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Forum : Répulsion

Sujet : Du Polanski concentré


De Crego, le 22 février 2003 à 09:34

Le seul vraiment bon rôle de la carrière de Deneuve, le seul qui soit finalement en harmonie avec sa froideur, ses maigres talents de comédienne et sa beauté distante. Du concentré de Polanski.


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De Dumbledore, le 22 février 2003 à 10:36

C'est sans aucun doute son meilleur rôle (et le meilleur film dans lequel elle a participé) mais pas forcément le seul bon rôle qu'elle a tenu. Luis Buñuel l'a également très bien utilisée comme femme froide (Tristana notamment… Mais bon, ça fait peu de films comparés à la centaine de films dans lesquels elle a joué.


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De Crego, le 22 février 2003 à 11:57

Comme tu le dis, elle a souvent été bien "utilisée" ("Les Prédateurs", "Place Vendôme") mais son unique vrai travail de comédienne, elle l'a accompli dans "Répulsion".


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De Impétueux, le 1er septembre 2004 à 21:40
Note du film : 5/6

C'est drôle, parce que, venant de regarder pour la première fois de ma vie Répulsion (acquis, soit dit en passant pour trois fois rien dans une édition convenable sur un site discounter), je venais dire ici toute mon admiration non seulement pour le talent de Polanski, qui sait faire admirablement monter la tension dramatique et photographier la survenue de la folie avec un minimum de moyens et un maximum d'efficacité, mais aussi dire combien j'avais trouvé extraordinairement exact le jeu de Catherine Deneuve qui semble porter avec elle toute la singulière folie de son personnage…

Et je retrouve vos critiques, si semblables à celle que je voulais exprimer ! C'est très bien ainsi…


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De Impétueux, le 1er mai 2005 à 09:55
Note du film : 5/6

Incidemment, je me demande si le dernier plan de Répulsion, le zoom avant sur la vieille photo et le visage de Carole tourné vers un impossible ailleurs n'a pas inspiré Kubrick dans le dernier plan de Shining ; est-ce que quelqu'un a des lumières là-dessus ?


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De Arca1943, le 2 mai 2005 à 01:18
Note du film : 6/6

Ce plan est un punch, une chute dont il faut se garder de révéler la teneur. Même 40 ans plus tard, Répulsion reste un des films les plus angoissants qu'il m'ait été donné de voir. Parce que plus encore peut-être que Rosemary's Baby ou Le Locataire, c'est du quotidien le plus ordinaire que surgit la peur. Et c'est aussi – avec le plus récent Jacob's Ladder – un des très rares films d'horreur où ni le surnaturel (comme dans Rosemary's Baby) ni même le fantastique à la Cortazar (comme dans Le Locataire, qui toutefois lui ressemble) ne sont mis à contribution. Quoique cauchemardesque, c'est un récit du monde réel. L'appartement de l'héroïne est encore plus banal, plus ordinaire que celui de Rosemary – et à plus forte raison que celui de Trelkovsky, tout imprégné des souvenirs de Simone Choule. Adieu château des Carpathes aux portes qui grincent, adieu même la maison Bates à la silhouette expressioniste : c'est un appartement comme il y en a des millions. Et dans cet appartement, retranchée de ce monde plein de gens qui n'arrêtent pas de vouloir la frôler, la toucher, et juste le temps d'un long week-end, Catherine Deneuve (vraiment excellente !) qui pète les plombs de plus en plus…

C'est tout simple : Catherine Deneuve repasse du linge en chantonnant; l'échelle des plans change; je deviens blanc comme un linceul. Au secours !! Et voilà : Roman Polanski, maître de la peur.


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De Vincentp, le 2 mai 2005 à 21:33
Note du film : 5/6

J'ai cru comprendre (mais peut-être me suis-je trompé) que ce plan (un regard fixe d'enfant tourné vers visiblement son père) donnait la signification de la "répulsion" du personnage joué par C Deneuve vis à vis des individus de sexe masculin.


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De Arca1943, le 1er juillet 2007 à 18:36
Note du film : 6/6

Je me cite, mais pour la bonne cause : « une chute dont il faut se garder de révéler la teneur ». Pour tous les spectateurs qui ne l'ont pas encore vu, il n'est certes pas cool de décrire le dernier plan de ce film. Ça lui enlève de l'impact : voulez-vous vraiment faire ça au film de Roman Polanski ?


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De Impétueux, le 1er juillet 2007 à 22:28
Note du film : 5/6

Mais cher Arca, tout le fil du sujet – que j'ai l'honneur d'avoir initié et à quoi vous aviez ajouté votre grain de sel (et un peu davantage) est précisément fondé sur l'analyse de – ou le questionnement sur – ce plan !

Alors, faudrait-il tout effacer, parce que beaucoup n'ont pas encore vu le film ?


