Le site Carlottafilms présente Fleur pâle (1964), réalisé par Masahiro Shinoda avec des arguments qui lui sont propres (*), et que je ne partage pas, bien que la qualité de l'oeuvre ne suscite guère de débat. Shinoda est connu en France de très peu de monde, sa réputation n'atteint pas celle des grands maitres du cinéma japonais. Il semble que les choses soient différentes au Japon, et que ce cinéaste aujourd'hui âgé de 92 ans, soit considéré comme l'égal des plus grands cinéastes. Trois de ses films ont néanmoins été présentés en compétition à Cannes : Silence en 1972, Himiko en 1974, et Sharaku en 1995. Shinoda a débuté sa carrière comme assistant de Ozu (Crépuscule à Tokyo, 1957), a réalisé 33 films en 43 ans, et est marié à l'actrice Shima Iwashita (la filmographie de cette actrice sur notre site comprend 122 fiches). Shinoda est considéré comme l'un des cinéastes phares de la nouvelle vague japonaise aux côtés notamment de Nagisa Oshima,

Fleur pâle s'inscrit dans les codes contestataires de son époque, Shinoda ne se retrouvant pas dans le cinéma de Ozu, et globalement de ses confrères, leur reprochant une certaine "apathie" de ton, dans un Japon alors sous domination politique des Etats-Unis. Fleur pâle décrit un univers interlope, celui des maisons de jeux de Tokyo, sous la coupe des gangs rivaux de yakusas et la bienveillance tacite de la police. Des personnages énigmatiques, aux motivations et à l'identité incertaines se croisent, pactisent ou s'entretuent, sur fond de drogue et d'argent. Ryo Ikebe, le Alain Delon local, compose un lieutenant de gang, évoluant dans cet univers essentiellement nocturne, déroulant des codes de bonne conduite mais sans guère maitriser les événements. La forme de Fleur pâle est magistrale, usant de techniques cinématographiques que l'on ne dévoilera pas. Logique influence de cette oeuvre sur d'autres cinéastes, comme Michael Mann (Le solitaire -1981-).

(*) https://carlottafilms.com/films/fleur-pa(..)