Érotomane sans mesure, collectionneur compulsif des pires bouquins et photos pornographiques, client assidu des bordels et abonnés aux plus rayonnantes partouzes, membre éminent de la secte immonde scatophile des
crouteux,
Michel Simon
n'en n’est pas moins un des plus grands acteurs français.
La chienne
L'Atalante,
Les disparus de Saint Agil,
Le quai des brumes,
Fric-frac,
La fin du jour,
Circonstances atténuantes,
La Poison,
Panique,
La vie d'un honnête homme
et même un rôle mineur dans
Austerlitz
… Et tant d'autres que, pour ne pas grossir le propos, on ne cite pas. Une gueule, une attitude, une tenue, une voix, une présence.
En d'autres termes, un film où il pose en premier plan mérite, il me semble, toujours de l'attention, même s'il est tardif, un peu éloigné de la grande période des années Trente et Quarante. Ajoutons à la présence de la légende
Michel Simon
les talents débutants de
Claude Brasseur
et de
Jean-Pierre Marielle
et la jolie frimousse de
Dany Saval
qui est bien agréable à regarder, mais qui a bien mieux fait, artistiquement parlant, de se marier avec
Michel Drucker que de poursuivre à montrer sa ravissante et stupide insignifiance au cinéma.
Revenons aux faits. Tony
le baratineur (
Brasseur)

sort, punition accomplie, de la prison de la Santé ; il est immédiatement recueilli par son vieil ami Pierrot
La tendresse (
Simon)

, désormais
première gâchette au service de l'important gangster Maternati. La mission de Pierrot est d'arracher au Baratineur le secret de la cachette où il a dissimulé un important magot, convoité par Maternati. Pour cela, il va employer les charmes de sa pupille
Marie la crêpe (
Dany Saval)

, fleur de trottoir ainsi surnommée parce qu'elle trouve toujours que c'est le dernier qui a parlé qui a raison et qu'on la retourne ainsi avec grande facilité.
S'ensuivent des péripéties à la fois niaises et compliquées où tous les protagonistes ne cessent de creuser sous les pas de leurs concurrents des chausse-trapes grossières. Je crois devoir renoncer à les exposer, d'abord parce que, vingt-quatre heures après avoir regardé le film, je les ai déjà oubliées, puis parce qu'elles n'ont pas beaucoup d'importance et ne font pas peser la moindre inquiétude sur le sort évident qui attend
Le Baratineur et
La crêpe voués d'évidence à vivre heureux et peut-être même à faire de beaux enfants.
Il faut toutefois signaler l'omniprésence des chansons de Guy Béart
qui sont diffusées à tous propos et à n'importe quel rythme (y compris valse ou cha-cha-cha) au long des séquences. Béart
était à ce moment là presque au sommet de sa notoriété et son talent n'avait pas peu contribué au succès de L'eau vive,
précédent film de François Villiers,
illustration assez réussie d'un texte de Jean Giono.
Dans Pierrot la tendresse
en sus de la chanson-titre, il y a les deux charmantes mélodies Le printemps sans amour et Le matin je m’éveille en chantant. Jolies bluettes harmonieuses que tout le monde fredonnait sous la douche ou dans la rue. Rien à voir avec l'abominable rap, si peu civilisé. Gilles Grangier
Et puis le charme assez troublant de
Marie Daems, qui aurait pu réaliser une meilleure carrière, après
Au p'tit zouave
de
Gilles Grangier
(1950),
L'air de Paris
de
Marcel Carné
(1954), l'excellent
Charmants garçons
de
Henri Decoin
(1957)… Après son divorce avec
François Périer,

plus grand chose…
On a tort de ne pas se les rappeler, tous ces gens.