4,5/6. Une (très) bonne illustration de la perception du temps par l'être humain, avec une mise en scène au diapason. Le sujet est bien creusé, et riche en idées (comme l'évocation des souvenirs liés à la guerre d'Algérie). En matière de mise en scène, les plans fixes quasi-subliminaux qui se succèdent à toute vitesse, suggèrent une altération de l'écoulement du temps traditionnel. Il y a aussi ces images de carte postale qui évoquent un passé, que l'on découvre par bribes, tel un kaleidoscope complexe se dévoilant petit à petit.
Muriel,
par son écriture cinématographique, vise à propulser le spectateur dans la psychologie de personnages déphasés, en quête de repères existentiels, ayant du mal à assumer le moment présent (difficultés de communication) et à se projeter dans un futur proche (des projets confus). Cet aspect du film est très réussi, et au moins pour cette raison
Muriel mérite d'être découvert.
Toutefois, ce film est plutôt cérébral et à réserver à un public cinéphile et averti. Et surtout, il accuse le poids des ans, via les comportements d'un autre âge des personnages (par exemple, la ménagère semble extraite d'une publicité des années cinquante pour une cuisinière).
Sur ce même sujet du temps qui passe, j'aurais tendance à préfèrer très subjectivement Robinson Crusoe de Bunuel, dans un style plus classique (celui des années cinquante). Il vaut mieux -de mon point de vue- fondre des thèmes sérieux dans une histoire, plutôt que de les faire occuper le premier plan, de manière trop visible. Ou alors, il faut être un cador de la mise en scène comme Antonioni pour y parvenir sans perdre le spectateur en route. Ce point de vue est discutable, mais il se trouve que c'est aussi souvent une caractéristique du cinéma des années 2000 (ex : A history of violence aborde le thème de la violence via une histoire policière). Peut-être que le cinéma actuel fait une synthèse des types d'écriture cinématographique qui l'ont précédé.