René Vautier est un cinéaste militant de pure souche et ce film en témoigne avec merveille. D'abord en prenant des techniciens algériens, quitte à les former, à écrire et à imaginer son film en collaboration avec eux. Mais c'est dans son propos que se voit son militantisme. Et son intelligence surtout. D'abord, René Vautier interviewe plus de deux cents appelés pour les faire témoigner sur ce qu'ils ont vécus. Et c'est sur ces propos qu'il écrit son film. Aucune scène n'a été inventée.

Pourtant le scénario n'est pas une accumulation de scènes posées comme ci, comme ça. Le scénario est au contraire d'une grande force et d'une belle complexité, recourant notamment aux flashes-back. Il réussit surtout la prouesse, rare pour l'époque, de ne pas tomber dans le manichéisme. L'idée géniale est de montrer les actions d'un groupe de militaires qui au fond sont antimilitaristes, qui au fond n'auraient jamais pensé pouvoir tirer sur l'ennemi de qui pourtant ils partagent la cause.

Du coup, le film dépasse l'anecdote pour toucher le général, l'universel : comment l'armée – et, derrière elle, la Société – peut transformer un simple homme en machine de guerre. Kubrick sur le même thème a fait Full Metal Jacket.

La mise en scène est elle aussi remarquable. Elle penche vers le documentaire, utlisant essentiellement des plans longs et larges, recourant à quelques coups de zooms ou des caméras tremblantes. Le style documentaire se sent aussi dans l'improvisation des comédiens.

Autre curiosité du film : son casting. On retrouve notamment un Philippe Leotard très jeune et méconnaissable par rapport à ce qu'il était devenu. On a également un jeune comédien à l'avenir de cinéaste : Alexandre Arcady.

Ce film est un choc, un des plus beaux sur le conflit algérien.

Je viens de voir ce film au cinéma, dommage, le son était de mauvaise qualité et les spectateurs ne pouvaient comprendre qu'un mot sur deux (problème de réglage? qualité de la copie? salle qui n'était pas une salle de cinéma à la base?…Mystère),en tout cas le film est excellent et j'aimerais retrouver les morceaux de musique interprétés (eux, par contre, étaient parfaitement audibles), morceaux restant dans la tête, lontemps après le visionnage ("Quand on est Breton, c'est normal d' Avoir vingt ans dans les Aurès", "fout pas ton pied dans cette merde, c'est une vrai histoire de fous…Pas ton pied dans cette merde, t'en aura jusqu'au cou" dommage, je ne me souviens que du refrain). Quand à René Vautier, présent lors de la projection, il en a profité pour nous raconter quelques petites anecdotes concernant les divers traquas qu'il a pu rencontrer, lui et sa caméra, en Algérie.

Et oui, c'est le festival Travelling Alger qui touche à sa fin dans cette bonne vieille ville de Rennes, hélas pour moi j'ai raté le visionnage de films tels que Pépé le Moko de Duvivier et Le petit soldat de Godard, et bien d'autres encore, tant pis pour moi…

Mon cher Dumbledore, je trouve un peu hasardeux de comparer les appelés de Avoir vingt ans dans les Aurès, braves garçons venus de partout sans avoir rien demandé à quiconque (ah ! voilà une belle conquête de la Révolution française : la conscription !!!) et les engagés de Full metal jacket qui sont entrés volontairement dans le prestigieux corps des Marines.

Personne, en France, ne vous oblige de signer à la Légion étrangère, mais si vous le faites, il serait malvenu de jouer les chochottes.

D'accord pour la nuance… mais la comparaison des deux films visaient plutôt la déshumanisation et la transformation en "machine de guerre".