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Incroyable beauté visuelle


De Impétueux, le 16 février 2016 à 17:36
Note du film : 4/6

S'il ne s'agissait que d'apprécier la beauté, le raffinement des images et des lumières, le soin apporté au choix des décors, des costumes et des objets de la vie quotidienne et des servitudes militaires, si l'on pouvait ne rester que dans un magnifique livre d'art, certainement Duellistes mériterait la note la plus haute. Je n'ai pas souvenir d'avoir aussi été émerveillé, pour la composition toujours maîtrisée de la surface entière de l'écran, depuis Barry Lyndon ; et, de fait, un arrêt sur l'image, à quelque moment du film qu'il intervienne, donne toujours l'impression que le réalisateur a attaché à chaque instant un soin maniaque à l'esthétique de son travail.

Mais cette suite de tableaux superbes est au service d'un scénario aussi mince qu'une feuille de papier à cigarette, qu'il aurait peut-être été plus propice de tourner en moyen métrage, si les considérations commerciales l'avaient permis. Les deux soldats de la Grande armée, Gabriel Féraud (Harvey Keitel) et Armand d'Hubert (Keith Carradine) n'ont aucune épaisseur, aucune substance, aucune réalité, demeurent purement iconiques, simples machines à porter bellement les uniformes chamarrés de l'Empire et à se ficher des peignées mémorables avec tout l'arsenal des hussards.

J'exagère un peu ; dans sa seconde moitié, le film dote le charmant d’Hubert d'une Laura (Diana Quick), maîtresse qui a roulé dans tous les fourgons des armées puis, plus sagement, d'une calme épouse, Adèle (Cristina Raines) et lui façonne un bout de personnalité, attachante au demeurant. Mais on ne saura rien, ou presque, de son ennemi Féraud. Voilà qui ôte beaucoup d'intérêt à une œuvre qui aurait pu être bien davantage bâtie sur l'aversion instinctive, immédiate, irraisonnée (et d'autant plus forte qu'elle est ainsi constituée) des deux hussards, même si c'est d'évidence, Féraud qui cherche le plus constamment des noises à d'Hubert, qui en est bien embêté.

Duellistes est un film trop beau pour être vrai, trop travaillé, trop léché, trop sophistiqué, trop enchanté de soleils levants sur la rosée et trop transi de brumes glaciales, trop pictural, trop décoratif pour demeurer autrement que comme un superbe exercice de style un peu vain.


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De vincentp, le 28 février 2010 à 18:36
Note du film : Chef-d'Oeuvre

A propos de Turner et Constable, dont Scott semble s'être inspiré (?) pour Les duellistes: allez voir, si vous le pouvez, au Grand Palais, à Paris, en ce printemps 2010 l'exposition consacré à Turner et à ses sources d'influence picturales (Lorrain, Rembrandt, Canaletto, les peintres paysagistes hollandais, voire Watteau…). Prenez un audio guide, achetez et lisez le livre catalogue de l'exposition, qui est peut-être l'expo de l'année (avec celle consacrée à Monet à l'automne). Le travail sur les agencements au sein du cadre, sur la couleur (et surtout sur la lumière pour Turner), mené par ces grands maitres trouve son prolongement dans le cinéma actuel (du moins le plus intéressant). A la Cinémathèque française, l'exposition consacrée à la famille Renoir mettait en rapport la peinture de Auguste avec les films de son fils Jean, de son neveu Claude. Il reste beaucoup à découvrir pour le commun des mortels que nous sommes, au sujet des liens entre le cinéma et la peinture…

Une exposition "Turner et ses maitres" qui nous rappelle que Titien fut le premier artiste reconnu (?) de l'histoire qui instrumentalisa un paysage comme personnage à part entière, lui conférant par exemple un caractère menaçant ou accueillant. Technique abondamment employée dans le cinéma contemporain.


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De Gaulhenrix, le 10 mai 2003 à 01:11
Note du film : 5/6

A l'occasion de la sortie Dvd zone 2 du film.

Voici enfin en DVD le premier film de Ridley Scott qui obtint le Prix de la Première œuvre lors de sa présentation à Cannes en 1977.

En 1800, le lieutenant de l'armée napoléonienne Gabriel Féraud (Harvey Keitel) se bat en duel contre le neveu de maire de Strasbourg qu'il blesse grièvement. Armand d'Hubert (Keith Carradine), également lieutenant, est chargé par son supérieur de le mettre aux arrêts. L'interpellation, courtoise, est pourtant mal venue puisque Féraud se retrouve doublement humilié : d'une part, parce qu'elle intervient devant Madame de Lionne dans le Salon de laquelle il est invité, et, d'autre part sans doute, parce que D'Hubert est noble alors qu'il n'est lui-même que roturier. Furieux, Féraud provoque aussitôt en duel D'Hubert.

Cette rencontre conflictuelle marque le point de départ d'une confrontation de seize années au cours desquelles Féraud ne cesse de combattre en duel d'Hubert chaque fois que leurs routes se croisent.

Adapté d'une nouvelle de Joseph Conrad, ce film propose un scénario profondément original. Il met en relief une véritable obsession : le désir qu'a Féraud de tuer d'Hubert en dépit des efforts de ce dernier pour mettre fin à un conflit qu'il ne comprend pas et qu'il juge fréquemment « absurde ». Les duels récurrents qui rythment le film ne cessent de gagner en sauvagerie : le premier, à l'épée, se déroule selon les règles de la courtoisie ; le second, au sabre puis à mains nues, révèle, au contraire toute la sauvagerie dont l'homme est capable ; le troisième, à cheval, exprime le désir de tuer. (…) Quant au dernier, au pistolet, il signifie la fin de la confrontation par la mort annoncée de l'un des deux protagonistes.

Les deux raisons originelles, ci-dessus évoquées, ne peuvent suffire à expliquer un sens de l'honneur pareillement développé. De même que le Barry Lyndon (1975) de Stanley Kubrick – auquel le film de Ridley Scott fait irrésistiblement penser – montrait la vanité de toute destinée, on peut se demander si Les Duellistes ne met pas en exergue l'ennui et la vacuité de la vie humaine et la volonté acharnée de lui donner un sens et un prix (fussent-ils les plus absurdes !), dans le défi permanent lancé à la mort, renforcé par la haine envers qui touche à l'honneur.

Le plan final – énigmatique – montre un Féraud de dos (qui évoque Napoléon avec son célèbre bicorne) dominant une rivière sinuant dans un magnifique paysage au couchant. Faut-il y voir un rapprochement avec le destin de Napoléon, lui aussi humilié et défait ? Ne symbolise-t-il pas, plus généralement, l'échec de toute existence fondée sur des projets qui n'aboutissent jamais ? Cette silhouette immobile finale ne représente-t-elle pas cette ultime méditation – apaisée (sérénité du paysage) – sur la vie ?

On ne peut passer sous silence l'incroyable beauté visuelle de ce film. Il nous offre, d'abord, une immersion juste et vraie dans une période oubliée qui se met à revivre quasi charnellement. L'époque est en effet reconstituée avec une extrême précision et un tel réalisme ne se voit que très exceptionnellement : chaque plan nous surprend ! Mais cette reconstitution est photographiée, d'autre part, avec un tel souci esthétique, avec une telle méticulosité que chaque image, soigneusement composée, se présente comme un véritable tableau de maître : ordonnancement des éléments, harmonie des couleurs, jeu des contrastes, tout est somptueusement agencé et mis en valeur. Une parfaite réussite !

           

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