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Forum : La Plus belle soirée de ma vie

Sujet : Des monstres si sacrés...


De Tamatoa, le 30 avril 2014 à 18:12
Note du film : 5/6

C'est une fable irrationnelle servie par des monstres tellement sacrés, au soir de leur vie. Le dernier regard des dieux du septième art, comme une faveur. Un étrange rêve que l'on pourrait faire après un repas bien arrosé. Il ne faut pas chercher à comprendre. La réalisation de ce film fut un vrai parcours du combattant, dû à la mort de Pierre Brasseur pendant le tournage. Le vieux fou montra les griffes et grogna pour la dernière fois, entouré par la laideur lumineuse d'un Michel Simon, la retenue noble de Charles Vanel, la distinction sans faille de Claude Dauphin, et la gouaille caquetante d'Alberto Sordi. Il est à parier que le grand Ettore Scola pensait tenir là le film de sa vie, pourtant si riche de tant d'autres, tendrement ancrés dans le cœur des cinéphiles de la botte de l'Europe. Mais il lui a fallu conjuguer avec l'ombre qui décida d'emporter le plus célèbre des Frères Karamazov. Et le film s'en ressent, bien sûr. Un montage très approximatif nous gâche un peu le plaisir. Une post-synchronisation très aventureuse également. Mais pas assez pour que nous ne trouvions que des critiques négatives à offrir au jugement de celui qui n'a pas encore vu cette œuvre. Certes, on peut penser que ce film n'a ni queue ni tête. Qu'il serait un brin ennuyeux. Que des longueurs viendrait nous assoupir. Et, la main sur le cœur, c'est peut-être vrai. Mais l'étrangeté, le mystère, le lyrisme qui se dégage de ce scénario improbable nous réconcilient illico avec le positif. Et puis qu'ils sont beaux, ces magistrats magistraux ! Ils sont les rois, les maitres du plateau, à l'aise comme dans des charentaises offertes par le réalisateur de Nous nous sommes tant aimés. Ils auraient pu être Affreux, sales et méchants, ils ne sont que talent, rigueur et habités d'une carrière qui, tel le nez de Cyrano, de cent pas en tous lieux les précède…. Même Alberto Sordi les regarde jouer. Il semble accepter avec une joie sans pareille ce tribunal improvisé, on ne saura jamais trop pourquoi. Peu importe le pourquoi du comment : le génie est derrière chaque porte et le château n'en manque pas.

C'est un film étrange donc. Le mystère s'installe et se dispute avec une certaine peur qui ne manque pas de nous envahir. Pourquoi ce tribunal ? Que veulent vraiment ces notables à la retraite ennuyeuse ? Mystère qui demeurera jusqu'à cette fin qui n'en finit pas de nous la faire aimer. La chute dans le ravin de cet amoureux des femmes, qui rira, chantera devant la mort pendant de très longs instants au son d'une musique enivrante est un pur bonheur. Il va mourir, Alberto mais il vient de vivre un rêve. Peut-être le plus délirant de sa vie. Et la soubrette, tellement gironde, qui précipite sa perte l'accompagne dans son malheur. Alors il est heureux de mourir, Alberto. Et on se surprend à penser que la mort qui l'attend en bas de ce ravin doit être si douce qu'on aimerait bien, paradoxalement, vivre la même. Enivré par le talent de ses juges, par la chute de reins et le corsage généreux d'une bonne servante dévouée, la vitesse d'une splendide Maserati, dans un tourbillon à la fois absurde et magique, aidé par les effluves d'un vin capiteux, oui, il doit faire bon mourir. C'est un film fou à la folie douce et riante. A l'onirisme qui nous berce follement. Et cette ivresse majestueuse tout du long. Ivre, encore et toujours, loin de toute morale puante.

La plus belle soirée de ma vie, c'est à la fois le crépuscule des aigles du cinéma français mais aussi le rire et la joie de vivre fulgurante d'un des plus grands acteurs italiens. Sous la baguette folle et prenante d'un cinéaste, mieux placé que quiconque pour mener cet étrange Bal

Moi, j'en redemande.


