Revu dix ans après via le blu-ray édité par Carlotta, avec un avis revu à la hausse. Les garçons de Feng-Kwei est réalisé par Hou Hsiao-Hsien en 1983 et constitue de son point de vue son premier film personnel, après trois long-métrages coulés le moule du cinéma taïwanais de l'époque. L'écriture cinématographique est très élaborée tant sur le plan visuel que sonore (parfois trois éléments sonores superposés l'un sur l'autre) et porte le sujet : l'histoire d'une bande d'adolescents asiatiques. Émerge progressivement du groupe de jeunes ordinaires une personnalité et une conscience. Cet aspect est particulièrement bien évoqué par le cinéaste, qui se réfère à propre vécu. Mais sont abordés de façon sublime également les rapports entre la nature et la culture, le temps et l'espace. Un cinéma d'auteur de très grande qualité, peut-être le meilleur cinéma de ce type venu d'Asie depuis trente ans.

Quelques moments de la vie ordinaire de plusieurs jeunes gens au début des années quatre-vingt à Taïwan, qui par le truchement de Hou Hsiao-Hsien, dont c'est le premier long-métrage, accèdent à une dimension universelle et intemporelle. Le récit (en partie autobiographique) est construit très sobrement, sans esbroufe, par une succession de plans fixes (qui ressemblent à de véritables tableaux de peinture en mouvement tellement ils sont soignés), utilise quelques notes de musique classique, quelques flash-backs, pour donner une dimension tragique à des faits ordinaires. Ainsi le combat naïf de chambara, vu par les jeunes personnages dans son contexte d'époque, mais par les spectateurs que nous sommes au son de JS Bach.

La magie du cinéma opère (quel talent incroyable chez ce cinéaste) et transforme le moment présent vécu par ces personnages dont nous partageons pendant quelques instants l'existence, en une œuvre d'art merveilleuse, émouvante et encore frappante, plus de vingt-cinq ans après sa réalisation.

Nb : chers éditeurs, il faut absolument rééditer ce merveilleux triptyque de début de carrière de Hou Hsiao Hsien.