Incroyable ! Je veux bien que le cinéma italien est le parent pauvre de la réédition DVD, mais là, franchement, Pain, amour et fantaisie qui n'est pas en DVD ! Je n'avais jamais vérifié tellement ça me semblait évident. J'en ai les jambes coupées et les bras m'en tombent… Homme-tronc, donc, je vote !
Un film qui a eu un immense succès de notoriété, qui a enchanté tous les publics, que j'ai vu à sa sortie en France en 54 ou 55…mais qui me semble avoir depuis lors totalement disparu ! Je n'ai pas souvenir, par exemple, de l'avoir vu programmé à la télévision, même aux temps où l'on ne se gênait pas de projeter un film en noir et blanc non-étatsunien en première partie de soirée…
Le troisième s'appelait en français – pour conclure !!! – "Pain, amour, ainsi soit-il !" ; mais je crois que l'idée s'était exténuée !
Idée exténuée ou pas, rien n'arrête une bonne machine de cinéma bien huilée ! Un sequel n'attend pas l'autre ! Alors, tout comme il y a un Die Hard 4 et même un Rambo 4, je rappelle l'existence d'un quatrième (et dernier !) opus de la série Pain amour…, Pain, amour et Andalousie. Très, très peu connu, faut avouer ! Si je précise ce point c'est que, dans le domaine des évidences à rééditer tout de suite, illico, sur-le-champ, évidemment il y a les deux fameuses comédies de Luigi Comencini, typiques de leur époque – dans un registre donc pas du tout doux-amer mais joyeux et bon enfant – qu'on pourrait, pour bien faire les choses, accompagner discrètement des deux autres suites au sein d'un beau gros coffret PAIN AMOUR : the Definitive Collector Edition !
Je tombe de haut, après la re-vision du premier opus de la série !
J'en avais le souvenir très ancien d'un film enlevé et drôle, réunissant des acteurs séduisants, sur un scénario léger et spirituel. Si les acteurs sont à la mesure des choses (je nourris une passion instinctive et primale pour Gina Lollobrigida et Vittorio De Sica m'a toujours paru l'homme le plus séduisant du monde), le reste n'est tout de même pas à la mesure de la réputation d'un film aussi célèbre.
Pourtant, ça commence assez bien, dans une Italie qui n'est certes pas celle du presque contemporain (1952) Don Camillo : on est là dans la miséreuse Calabre, et non dans la riche plaine du Pô et on croirait (presque) se retrouver, aux premières images, dans l'accablante Terre sans pain de Bunuel : une nature d'une grande beauté, mais absolument desséchée, des chemins caillouteux, des routes étroites, des ânes et des paysannes qui portent leurs fardeaux sur leurs têtes. Le nouveau chef des carabiniers locaux, Antonio Carotenuto, arrive au bourg : célibataire, il a les tempes argentées et le sourire enjôleur de De Sica, il rencontre Maria la sauvageonne (Gina Lollobrigida) et Annarella, la sage-femme (Marisa Merlini), l'une et l'autre vertueuses et séduisantes, et il godille un peu entre elles deux avant de se ranger avec Annarella… Mais donc, si le début est assez bien rythmé, ça s'enlise assez vite du côté du vaudeville, avec des péripéties qui ne sont ni piquantes, ni fines ; dussent mes souvenirs d'enfance en être profanés, j'irais même jusqu'à dire qu'on s'enquiquine un peu et que l'extrême prévisibilité de l'anecdote ne laisse pas même la place aux notations spirituelles à quoi on pourrait aspirer.Restent donc, outre un De Sica qui se frise les moustaches, mais dont le personnage est dépourvu de toute épaisseur (quand on pense que, la même année 1953, il a été le baron Donati de Madame de !), reste donc une Lollobrigida ravissante et capricante, qui court pieds nus sur des chemins de chèvre… Che bella ragazza !
À la fois enlevée et rustique, cette farce réserve quelques moments savoureux. Vittorio de Sica en fait des tonnes et Gina Lollobrigida est parfaite en sauvageonne "Fantassine la piquante" !
Pain, amour et fantaisie est un très beau film réalisé en 1953 sur le mode de vie au sein d'un village italien des années 1950, revu avec plaisir, trente ans après. Pas de grande théories politiques ou de doctrines philosophiques, pas de spectacles culturels à se mettre sous la dent (excepté la fête du village consacrée à Saint Antoine) ni de délinquance à combattre, simplement des paysans qui s'efforcent de se nourrir, d'élever leurs enfants sous le regard de l'Eglise, et d'assurer leur descendance. Tout se sait dans ce type de contrée, il n'y a pas d'intimité : les relations sociales se déroulent au vu et au su de tout le monde. Comencini grossit le trait, traite cet aspect sur un mode humoristique, en montrant le groupe de personnes âgées observant les différents protagonistes, avec la lunette télescopique du patriarche. Cette observation de la vie du village, traité sur un mode quasi néo-réaliste, est croisé avec des aspects de comédie, qui rendent le récit accessible à un large public, façon Le petit monde de Don Camillo (1952).
Le scénario de Ettore Maria Margadonna introduit à la perfection une dose d'émotions, communiquées de façon verbale et non-verbale, par les différents personnages. Le rythme, les aspects sonores (musique et bruitages), les dialogues (sonnant authentiques) sont très belle qualité. Les péripéties du récit mixent aspects drôles et graves, et réussissent à donner de la consistance à une intrigue assez prévisible et sans réelle surprise. La psychologie des personnages est creusée à la perfection : le prêtre, les carabiniers, les paysans nouent entre eux des relations sociales élaborées (entre le prêtre et le maréchal des Logis, par exemple, dans la fonction de "commandeur" du village). L'interprétation très nuancée de Vittorio de Sica, une Gina Lollobrigida spontanée, et toute une pléïade de très bons acteurs dans les rôles secondaires (Marisa Merlini,Tina Pica,…) apportent un liant parfait à l'ensemble. Un très beau classique, qui a aujourd'hui sa place parmi les plus belles réussites de l'histoire du cinéma italien, c'est évident.
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