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Critique


De Gaulhenrix, le 24 septembre 2007 à 14:38
Note du film : 4/6

C'est, en effet, "un bon Barbet Shroeder"…

Dans une lumière de fin de jour, un long travelling avant survole une côte sauvage, déchiquetée ; puis s'approche d'une maison isolée à la pointe d'un cap ; s'introduit, par un carreau cassée, dans une pièce inhabitée où deux adolescents échangent des propos mystérieux. La séquence suivante nous montre la même maison vue de l'extérieur : un coup de feu claque dans la nuit.

Cette ouverture montre assez la tonalité du film (mystère et inquiétude), dont la scène initiale pose les enjeux. Cette relation entre deux lycéens très différents, sortes de Rimbaud/Verlaine mâtinés de Raskolnikov et fascinés par l'acte gratuit, est la clé de voûte du film qui n'existe et ne progresse que par les désirs des personnages. Le décor de la séquence d'ouverture (rochers inhospitaliers et maison "gothique"), au-dessus duquel plane le regard-caméra, symbolise parfaitement le mal-être des deux personnages incarnés par deux comédiens remarquables (Ryan Gosling et Michael Pitt). Une enquêtrice (Sandra Bullock), chargée d'élucider un meurtre, se débat, quant à elle, avec des souvenirs qui la hantent, qu'elle ne peut effacer de son esprit et qui perturbent ses relations avec les hommes.

Tout le talent de Barbet Shroeder est de ménager le suspens et de dérouler le fil de son histoire tout en l'éclairant à l'aide d'un double retour en arrière systématique : l'un qui concerne les deux adolescents liés par une relation trouble et qui vise à préciser leur personnalité ; l'autre qui révèle les cauchemars récurrents de la jeune femme. Les deux récits vont finir par se croiser… On peut évoquer Hitchcock : un thriller qui est prétexte à étudier l'âme humaine et les ressorts de nos actes ; une atmosphère pesante et tendue ; une réalisation qui multiplie les pistes d'explication mais les brouille ; une fin qui éclaire le début mais se révèle à double effet, etc.

Un bon film bien maîtrisé et à l'atmosphère prenante.


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De dumbledore, le 18 juillet 2002 à 00:00

Sur le papier, le film paraissait un peu convenu : deux étudiants décident de rompre avec leur ennui en commettant le crime parfait afin de défier le FBI et de prouver leur supériorité. Sur le même canevas, on avait déjà vu le maître Hitchcock s'y coller et nous offrir La Corde. On pouvait donc s'attendre au pire avec cet air de plagiat.

Seulement, ce n'est pas un tâcheron d'Hollywood qui réalise Calculs meurtriers, mais Barbet Schroeder qui se trouve derrière la caméra, et avec lui on peut s'attendre à tout (Rien que d'essayer d'alterner des gros films hollywoodiens avec des petits films intimistes – son dernier film, La Vierge des tueurs, était en DV, tourné en espagnol avec des comédiens inconnus – prouve son souci de ne pas « s'installer » à Hollywood).

Avec ce film, c'est du bon Schroeder que l'on a. Il nous offre d'abord une histoire bien menée, bien réalisée, sans temps mort ni ennui, avec une évolution de l'histoire intéressante même si elle est un peu convenue et attendue.

Mais c'est surtout au niveaux des personnages et des thèmes abordés que Schroeder réussit à transcender ce film de genre en un film intéressant et personnel. Il y a d'abord le personnage incarné par Sandra Bullock. Classiquement, elle a un « complexe intérieur » qu'elle devra assumer et dépasser car, de bien entendu, tout film doit permettre au personnage principal « d'apprendre quelque chose et d'évoluer ». Seulement, le personnage est plus que cette obligation scénaristique. Elle est d'une noirceur rare dans un film hollywoodien, d'une violence contenue assez impressionnante et se positionne dès lors plus comme un anti-héros. Elle est surtout une figure de la victime d'une société en laisser-aller, une société violente aussi bien physiquement que moralement, voire culturellement.

Les deux autres personnages principaux, les deux étudiants sont eux aussi dans la même lignée thématique de la violence sociale. Il y a d'abord le jeune séducteur riche qui s'ennuie et qui commet le crime pour le fun, et puis l'intellectuel philosophe, mal dans sa peau, qui met, avec ce crime, en pratique sa théorie sur la liberté qui, loin de le libérer, l'enferme. Le crime est ainsi emprisonné entre ses deux extrêmes : le crime gratuit et le crime politique, mais à chaque instant du film, et là réside une de ses réussites, le crime ne reste pas vivace comme tel, il se réduit très vite à son essence même qui est la violence !

Là aussi pas de concession au niveau de ces deux personnages car, si durant tout le film notre sympathie va vers le personnage du jeune homme mal dans sa peau (dont le mal-être peut justifier le crime, à l'inverse du séducteur qui ne peut rien justifier) on découvrira aussi que le film évite finalement la moindre issue positive pour préférer une résolution encore plus terrible que le crime lui-même.

De toute cette histoire finalement, aussi bien du personnage de Sandra Bullock que des deux jeunes, une seule chose reste : l'impression de gâchis, car au bout du compte la seule gagnante, c'est la violence, celle donnée sans raison ou celle reçue sans réaction. Et cette violence dépasse largement le cadre de ce crime, de cette affaire, qui n'est au fond qu'une de ses résurgences…


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