.
Trois garçons : Buck (Jack Lord) marié à la superbe Griselda (Tina Louise) , admirée et désirée par tous les mâles de la contrée et convoitée explicitement par Will Thomson, mari de sa belle-sœur Rosamund, et Shaw (Will Morrow). Enfin Jim Leslie (Lance Fuller) qui vit à la ville dans l'opulence, parce qu'il a épousé une femme riche, désormais morte, qui n'a que mépris pour sa famille d'ouvriers et de cul-terreux mais qui, comme tous, veut posséder Griselda…On voit là qu'il y a un très profond chaudron de sorcières et qu'il ne faut pas grand chose pour en faire bouillir le venin : stupidité épuisante de la recherche vaine du fameux trésor, jalousie entre mâles, mépris partagés, folie coléreuse de Will Thomson qui s'introduit dans l'usine à l'arrêt et s'y fait abattre et puis désirs, désirs, désirs pour Griselda.
Le roman de Caldwell, cela dit, se termine de façon beaucoup plus sombre que le film de Mann, où tout s'arrange à peu près malgré le sang versé et l'amertume ; mais on peut imaginer qu'Hollywood ait exigé des adaptateurs du roman d'atténuer certaines réalités déprimantes.Ajoutons que la musique d'Elmer Bernstein est d'une parfaite tenue et que les prises de vue, les paysages de Anthony Mann ] sont des plus réussis. Et que Tina Louise est une fille superbe dont on comprend qu'elle enflamme tous ceux qui la rencontrent.
Le cinéma américain, comme son homologue européen, est en voie de mutation à la fin des années 1950. Comme par exemple la forêt interdite de Nicholas Ray (réalisé la même année -1958-), God's Little Acre mêle à la fois les éléments d'un récit assez traditionnel des années cinquante et d'autres propres à la modernité –alors en cours d'émergence- des années 1960, ceci au cours de séquences facilement identifiables. L'ensemble ne prend pas très bien. Le thème de la famille se trouve par exemple écartelé entre deux modes de traitements assez dissemblables. Les pulsions muettes de Aldo Ray et Tina Louise face aux coups de colère répétitifs et assez typés années cinquante du fils aîné. Une séquence moderne de bout en bout, et logiquement très réussie : la visite de la famille décontenancée -voir les attitudes du groupe- au sein du domicile du fils qui a réussi socialement.
Très subjectivement, j'ai été surpris par l'interprétation de Tina Louise (actrice qu'il faudrait rajouter au générique de la fiche du film sur dvdtoile). Elle dégage en peu de gestes et de paroles beaucoup de présence, et confère par cette seule présence un caractère très moderne à ce récit. Anthony Mann savait sans aucun doute tirer le maximum du potentiel dramatique de ses actrices…
La forme de God's Little Acre m'a paru tout simplement grandiose. De bout en bout, une qualité des plans exceptionnelle (que la qualité de l'édition du dvd édité par Wild side met en évidence). J'ai par exemple été soufflé par le travelling de la 13° minute suivi à la 14° minute d'une contre-plongée de deux secondes sur deux des personnages principaux (Robert Ryan et Buddy Hackett) , suivie d'une vue de dos d'une quinzaine de secondes de Robert Ryan (son champ troué en arrière-plan), suivie d'une plongée de cinq secondes sur les deux mêmes protagonistes. Les personnages sont examinés sous toutes les coutures, au sein de leur environnement. La mise en scène porte leurs faits et gestes, discours et idées, et propulse le récit en avant à la vitesse nécessaire, associant le spectateur au plus près de ses développements. Un côté magistral de mise en scène traverse cette œuvre, qui est à voir absolument, malgré son scénario en demi-teinte.
Page générée en 0.0066 s. - 6 requêtes effectuées
Si vous souhaitez compléter ou corriger cette page, vous pouvez nous contacter