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De Arca 1943, le 30 avril 2014 à 22:16
Note du film : 5/6

Bon retour parmi nous, Tamatoa ! Vous ne pouviez mieux remettre le pied à l'étrier qu'avec cette énième cocasse et tragique aventure de l'inénarrable Albertone. Toute une troïka de magistrats, en effet, nostalgiques de leur boulot et qui s'amusent à juger le douteux industriel… Mais ils s'amusent ou bien c'est pour de vrai? semble se dire Sordi apeuré. Sacré finale. Je le reverrais bien sortir en DVD, tiens ; peut-être en programme double avec Drame de la jalousie


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De Impétueux, le 1er mai 2014 à 22:17
Note du film : 4/6

Comme Tamatoa, je pense (Tamatoa dont je salue le retour), j'ai vu que La plus belle soirée de ma vie, célébrée à grands cris sur notre site, était passée à la télévision ; et j'ai enregistré le film que je me promets de regarder un de ces jours…. On est alléché d'avance !


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De Impétueux, le 14 mai 2014 à 18:55
Note du film : 4/6

J'ai été très surpris, presque décontenancé par cette Plus belle soirée de ma vie dont j'avais entendu, ici et là, chanter merveilles et qui me laisse la curieuse impression d'un film inabouti, parcellaire et mal satisfaisant. Je crois que ce petit mystère est très explicable par la disparition brutale de Pierre Brasseur en cours de tournage, qui a en grande partie déséquilibré le récit et a contraint Ettore Scola à des choix périlleux, hasardeux mais, naturellement obligés…

J'aime beaucoup le long début et la brève conclusion du film, beaucoup moins toute la partie centrale, le procès à la fois bouffon et angoissant qui m'a semblé bien verbeux, assez lent et sans rythme ; ce n'est évidemment pas la faute des acteurs, tous impeccables, y compris la charmante vénéneuse Simonetta (Janet Âgren), mais davantage de la théâtralité mal dissimulée, naturellement issue de la nouvelle de Dürrenmatt, qui est avant tout un dramaturge, macabre, cynique et provocateur.

Rétrospectivement, je me suis amusé à rapprocher La plus belle soirée de ma vie avec quelques films très différents, qui n'ont d'autres rapports que d'être venus à un moment donné dans mon esprit. J'ai vite écarté, dans les images d'embouteillage initiales, le souvenir très fluet du Week-end de Godard et dans celles de la prospérité suisse, celui, plus proche et plus agréable de Jeu de massacre.

En revanche, dans la captation/fascination d'Alfredo Rossi (Alberto Sordi) entraîné au château par la séduction d'une belle motarde, j'ai retrouvé l'esprit de la sanguinolente série Hostel où des types sont attirés dans une sorte d'abattoir par de jolies filles mystérieuses et peu farouches… Quant à la charrette qui survient providentiellement pour emmener au château le voyageur égaré, charrette conduite par un cocher muet, je doute qu'on puisse n'y pas voir une allusion à un des multiples Dracula de la Hammer.



Enfin, dans l'exquise urbanité – purement superficielle – des quatre justiciers et la distance qu'ils prennent avec leur potentielle victime, j'ai comme perçu l'écho de Salo, dont les quatre protagonistes monstrueux sont – quel hasard ! – Le Duc, l'Évêque, le Juge et le Président. Et on pourrait même trouver, dans la révélation des faux-semblants qui sont révélés au pauvre Rossi, lorsqu'il quitte le château, quelques analogies avec les troublantes impostures du Prisonnier de Patrick McGoohan.

Le film dure 1h48 et il paraît que Scola, avant la mort inopinée de Pierre Brasseur prévoyait 2H20. J'ignore où et quand cette demi-heure aurait trouvé place et quel(s) moment(s) auraient été densifiés. Toujours est-il que, telle qu'elle est, La plus belle soirée de ma vie me semble tout autant artificielle que fascinante.


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De verdun, le 15 mai 2014 à 00:12
Note du film : 4/6

Vu il y a quelques années. Un film qui mérite sa bonne réputation grâce à son interprétation de haute volée, et grâce à un scénario remarquable, meilleur que le roman qui l'a inspiré, "La panne" de Friedrich Durrenmät.

Celà dit le film me semble souffrir du fait que Scola est un grand artiste, un scénariste fabuleux mais pas forcément un grand filmeur; ici la mise en image m'avait semblé languissante.


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De New-JPL, le 18 novembre 2014 à 06:40
Note du film : 5/6

A voir au moins pour l'excellence de Michel Simon. En outre, les thématiques de chasse à l'homme et de voyage aux confins d'une mort obscurément annoncée semblent résonner, quelques années plus tard, dans Alice ou la dernière fugue de Chabrol. A conserver de toute façon !


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