Yuki fujin ezu (Le destin de madame Yuki) est réalisé par Kenji Mizoguchi en 1950, sur un scénario de Yoshikata Yoda et Kazuro Funabashi adaptant l'oeuvre d'un écrivain japonais réputé, Funabashi Seiichi. Le chef opérateur Joji Ohara a travaillé sur près de 130 films entre 1927 et 1968, notamment pour le cinéaste Heinosuke Gosho. Yuki fujin ezu est un mélodrame contemporain centré sur les difficultés affectives d'une jeune femme mariée à un homme violent et sans scrupules. Les sentiments de cette femme sont orientés vers un homme lui correspondant mieux en terme de rationalité et de comportement. Le sujet est traité avec pudeur et douceur, les actes de violence étant suggérés par des images et des paroles. Excellent choix de casting pour Michiyo Kogure (1918-1990), actrice très à l'aise pour décliner sobrement un panel d'humeurs sombres, employée à plusieurs reprises par Mizoguchi (Les musiciens de Gion, Le héros sacrilège,…) et par Ozu (Le gout du riz au thé vert).

Yuki fujin ezu frappe par sa beauté visuelle, ses plans soigneusement composés (lumière et angles de vue, façon estampe japonaise), parfaitement intégrés dans la dramaturgie. Les plans diurnes et nocturnes situés en bord de mer, de toute beauté, magnifient les sentiments contrariés de l'héroïne. Le rythme lent, la tonalité douce du récit évoquent le style employé par John M. Stahl en 1945 dans Leave Her to Heaven. On pense aussi à Le jardin des Finzi-Contini de Vittorio de Sica ou à Carrie de William Wyler : les ingrédients du drame psychologique, et le thème de l'amour impossible, sont communs à tous les continents ! Un bémol possible : la ravissante Yoshiko Kuga qui introduit Yuki fujin ezu aurait pu être mieux employée dans les épisodes qui suivent. Comme Flamme de mon amour (1949), Le destin de madame Yuki est un excellent film, situé chronologiquement juste avant la série des onze chefs d'oeuvre consécutifs réalisés par le génial Mizoguchi, jusqu'à sa mort en 1956.

Yuki fujin ezu (The Fate of Madame Yuki) was directed by Kenji Mizoguchi in 1950, based on a screenplay by Yoshikata Yoda and Kazuro Funabashi adapting the work of renowned Japanese writer Funabashi Seiichi. Chief operator Joji Ohara worked on nearly 130 films between 1927 and 1968, including for filmmaker Heinosuke Gosho. Yuki fujin ezu is a contemporary melodrama centered on the emotional difficulties of a young woman married to a violent and unscrupulous man. This woman's feelings are directed towards a man who corresponds better to her in terms of rationality and behaviour. The subject is treated with modesty and gentleness, the acts of violence being suggested by images and words. Excellent casting choice for Michiyo Kogure (1918-1990), actress very comfortable to soberly decline a panel of dark moods, used several times by Mizoguchi (The Musicians of Gion, The Sacrilege Hero,…) and by Ozu (The Taste of Rice with Green Tea).

Yuki fujin ezu strikes with its visual beauty, its carefully composed shots (light and angles of view, Japanese print style), perfectly integrated into the dramaturgy. The beautiful daytime and nocturnal plans on the seafront magnify the thwarted feelings of the heroine. The slow pace and soft tone of the story evoke the style used by John M. Stahl in 1945 in Leave Her to Heaven. We also think of Vittorio de Sica's The Finzi-Contini Garden or William Wyler's Carrie: the ingredients of psychological drama, and the theme of impossible love, are common to all continents! A possible downside: the ravishing Yoshiko Kuga who introduces Yuki fujin ezu could have been better used in the following episodes. Like Flame of My Love (1949), Madame Yuki's Fate is an excellent film, set chronologically just before the series of eleven consecutive masterpieces directed by the brilliant Mizoguchi, until his death in 1956.