C'est tout ? Oui, c'est tout et c'est très fort, très beau, ça fait appel à des sentiments qu'on apprécie de voir à l'écran : l'amour gai de Tania et d'Andreï, la foi dans la mission, l'héroïsme, le dévouement. Ce n'est plus trop à la mode, un film aussi noble.
Après Quand passent les cigognes (1957), avant Soy Cuba (1964), le réalisateur Mikhail Kalatozov et son chef opérateur Sergei Urusevsky tournent La lettre inachevée (1959), adaptée d'une nouvelle de Valeri Ossipov. Trois géologues et leur guide sont confrontés à la Taïga, à ses ressources et ses dangers. Récit halluciné, mise en scène fiévreuse, plans-séquence virevoltant au milieu de la nature dans d'imposants décors naturels, images et éclairages sophistiqués -et souvent impressionnants-, constituent les moteurs de forme de cette histoire. Le fond est un hymne à la gloire de la mère-patrie soviétique, présentée comme l'émanation et l'incarnation des éléments naturels (terre, eau, feu, air) par la civilisation humaine. Kalatozov filme la forêt, le fleuve, comme des êtres puissants que les hommes du système soviétique peuvent et doivent dominer s'ils font preuve de force morale et physique, et acceptent le principe d'auto-sacrifice en cas de faiblesse.
Des propos philosophiques sur l'être et la nature, via des dialogues bien écrits et prononcés, placent la thématique à portée du spectateur. La beauté de Tatiana Samoilova participe à l'esthétique du film et à son équilibre général -ses trois comparses sont de sexe masculin-. Kalatozov s'appuie également sur la musique -magnifique- de Nikolai Krioukov, pour produire un film très sensoriel et exalté, dans la lignée de ce qu'a pu réaliser son aîné Eisenstein jusqu'à sa mort en 1948. Andrei Tarkovsky avec L'enfance d''Ivan (1962) s'inscrit dans la continuité du parcours de Kalatozov, lequel avec ses trois longs-métrage opère un relais entre les deux maîtres du cinéma russe. Certains pourront éventuellement chipoter au sujet de la trame dramatique de Neotpravlennoye pismo. L'impression générale du cinéphile sera sans doute favorable car cette oeuvre est extrêmement originale, et globalement brillante. Recommandée à ceux qui apprécient le cinéma russe de répertoire.
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