Tiens, les exploits des russkofs ne susctitent pas l'enthousiasme des foules ! Pourtant cette adaptation de l'oeuvre de Tolstoï par King Vidor (assisté par un grand nombre de scénaristes) est somptueuse : par la qualité de l'adaptation de l'oeuvre littéraire, de l'interprétation, photographie, par ses changements de rythme et de ton également. Des moments de suspens, étirés jusqu'à l'extrême, alternent avec brio avec des scènes intimistes déroulées à plus ou moins grande vitesse. Les trois heures trente de ce grand spectacle passent à toute allure. On perçoit constamment la patte d'un grand cinéaste…

La copie dvd étant d'excellente qualité, on ne peut que le conseiller à tous !

Même si je suis un inconditionnel de la version très longue de Sergueï Bondartchouk, je viens d'investir dans la version de King Vidor suite à l'avis de notre ami Vincentp…

J'ai vu (nous avons vu) Guerre et Paix. En ce qui me concerne, je l'avais vu il y a déjà un… certain temps !

Le titre de l'article "Autant en emporte le blizzard" est plein d'humour mais qualifie pleinement le ressenti intellectuel à la fin de l'oeuvre. Quant au ressenti physique, quelques douleurs dans le dos pour être resté assis aussi longtemps devant l'écran sur un canapé plutôt inconfortable.

Si l'esprit de l'oeuvre de Tolstoï est là, néanmoins, une certaine déception au niveau des toutes dernières images : la fin est ici idyllique quand celle décrite par Tolstoï apparaît assez pessimiste quant à l'évolution des personnages de Pierre et surtout Natacha.

Détail : Tolstoï (à cette époque où la Guerre froide caractérise notre monde) est devenu Tolstoy ! Manquait plus qu'un "o" supplémentaire qui nous aurait donné "Toolstoy" !

En ce qui concerne les spectateurs qui souhaitent se voir épargner la durée de l'oeuvre de Bondarchouk, ils peuvent regarder tranquillement celle de King Vidor. Elle est sérieuse.

Je partage votre avis : c'est du beau cinéma traditionnel, sans défauts majeurs, sans grain exaltant, mais, au final, de la belle ouvrage comme on n'en fait plus : Hollywood dans ce qu'il avait de meilleur…

Je crois bien que c'est dans ce film que j'ai été, pour la première fois, fasciné par le charme exceptionnel de Vittorio Gassman…

Cela dit, comme je n'ai pas vu la version de Bondartchouk, ni jamais de ma vie lu le roman de Tolstoï, je retiens un peu mon commentaire… (au fait, cher Droudrou, ne vous étonnez pas des curieuses transcriptions du cyrillique : jeune homme, en séjour linguistique en Allemagne, je me demandais qui pouvait bien être ce Krustchow dont le nom s'étalait en première page des journaux, jusqu'à ce que je m'aperçoive que c'était, en graphie française, tout simplement Nikita Krouchtchev !)

A voir, l'adaption, en coproduction, de Tolstoi sur le service public télévisuel cette semaine. Ce téléfilm a l'air, selon les extraits, intéressant… on verra…

C'est tout de même bien long, ces 3 heures 20 de spectacle, même si les images sont belles et Audrey Hepburn adorable ; je me demande s'il ne vaut pas mieux regarder, précisément, l'adaptation de Sergueï Bondartchouk qui dure exactement le double de temps (6 heures 4O) mais qui, découpée en quatre épisodes, est plus appropriée, sans doute, à une mesure raisonnable des choses. Du moins si l'on peut qualifier de raisonnable le foisonnement torrentueux de l'œuvre de Léon Tolstoï (près de 1700 pages en Pléiade !) et, d'une façon générale, tout ce qui peut toucher la Russie et les Russes.

Toujours est-il qu'il ne manque pas un bouton de guêtre, pas une soutache, pas une soubreveste, pas une passementerie sur des dolmans chamarrés, que la vodka coule à flots lorsque c'est le moment de la servir, et que le champagne le remplace de temps à autre, que les moujiks sont rieurs, soumis et ivrognes, les grands seigneurs complètement cinglés, violents, intrépides et cruels, que l'on s'embrasse dans de grands émois démonstratifs, que les palais sont immenses et glaciaires, les cœurs rudes et les sentiments démesurés…

Ce film, produit par les roublards Italo-Américains Carlo Ponti et Dino De Laurentiis, agrémenté d'une distribution internationale, certes à dominante étasunienne (les grandes stars Fonda, Ferrer, Hepburn) mais puisant ici et là en Mitteleuropa (Herbert Lom, Oskar Homolka, prodigieux Généralissime Koutouzov) ou en Italie (Vittorio Gassman, Tullio Carminati) ou absolument n'importe où (Anita Ekberg), ce film, donc, tourné, qui plus est, en pleine Guerre froide (1956) donne de la Russie la même image folle que des œuvres de Slaves (il y a bien des parentés à trouver avec les comportements décrits dans Le barbier de Sibérie de Nikita Mikhalkov) ; mais il est vrai que je m'arrête sans doute à l'écume des choses, presque à une caricature des outrances d'un pays gigantesque et glacé.

En tout cas c'est bien fait, même si la somptuosité de certains décors laisse deviner le carton-pâte et si certains paysages de neige, lors de la retraite des troupes de Napoléon sentent le studio ; en revanche les costumes sont absolument sublimes, la musique de Nino Rota entrecroise deux valses, l'une brillante, l'autre plus nostalgique,et les acteurs sont aussi excellents qu'on l'attendait d'une superproduction hollywoodienne de la grande époque.

Les scènes de masse sont portées par un souffle réel ; même si notre œil est aujourd'hui un peu déformé par la multiplication numérique des figurants et si on peut couvrir les plaines de combattants jusqu'à donner la nausée, les batailles (Austerlitz ou Borodino) sont spectaculaires et la déroute (notamment le passage de la Bérésina) glaçante. On n'a pas mégoté sur les moyens et c'est très bien ainsi.