Un immigré suédois, avec des talents d'artiste (chant, composition d'alexandrins), prend à pieds en 1905 la route de la Californie, et rejoint un mouvement syndical ouvrier radicalisé. Tout l'intérêt de Joe Hill (1971) réalisé par Bo Widerberg réside dans l'originalité du traitement du sujet, et la qualité de son écriture cinématographique. Une nature ensoleillée, belle et douce, mais restant à domestiquer, est le terrain de luttes sociales sans merci, la faute revenant à l'élite sociale qui impose des lois oppressantes (absence de sécurité dans les mines, horaires à rallonge sans contrepartie véritable), ceci à des fins matérielles et de pouvoir. Des ellipses temporelles parsèment le récit, des personnages apparaissent ou disparaissent à contre-courant de la logique de celui-ci. Des éléments graves se greffent à des aspects drôles, dans un style souvent présent dans le cinéma scandinave.

Les femmes comme dans Delivrance (1972) ou Southern Comfort (1981) sont peu présentes, mais possèdent un certain poids, incarnant la beauté (l'italienne), la conscience (la nantie qui se fait voler sa fourrure), la sagesse (la fermière), la douceur (les danseuses), le pragmatisme (la militante). Les hommes s'écharpent, pestent, rudoient, jettent des seaux d'excréments, sont affublés de nombreuses tares (alcoolisme, violence, avidité sans limites). Joe Hill comporte en filigrane une vision féministe de la société : la présence plus forte des femmes dans les institutions permettrait une bien meilleure régulation de celle-ci. Qualité de la mise en scène (plans) et de la photographie (lumière) mise en évidence par la copie restaurée, Influence forte à mon sens de Bo Widerberg au sein du cinéma scandinave contemporain à visée sociale (exemple; Drunk du danois Thomas Vinterberg).