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Qui s'en souviendra ?


De Impétueux, le 19 août à 16:34
Note du film : 1/6

Je me suis rendu compte qu'il existe très peu de films sur la vie quotidienne en Algérie, lorsqu'elle était à la fois française et paisible (ou à peu près, avant novembre 1954, en tout cas). Je ne parle évidemment pas de tous ceux dont le sujet principal est le conflit et qui relatent la guerre sous l'une ou l'autre de ses facettes. L’honneur d’un capitaine de Pierre Schœndœrffer (1982), Avoir vingt ans dans les Aurès de René Vautier (1972), R.A.S. d’Yves Boisset (1973) racontent les combats, La bataille d’Alger de Gillo Pontecorvo (1966) la terreur urbaine, Le combat dans l’île (1961) et L’insoumis (1964), l’un et l’autre d’Alain Cavalier les impasses de l’OAS. Et aussi Le coup de sirocco d’Alexandre Arcady (1979) sur le rugueux retour en métropole des rapatriés. Plus ou moins consciemment, j’en oublie beaucoup.

Mais rien ou très peu sur la vie de tous les jours. Il est possible qu'il y ait à voir dans Les folles années du twist de Mahmoud Zemmour, tourné en 1986, mais se passe en 1960 ou dans Un balcon sur la mer de Nicole Garcia (2010). Mais pour demeurer absolument dans ma recherche; je ne vois guère que Les oliviers de la justice de James Blue (1963), film grave qui retrace la vie paisible mais très laborieuse des colons et des indigènes dans la grande plaine fertile de la Mitidja.

La famille Hernandez, c'est tout à fait autre chose : ça recrée, ou tente de recréer la vie de tous les jours de quelques habitants de Bab-el-Oued, qui était le principal quartier européen de la ville, quartier populaire, populeux, chaleureux, animé jusqu'à l’ivresse des mots, des gestes, des jalousies et des racontars. Un endroit où On se traite de con à peine qu'on se traite comme chante Claude Nougaro à propos de Toulouse.

En tout cas, un petit monde où on a de la verve, le sens de l’algarade et de la répartie, où les grands sentiments – l’amour ou la mort, la vertu des filles, les promesses de mariage, le patriarcat absolu – s’expriment dans l’hyperbole, la grandiloquence, l’affectation, la formule drôle, du type C’est tellement petit chez lui que quand le soleil entre, il faut qu’il sorte ! On ne reconnait pas la patte formidable de Marcel Pagnol, mais il y a néanmoins de la qualité.

Le film est une adaptation d'une pièce de théâtre de Geneviève Baïlac créée à Paris en septembre 1957 et dont certains des acteurs (Robert Castel, Lucette Sahuquet, Marthe Villalonga) ont connu ensuite une petite notoriété de niche jouant avec leurs accents et leurs manières sur la nostalgie des Pieds-Noirs rapatriés. Le succès remporté par la pièce amena la réalisation du film, en 1965. Les braises du rapatriement forcé (La valise ou le cercueil) n'étaient pas éteintes, mais la résignation avait assagi la douleur.

Pour une raison ignorée les créateurs de la pièce n'ont pas été les acteurs du film ; mais la mise en scène est totalement théâtrale : toute l'intrigue se concentre autour d'une grande place où se croisent et s'entrecroisent les protagonistes; quelques vues générales de la baie d'Alger et des monuments officiels font la liaison. Les comédiens se trouvent réunis dès que le récit en a besoin ; a-t-on besoin d'autre chose ?

Vient d'arriver à Alger, pour prendre son premier poste, le jeune instituteur, André Lagache (Frédéric De Pasquale ; fortuitement Isabelle Chardin (Nicole Mirel), assistante sociale, elle aussi métropolitaine, effectue sa première enquête. Il ne faut donc pas être très malin pour concevoir ce que sera la fin finale. Mais auparavant, le séduisant instituteur, qui bénéficie de tous les prestiges aux yeux du petit peuple du quartier, se verra contraint d'entrer dans la familiarité des habitants et notamment de la famille Her nandez. Le père (José Matinez) est une sorte de feignant professionnel, la mère se décarcasse ; les filles aînées cancanent, se disputent, se retrouvent avec les copines. L'ennui est que l'aînée, Carmen (Anne Berger) n'est pas bien jolie, ce qu'elle compense en gloriole parce qu'elle est allée jusqu'au certificat d'études. La deuxième, Rosette, ([artiste Michèle Coudray) a un soupirant, Paulo (artiste id=1191412Alain Castiglia[/artiste]) qui n'a pas plus d'emploi fixe que tout le monde… mais surtout il n'est pas question que Rosette, la cadette, soit mariée avant Carmen, l'aînée.

Plein de péripéties, de méprises, de quiproquos, de jalousies… mais plein de chaleur humaine…Tout va s'arranger à la fin .

Et pourtant, à la dernière image du film, on entend la radio : des assassinats viennent d'être commis dans la région de Batna… Le couple d'instituteurs Monnerot et un Caïd algérien… Beaucoup d'eau glacée dans ce soleil d'Algérie.


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