Poème inachevé s'il en est, (le film aurait dû comporter deux parties), "El Sur", construit en flash-back, nous rappelle un des thèmes chers à son réalisateur: le drame de l'enfance. Ici, en fait, le sujet traite des relations difficiles d'une jeune enfant avec son père. A travers des scènes picturales rappelant des tableaux de Vermeer, Caravage, et Antonio López, le réalisateur fait évoluer sa jeune héroïne dans une quête initiatique qui a débuté dès son plus jeune âge, lorsqu'elle secondait son père sourcier. La magie, l'imagination, les rêves de l'enfance déforment la réalité jusqu'à ce que celle-ci rattrape Estrella quand elle découvre une enveloppe appartenant à son père. Celle-ci contient le nom d'une femme inconnue.

Cette femme se révèle être, en fait, actrice de cinéma, ce même art de la magie, de l'imagination et des rêves, dans lequel Erice a véritablement foi. Preuve en est, cet immense film espagnol inspiré par le récit d'Adelaïda García Morales. Ce titre évoque "l’aboutissement" de la quête d'Estrella dont les rêves se sont dissipés avec le temps. "El Sur' est la destination inconnue, peut-être mythique pour la jeune fille alors âgée de seize ans.

Le spectateur que je suis aurait bien voulu la suivre dans cette quête, rattraper le temps perdu, se remémorer l'amour que nous portons aux êtres qui nous sont les plus chers (l'on croit tant les connaitre, ou les avoir connus), se remémorer aussi l'amour qu'ils nous ont porté.

Le temps, lui s'est écoulé depuis la sortie du film en 1983, et les formats de projection ont évolué. Cela permettrait de (re)découvrir cette œuvre tournée en 35mm qui mériterait un plus vrai intérêt des distributeurs, en France. Je tiens "El Sur" pour une perle rare, très rare…

Reste une ressortie du film en Blu-Ray en Espagne, et prochainement (fin du mois), dans ce même format, en Angleterre. Puissent les éditeurs de Vidéos nous proposer une version sous-titrée en français. Ce film le mérite amplement.