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Forum : Le Trou normand

Sujet : Les amis..


De Tamatoa, le 13 juin 2013 à 00:05
Note du film : 4/6

Le trou Normand… Et si je vous disais d'abord que ce film porte bien son titre et pour deux raisons : primo, parce que vu le scénario, je ne vois pas quel autre intitulé on aurait pu imaginer, et ensuite ce film, qualifié de "petit" par les inconditionnels de Nagisa Oshima agit comme la vieille recette du Calvados : chaque scène est un petit coup de Calva qui donne envie de connaitre la suite. Et vous ne le croirez pas mais Madame et Monsieur Michu se régalent ! Certes ce n'est pas le chef-d’œuvre du siècle. Oui, on a vu notre Bourvil dans des rôles autrement plus prenants. Je visionnais encore hier au soir Le cercle rouge et je pensais au chemin parcouru. C'est vrai : cette histoire de benêt, un de plus me direz vous, qui essaye d'obtenir son certificat d'études pour hériter d'une auberge, ça ne fait pas très Akira Kurosawa. Et la présence de la jeune Bardot n'a rien qui puisse intellectualiser le tout. Mais je vais, et sans faire rougir mes cheveux poivre et sel, vous faire un aveu :

J'aime ça ! Oui, j'aime, à travers un scénario banal, un peu bébête, un rien indigent, j'aime retrouver ces visages qui nous ont donné tant de joie depuis tant d'années. Ces excentriques du cinéma, Pierre Larquey qui n'avait pas encore subi les foudres du directeur de collège Lassalle dans Les diaboliques, Jane Marken à peine descendue du Taxi de Monsieur Hunebelle et non pas de celui, débile, de Gérard Pirès, Noël Roquevert qui avait renoncé à courir derrière Fanfan la Tulipe, Roger Pierre, timide débutant qui raconta avec la verve qu'on lui connait, mille anecdotes sur ce film, ou Duvaleix qui avait raccroché sa toge de président de la chambre correctionnelle dans Monsieur Leguignon, lampiste pour n'être "que" notaire dans cette Normandie profonde. Sans oublier Georges Baconnet, avec son faux air de Raymond Souplex qui a trainé sa bonhomie dans moult œuvres légères comme leurs titres. Où sont ils partis, tous ? Quelle nuit les a donc emportés ? Où est donc passé ce cinéma sans histoires, bucolique, qui fleurait bon la paix d'hier, les ruisseaux et le talent ? Le "sérieux" n'avait pas encore renvoyé Monsieur Michu et sa dame dans les sarcasmes d'un cinéma prétentieux. La fausse bêtise et les grimaces de Bourvil, les voix reconnaissables entre mille, les tics des uns et les films fantômes et merveilleux que tenaient les autres par la main, tout cela avait encore pignon sur rue. Ses rues encore pavées où fleurissaient les cinémas de quartiers fiers, si fiers de présenter les dernières aventures de Bourvil aux Michu de tous poils qui n'en demandaient pas plus..

Oui, j'aime voir et revoir leurs trognes à tous ! Entourant un acteur toujours attachant, ils semblent prendre une récréation bien méritée. Jean Boyer, peut-être moins inspiré ici que dans Circonstances atténuantes ou Nous irons à Paris, nous offre quand même une histoire même si simplette, fort bien enlevée par la présence de tous ces géants. Un film où l'on voit de très vieilles grand-mères, drapées de noir, aller à l' église faire brûler des cierges énormes en demandant au Saint Esprit la réussite d'un esprit plus simple, auquel elles croient encore. Où le physique des amoureuses ne peut espérer que l'amour de l'idiot du village, sans savoir que cet amour est le plus pur qui soit. Un film où les gendarmes sont gentils et les maitres d'école très indulgents. Où le pardon est de mise et le cidre bien doux. C'est un film tendre qui se voudrait tourbillonnant mais qui ne fait que nous renvoyer à une époque disparue. Des sentiments pudiquement cachés, pas de flingues, pas de cascades, le mystère aux abonnés absents mais un peu de bonheur qui mijote doucement dans un coin de notre crâne.

Ce cinéma a existé : je l'ai rencontré hier au soir. Il n'est plus. Même si on a maladroitement tenté de lui donner de bien vilaines couleurs, comme pour le faire ressusciter d'une nuit noire et blanche désormais dédaignée par une époque qui ne veut plus se souvenir… Alors Madame et Monsieur Michu se demandent bien ce qui a pris aux hommes d'inventer des films où on aperçoit des formes alliées à des sons, dans un ensemble souvent très élaboré et bizarre, qui sollicitent la pensée du spectateur, à qui on demande un effort constant de traduction de concepts et de symboles. Ils comprennent bien qu'il en faut pour tous les goûts et que tous sont dans la nature. Mais ils doutent fort qu'un petit coup de Calva puisse les aider à piger les concepts et les symboles alors qu'il est si simple et tellement agréable de respirer le grand air de la Normandie, avec de vieux, très vieux amis..


