Revu sur grand écran, copie numérique restaurée, dix ans après avoir découvert le film en dvd. Les conditions de projection mettent en valeur les qualités formelles de Lien Lien Fong Tch'en (Poussières dans le vent -1987-) : plans soigneusement composés, beauté des images, soin apporté à la lumière… La forme sert le fond, un portrait de deux jeunes gens dans le Taïwan rural et citadin de 1965. La fille est tournée vers une modernité influencée par l’occident, le garçon a du mal à couper avec ses racines familiales et la culture chinoise millénaire. L’analyse filmée diffusée après le film (c’est aussi un bonus du dvd publié par Carlotta) montre que les regards divergents de ces personnages dans le train représentent leur état mental, ceci dès les premiers plans. Mais l’histoire de ces personnages est aussi l’histoire universelle de jeunes adultes contraints de quitter leur campagne et ses limites tout azimut, pour accéder à l’instruction, à la réussite matérielle et sociale.
Peu d’effusions de sentiments dans Poussières dans le vent, les émotions sont exprimées avec retenue, loin de certains canons du cinéma contemporain. Hsiao-hsien Hou place souvent ses personnages au second plan, à distance respectable de la caméra, le premier plan étant occupé par des arbres (dans la campagne) ou des machines (en ville). Le son est celui produit par les dialogues des personnages, et les éléments situés autour d’eux (train,…). Le cinéma de Hsiao-hsien Hou baigne dans un climat hypnotique, s’appuyant sur la composante musicale (des notes de musique d’instruments à corde chapitrent le récit). Avec beaucoup de retenue, avec un dispositif filmique élaboré mais aussi invisible, le cinéaste produit un cinéma puissant, poussant à réfléchir, producteur d’émotions de spectateurs. Comme toujours, avec ce type de cinéma d’auteur éclairé, la clé pour le spectateur est sa capacité à intégrer une écriture cinématographique relativement atypique.
Film d'atmosphère, d'auteur, déroulé de façon très originale, avec en filigrane une société taïwannaise en évolution : la vie à la campagne (berceau des traditions) appartient au passé, et le présent, comme dans d'autres pays industrialisés, est celui d'une urbanisation galopante. L'histoire d'amour entre les deux adolescents est filmée de façon pudique (aucune embrassade : on est ici loin des effusions démonstratives des films américains). Des personnages apparaissent et disparaissent avec parfois peu d'explications à leur sujet. Le mystère de la vie, de son déroulement hasardeux, de ses rencontres fortuites, si brillamment mis en images par un cinéaste très talentueux.
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