Avec Carlo Lizzani, je ne sais jamais à quoi m\'attendre. Lizzani n\'est sans doute pas un \"grand metteur en scène\" comme les Rossellini ou De Santis avec lesquels il a travaillé au début de sa carrière. Il a au moins un \"projet\" artistique évident – relié à son propre passé de Résistant et son après-guerre néoréaliste – mais aussi de bien étranges à-côtés. Il a fait des westerns (deux), des gialli (plusieurs, dont le renommé Lutring, réveille-toi et tue avec Volontè) s\'est essayé à la comédie à l\'italienne (La Vita agra), a tourné un film avec Terence Hill, a été documentariste (La Muraille de Chine)… Curieux oiseau, au talent très inégal mais éclectique. Il a signé de drôles de machins de série B voire C à peine regardables, pourtant quand il est inspiré ses films sont d\'une vigueur étonnante : c\'était le cas par exemple pour l\'excellent Fontamara, premier film de lui que j\'ai vu (heureusement, j\'étais bien tombé).

En tout cas, cette Amante di Gramigna m\'a tout l\'air d\'un Lizzani du dessus du panier : Gian Maria Volontè et Stefania Sandrelli ne sont pas des deux de pique; à la base il y un célèbre roman de Giovanni Verga, adapté pour l\'écran par le solide Ugo Pirro. C\'est une production du riche capitaliste Dino De Laurentiis en collaboration avec le riant État Bulgare. (\'\'Ah, où êtes-vous, montages financiers d\'antan ?\'\') Et puis c\'est un film historique, domaine où le réalisateur a déjà prouvé sa valeur, sauf que cette fois ça ne se passe pas pendant la Seconde Guerre mondiale mais dans l\'après-Risorgimento, vers 1865, en Sicile. Et c\'est une histoire de brigands, ce que j\'appelle un \'\'southern\'\' (ben quoi, il y a bien les \'\'westerns\'\'). Le classique de Verga est un roman d\'aventures foisonnant, mélodramatique, érotique, truculent. Je me demande ce que ça va donner au cinéma.

Bref, je veux voir ça. Évidemment, mon vote a toutes les chances d\'être un coup d\'épée dans l\'eau, puisque L'Amante di Gramigna a toujours été inédit en France.