La servante réalisé par Kim Ki-young en 1960 est le film coréen le plus réputé du XX° siècle. Sa réputation n'est pas usurpée. Il a fait l'objet d'une restauration dans les règles de l'art en 2008 avec l'aide de la fondation Scorsese et de plusieurs fonds qataris (c'est plus intelligent que de distribuer des valises de billets à Bruxelles !). Comme on peut s'en douter, cette oeuvre, qui semble surgie de nulle part (le cinéma coréen des années 1960 est spartiate à la fois en qualité et en quantité) est un poids lourd cinéphilique. Rythme rapide, dimension musicale permanente (le personnage principal est professeur de piano), sensualité, âpreté, sécheresse de ton mais des torrents d'émotions…

Forte créativité d'ensemble, sur chaque plan, noir et blanc somptueux… La servante possède les attributs du cinéma de la modernité de 1960. On pense à Lola (1961) de Jacques Demy. Le film est brillant, magistral dans son déroulé et son interprétation, posant le problème de la survivance d'un couple sur le temps. Une femme mariée, âgée de trente ans, et qui élève des enfants, perd inexorablement de son attractivité par rapport à des jeunes femmes de vingt ans, boostées par leurs hormones, leur volonté de s'établir, et leurs atours naturels. L'homme résiste un moment, avec les moyens du bord, puis se retrouve submergé comme un château de sable par la marée montante…