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De Arca1943, le 1er juillet 2007 à 22:43
Note du film : 6/6

Mhouais. Tagadap, tagadap  : c'est le bruit caractéristique de la cavalerie arrivant trop tard. Néanmoins, à titre d'ingénieur en histoires à chutes, je réitère que de manière générale, il devrait y avoir moyen de discuter d'un récit sans en révéler la fin – enfin pas trop, ou pas complètement. « Ne soyez pas "diabolique" : ne racontez pas la fin de ce film à vos amis ! » pouvait-on lire à la fin d'un célèbre film à la conclusion fracassante. C'est le moment de sortir notre art de la périphrase, de la litote, du sous-entendu du dialogue en style piémontais. « Vous savez, ce plan final qui nous éclaire sur les causes de l'état d'esprit de l'héroïne ? » « Ah oui, vous voulez parler de cette image où une petite fille regarde intensément quelque chose ou quelqu'un ? » Pauvres et malhabiles exemples, si l'on veut; mais tout en ne souhaitant pas en faire une règle officielle du forum – il vaut mieux faire confiance àl la bonne volonté des internautes – j'attire l'attention sur le fait que le site IMDB comporte des règles strictes à cet égard : contains spoilers


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De Impétueux, le 8 mars 2014 à 21:23
Note du film : 5/6

Finalement et après tout je me demande si le dernier plan, sur quoi on a beaucoup glosé et qui pourrait être une explication du comportement de Carol (Catherine Deneuve) est si important que ça dans la qualité de Répulsion. Et à la réflexion, je me dis qu'il livre une explication peut-être trop facile, trop intellectuellement satisfaisante, de cette folie et de cette angoisse qui montent tout au long du film. Dès lors, l'inceste jadis subi, qui donne sens au regard fou porté, dans la vieille photo par Carol sur son père (on a toute faculté d'imaginer cela) serait une clef d'évidence, qui permettrait, d'une certaine façon, au spectateur de respirer et au réalisateur de justifier la démence exposée.

Parce que le véritable sujet, c'est précisément l'étude, presque clinique, presque expérimentale, du dérèglement d'une jeune femme timide, inhibée, taciturne, mutique, lointaine, dont le mal-être est perceptible dès les premières images (son absence alors qu'elle est en train de manucurer les doigts d'une cliente de l'institut de beauté où elle travaille), mais dont l'évident déséquilibre est tenu jusqu'alors en lisière. Par qui, par quoi ? On ne sait pas trop… Parce que Carol a quel âge ? 23 ans, comme avait Catherine Deneuve en 1966, qu'elle est sûrement fragile aux yeux de sa sœur Hélène (Yvonne Furneaux), mais n’est pas vraiment inquiétante…

Tout l'art de Roman Polanski est de faire assister le spectateur aux quelques jours où cette fragilité va s'écrouler, où la mince couche de sociabilité, de normalité de Carol va céder et où, graduellement, elle va s'enfermer dans sa folie et dans son abomination de l'homme et de la sexualité pour finir dans un déchaînement de violence.

En revoyant Répulsion et sa brutalité, j'ai songé au crime commis en France, 33 ans avant le film, par deux domestiques discrètes et exemplaires, les sœurs Christine et Léa Papin, qui ont massacré sans apparente raison leur patronne et sa fille de manière atroce. (Drame qui a inspiré plusieurs films : Les Abysses de Nikos Papatakis, La cérémonie de Claude Chabrol, Les blessures assassines de Jean-Pierre Denis). Et je ne suis pas loin de penser que cette affaire très célèbre et très médiatisée a pu donner quelques idées à Polanski… (Tiens, par exemple la présence récurrente, dans le film de la dépouille répugnante de la carcasse de lapin : les sœurs Papin avaient, si je puis dire, traité leurs victimes comme ces charmants comestibles, les énucléant et les scarifiant de façon, paraît-il, parfaitement conforme aux bons usages).

Polanski, dont Répulsion n'est que le deuxième long métrage, filme la descente aux enfers de Carol avec un art consommé de la mise en scène, grâce à des choix d'angles bizarres, sophistiqués, malsains (comme il le fera plus tard – c'est très justement noté par Arca – dans Rosemary's baby et Le locataire). Et aussi grâce à un travail très précis sur le son (les cloches de l'école voisine, les bruits de pas, le tic-tac d'un réveil pendant le viol fantasmé subi par Carol) et la musique.

C'est peu dire que Catherine Deneuve porte le film : elle l'incarne et le personnifie. Les autres acteurs, nullement médiocres au demeurant, ne sont que des silhouettes très passagères, vite oubliées : Deneuve marque avec un infini talent, dans ses moindres nuances, la dérive et l'implosion d'une jeune femme perdue.


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