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De Commissaire Juve, le 13 juin 2013 à 14:33

Cela dit, lors de la dernière diffusion (sur D8), c'était un massacre : image colorisée et format 1.33 recadré dans le sens de la hauteur ! L'horreur ! Il y a des chaînes qui devraient être interdites de diffusion de classiques.


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De vincentp, le 13 juin 2013 à 18:28

Je qualifie de "Bourvil" un de mes voisins issu d'un milieu populaire et qui s'exclame ceci (avec exactement la voix de l'acteur):

  • vis à vis de sa fille âgée de trois ans : "on te dit pas que tu es cruche à la crèche ?"
  • alors que la pluie se met à tomber drue sur sa tête : "putain de bordel de merde !"

Plus sérieusement, le temps compté m'impose de faire porter mes efforts sur un choix restreint de long-métrage (parmi les 14 000 références que compte ma médiathèque), et bien sûr, je vous laisse la liberté de descendre la filmographie de ce brave Bourvil.


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De fretyl, le 28 mai 2019 à 11:09
Note du film : 1/6

J'aime bien finalement Bourvil dans le drame ou dans la comedie dramatique

Lorsqu'il essaye d'être drôle de cette façon là… Je ne peux pas !

J'ai eu l'impression en regardant Le trou normand qu'il fallait se moquer d'un handicapé mental !


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De Impétueux, le 21 avril 2020 à 14:18
Note du film : 1/6

J'aimerais bien aller dans le sens de Tamatoa, de ne pas accabler ce cinéma bon enfant qui a été indispensable au cinéma tout court, qui avait besoin de sa simplicité, de ses vedettes, de ses truculences pour que puissent émerger des œuvres plus ambitieuses et mieux tenues. J'aimerais bien trouver dans le foisonnement des acteurs de second rang, tous plus sympathiques et talentueux les uns que les autres des raisons de défendre Le trou normand, son récit bonhomme, la douceur paisible des villages de 1952, les bistrots où la société se retrouve, les écoles peuplées de garnements obéissants (faux oxymore volontaire) et la religion du certificat d'études qui valait bien autant qu'un baccalauréat d'aujourd'hui.

Mais ce n'est tout de même pas possible : c'est trop bête. Remarquez bien qu'il ne faut pas regretter que des films comme celui-là soient encore vivants et fulminer que des chaînes de télévision marginales les diffusent, même hideusement colorisés. Somme toute il n'est pas d'exploration qui soit inutile et il existe de savants archéologues qui passent leur vie à décompter et à étudier les fragments éclatés de poteries pré-achéennes découvertes sous un tumulus, puis rédigent sur ce passionnant sujet des monographies considérables vendues (on ne sait à qui, mais en tout cas proposées à la vente) dans des boutiques spécialisées du Quartier latin.

Archéologie déjà, que la présence, la toute première présence à l'écran de la très jeune (18 ans) Brigitte Bardot, déjà aussi charmante et dépourvue de talent qu'elle l'a toujours été. Archéologie aussi, d'une certaine façon, la fin des niaiseries normandes de Bourvil, qui s'était trop longtemps complu dans ce personnage de nigaud, de benêt campagnard, inauguré dans Pas si bête d'André Berthomieu en 1947. Comment d'ailleurs les Français, peuple prompt au sarcasme pouvaient-ils supporter de placer en tête d'affiche pareille représentation d'un gentil crétin aux bons yeux, traînant un évident pucelage même à un âge largement nubile ? Il est vrai que le film de Jean Boyer et ceux de la même farine devaient, davantage que dans les grandes cités, trouver leur public dans des bourgades très rurales où les personnages archétypiques de ce cinéma pouvaient facilement être assimilées à des villageois bien connus. Archéologie, enfin, ce certificat d'études qui était un des premiers rites de passage des sociétés traditionnelles, motif de fierté ou de honte pour les familles, avant le second et définitif rituel du conseil de révision et du service militaire…

Ayant écrit ça, on a à peu près fait le tour des minces qualités et sujets d'intérêt (très relatif) du Trou normand et on est bien obligé de se heurter à l'infinie bêtise du scénario d'Arlette de Pitray, petite-fille de la Comtesse de Ségur, mais qui n'avait pas le quart du tiers du talent de son aïeule, n'en avait gardé que les fins heureuses mais y avait ajouté une dose de mièvrerie peu supportable.

Donc le brave Hippolyte (Bourvil), amoureux transis de sa cousine Javotte (Bardot) n'héritera de son oncle Célestin l'auberge du Trou normand que s'il parvient à décrocher dans l'année son certificat d'études. Faute de quoi, c'est Augustine la charcutière (Jane Marken), mère de Javotte qui récupérera l'auberge et le magot. On imagine les ramifications torrentueuses de ces prémisses excitantes : on ne sera pas déçu, c'est aussi mauvais qu'on devait le craindre.

Comment avons-nous pu ?


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