Marie-Octobre, moi, c'est trente fois que je l'ai visionné ; les premières fois j'avais été soulevé par cette vague, à présent, je me laisse bercer par elle. Certes les personnages sont un rien stéréotypés mais quel allant, quelle verve, quel cinglant… pas de temps mort, rien n'est inutile… Blier domine à mon sens mais tous sont remarquables, Reggiani le tout premier. Darrieux aussi, quelle classe; on ne l'aime pas, on l'admire. J'essaie parfois d'imaginer une refection de cette perle de film avec nos actuels comédiens. Oh, nous trouverions les neuf et ils auraient du mérite. Mais je ne crois pas qu'une telle démarche soit utile, le film échouerait aujourd'hui, son sujet ne brûle plus personne, les gens se fichent bien à présent des histoires de Résistance.
Je ne lèverai pas le voile, je ne dirai pas ici quel est le coupable même si, comme toujours en pareil cas, c'est moins le dénouement qui importe que l'impeccable déroulé.
Ceci dit, les ultimes films de Duvivier, pour ratés qu'ils soient doivent être découverts !
Ni chef-d’œuvre, ni film raté. Le scénario a du mal à convaincre, les dialogues sont guindés, et le tout possède un parfum de grandiloquence. Restent des numéros d'acteur (sorte de best of des années cinquante), un travail réussi sur l'agencement des personnages au sein du cadre, et également sur l'éclairage.
Je viens de revoir pour la…je ne sais plus combien de fois, ce chef-d’œuvre d'entre les chefs-d’œuvre. On dit que Les Miracles n'ont lieu qu'une fois, c'est faux ! Cette palanquée de talents, le savoir faire lumineux de Duvivier
et ce scénario tiré au cordeau me remplissent encore d'un ravissement, d'une félicité sans pareille. Je crois qu'aucun film ne m'a rendu plus résistant que celui-là. Et plus enviable du sort de ce pauvre Castille, aimé en cette période si trouble par la belle Darrieux
/Marie-Octobre.
Impeccable de retenue, de pudeur, et de ténacité. Ah ! Dieu que la guerre était jolie
semblent nous dire tous ces modestes héros redevenus français lambda après avoir laissé tomber leurs pantoufles, les belles filles et leurs cigares pour l'honneur comme le souligne Daniel Ivernel.
Puisque, entre guillemets, ils nous laissent entendre que c'était un peu un jeu. Et aucun d'entre eux, hormis bien sûr leur chef tombé au champ d'honneur, aucun n'en a gardé quelconque séquelle. La vie a repris son cours après une parenthèse dont il fallait bien s'occuper…
Ce huis-clos magistral, ces déplacements au millimètre, ces acteurs fabuleux, maitrisant leur art au plus juste, dieux de la comédie, se réjouissent et se soupçonnent avec un art tellement consommé que mille revisions de cette œuvre ne viendront jamais à bout de notre admiration ! Ils se dépassent tous, les uns après les autres, se rendant mutuellement ingéniosité de jeu et virtuosité ! Tout le long du film, un mot règne en maitre : L'élégance. Élégance des protagonistes, élégance des propos, un peu pompeux c'est vrai Vincentp, mais la situation, la qualité des personnages le veut, élégance de la demeure même…Et même l'élégance de la répartition des rôles de la part de Duvivier. Ils sont tous traités de la même façon : tant dans l'intensité des rôles que dans la durée de leur prestation. Et à propos de prestation, je me rends compte encore une fois aujourd'hui que, quand je vois Blier
jouer ce rôle de procureur tellement absorbé, tendu, et surtout si crédible, on peut tous mesurer l'étendue du talent de ce Monsieur en pensant que la même année il était bistrot dans Archimède, le clochard
… Souvenez vous : Le Tapanel supérieur, Bec en Zinc, Mort aux cocus…Monsieur
Blier
! Et tous, tous sans exception, sont magnifiques !
