Si toutefois, ce que je ne pense pas, ou pense de moins en moins, l'affaire est démolissable. Comme le dit un de mes proverbes préférés, que je cite dès que je le peux (et c'est donc souvent) : La pierre tombe sur l'œuf, tant pis pour l'œuf, l'œuf tombe sur la pierre, tant pis pour l'œuf..
Le paradis n'est pas de ce monde.
Plus que jamais, le libéral que je suis se réjouit de ne pas être libériste. Écoutons plutôt le comte Sforza, fameux politicien libéral qui, s'appuyant sur les propos de son ami et penseur libéral Benedetto Croce (CF par exemple "Libérisme et libéralisme"), proclamait avec juste raison «l'absence de toute valeur de la prétendue "liberté économique" via-à-vis de la liberté tout court.» Il faut dire que Sforza et Croce s'étaient trouvés confrontés à l'idéologie de Benito Mussolini, qui proclamait en novembre 1921 : "Libéraux en matière d'économie, nous ne le serons pas en matière de politique !" Et de fait – on tend à l'oublier étant donné l'interventionnisme forcené de l'État italien à partir de 1926-27 – les deux premiers argentiers du régime, Volpi et De Stefani, étaient des "manchestériens" pur jus : deux types en réalité pas très fascistes (surtout pas De Stefani), mais qui croyaient naïvement que la "liberté économique" est censée garantir ou entraîner "automatiquement" la liberté tout court. Tt, tt, tt. À quel point ils se trompaient, je pense que les événements historiques ont en administré la preuve.
Tout ceci pour dire que j'ai été néanmoins un peu déçu par cette comédie, bien qu'elle ménage des moments décapants et réjouissants. Les deux historiettes sentimentales plombent quand même un peu le film, nous éloignent de l'histoire qui nous est racontée et lui font perdre son rythme. Une satire de cette sorte doit être menée à l'emporte-pièce – et par moments elle l'est, d'ailleurs – et ne pas se prendre les pieds dans les fleurs du tapis. Cela dit, la scène où Lanvin qui cherche une femme de ménage fait passer son test d'embauche à une jeune femme qui se croit, elle, à un rendez-vous galant est un amusant quiproquo, même s'il est hors sujet. "Pour la tenue vestimentaire, je serai intraitable !"
J'ai été heureusement surpris par Gérard Lanvin, tout à fait à sa place dans ce casting de vieux garçon renfermé (à une autre époque on aurait confié ce rôle à Charles Denner). Darroussin, amouraché d'une p'tite jeunesse, m'a fait éclater de rire dans son tee-shirt Nirvana. Et j'ai trouvé génial l'interprète du vieux monsieur Lebrun, valeureux entrepreneur qui a commencé avec un camion et fini avec 800.
Les méchants banquiers m'ont semblé assez prévisibles dans leur cuistrerie et le cynisme un peu facile de leurs échanges. En contrebas, le bon peuple est heureusement plus contrasté. Bref, c'est bien regardable mais on s'ennuie parfois du Sucre.
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