Je pense qu'il est impératif que ce genre de film, lui et tant d'autres, ressorte en salle. Que les médias de tout poil le signalent à profusion, comme ils ont l'habitude de le faire pour des daubes immondes. Il faut, à toutes forces, attiser la curiosité des plus jeunes ! faire en sorte que le témoin soit transmis d'une génération à l'autre. Et qui sait ? Peut-être que des films de cet acabit ne sombreront pas dans l'oubli et pourquoi pas, (soyons optimistes !) redonneront aux jeunes le goût du vrai, du merveilleux cinéma… Car ce n'est même plus du cinéma, c'est une corne d'abondance de bonheur ! Rien ne cloche ! Ou plutôt si : une heure trente, c'est peu. Beaucoup trop peu pour du bonheur.
Qu'est-ce qui reste ? D'abord, vous me direz que tout ça, ce n'est déjà pas mal, pas mal du tout et que si un film destiné au grand public regroupait tant de qualités en notre médiocre aujourd'hui, il arriverait comme une bénédiction.
Certes. Mais je m'adresse à ceux qui, comme moi, ont vu et revu le film, en connaissent toutes les ramifications, en admirent l'art consommé de mettre au premier plan, successivement, tous les protagonistes, sans en négliger un seul, les caractérisant par un mot, un geste, une attitude alors qu'il est déjà si compliqué de faire exister sur une scène plus de trois personnages, ceux qui savent comment ça va se terminer (et s'en fichent d'ailleurs un peu, parce que c'est sans doute le moment le plus faible).Eh bien ce qui reste, c'est la conviction que le grand Julien Duvivier, en filmant son dernier grand film (ne méprisons pas toutefois au moins deux des œuvres postérieures, La chambre ardente
et Chair de poule)
achève sa carrière sur les mêmes notes d'amertume que celles qu'il a déployées tout au long de sa carrière. Parce que, finalement, Marie-Octobre,
c'est aussi le récit de l'éclatement des vies exaltantes connues au moment d'un combat commun, vies qui se sont recroquevillées, embourgeoisées ou desséchées avec les jours.
Toujours est-il que, comme pour un nombre considérable de films de Duvivier (de La bandera
à L'affaire Maurizius
en passant par Pépé le Moko,
La belle équipe,
Carnet de bal,
Panique,
Voici le temps des assassins
et je ne cite pas tout), ça se termine mal, sur le désastre, le goût amer dans la bouche, les vies abimées. Et je gage volontiers que les membres du réseau Vaillance ne se sont jamais revus après le coup de téléphone de Marie-Octobre à la gendarmerie.
Et je gage volontiers que les membres du réseau Vaillance ne se sont jamais revus après le coup de téléphone de Marie-Octobre à la gendarmerie. Pour moi, c'est certain ! Mais ils ont du quand même être appelés à témoigner pour éclaircir les circonstances de la mort de Reggiani.
homosexuel furtif, Paul Meurisse ? Qu'est ce qui vous fait dire ça ? Son allure , sa prestance un peu guindée ? Ca ne m'est pas venu une seule seconde à l'esprit… En tous cas, mon avis est que ce film ne souffre d'aucun défaut !
L'idée m'est venue – peut-être un peu alambiquée, mais on a tellement envie de se raconter des histoires sur tous les personnages de Marie-Octobre – l'idée m'est venue que ce grand bourgeois, qui vit avec sa vieille gouvernante dans une maison raffinée et qui dit son bonheur de voir Danielle Darrieux
tous les jours, ne montrait pas une facette importante de sa personnalité. Ceci n'est naturellement étayé sur rien ; c'est seulement une rêverie que j'ai faite, mais qui ne me paraît pas du tout invraisemblable. Le milieu de la couture, vous le savez, est assez naturellement porté de ce côté-là. Il l'est aujourd'hui, il l'était jadis et naguère (voyez Jean Servais
dans Rue de l'Estrapade
de Jacques Becker).
Est-ce qu'une seule seconde, dans Marie-Octobre, Paul Meurisse
évoque sa vie privée ? Non ? Toutes les pistes sont donc ouvertes…
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