4,5/6
Parmi les qualités du film :
Un film qui date du début des années trente, et qui sans être un des meilleurs films de son auteur, demeure moderne et intéressant. Et une confirmation: Ozu est l'un des très grands cinéastes de son siècle. Un de ceux en tous cas qui ont le mieux exprimé par l'image les différentes facettes du monde du travail.
(*) ceci ferait passer la note à 5/6.
L'histoire est celle de quatre amis de bancs de lycée. Quatre joyeux lurons sont plutôt intéressés par les jeux de société que par les études. Ils trichent avec amusement aux examens, ils sont solidaires comme les doigts d'une main. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, sauf que Tetsuo, d'origine riche devrait se marier avec un riche parti, mais ne le souhaite pas. Pire : son père décède et le voilà propulsé PDG. Sauf que l'étudiant d'avant est toujours le même que le président de maintenant. C'est dans cette espérance que les trois anciens copains, un an plus tard, se présentent à lui, pour être engagés dans sa société et pouvoir survivre. Seulement une fois engagés, ils regardent désormais leurs "ami" comme un patron…
Le film est loin d'être parfait mais il est terriblement intéressant car tous ces défauts donnent au final au film un aspect étonnant, particulier. Ainsi, il démarre comme une comédie, voire comme une farce. Les scènes se succèdent, centrées uniquement sur des gags : salle de récréation, jeu de société durant la classe ou bien encore le gardien qui déclenche par hasard une sortie de classe intempestive. C'est léger, naïf, souvent trop artificiel, mais il y a indubitablemement de la légèreté et une recherche formelle pour appuyer encore plus l'effet comique.
Le comique de situation se transforme ensuite en comique de personnage avec le père de Tetsuo et celui d'une jeune femme qui veut épouser (mariage de raison) Tetsuo. Pour s'en débarrasser ce dernier se fait passer pour violent, alcoolique, voleur, et n'obtient de la jeune femme qu'un amour encore plus grand.
Tout ce début de film est drôle mais manque terriblement de continuité, de cohérence. On a l'impression de voir se succéder tout au mieux des sketchs, souvent des gags qui à part leur effet comique n'ont pas vraiment d'intéressant : ils ne font pas avancer l'action ni n'éclairent les personnages de manière nouvelle.Et puis, à la moitié du film, le récit change : à la mort de son père, Tetsuo abandonne ses études pour devenir PDG de la firme de son père. Là, on bascule dans un ton et un récit qui n'est pas sans rappeler A Nous la Liberté, un bon plus acerbe, plus cynique. Le rapport entre Tetsuo et ses anciens amis devient bien plus intéressant aussi bien dans la dramaturgie que dans les enjeux des personnages. On regrettera seulement un manque de fluidité dans le retournement des trois amis. Ils deviennent trop "tout d'un coup" soumis à l'autorité, trop vite victime de l'image de patron de leur ancien ami. Ce basculement passionnant et qui aurait du constituer tout le corps du film est gérer avec une trop grande rapidité. La résolution du film est dans le même acabit : rapide et purement théorique.
Le film est donc frais mais en même temps maladroit, inabouti mais bourrés de bonnes choses.
Mais surtout le film témoigne avec clarté d'une thématique qui sera à l'opposé des films de la seconde période de Ozu. Le film montre comment des personnages soumis à une image sociale, un héritage socio-culturel peut en venir à ne plus voir les individus en tant que tel mais les déterminer uniquement par leur fonction.
Ce réflexe est assez propre à la culture nippon et Ozu se met très largement en porte-à-faux avec ce comportement. Il remet en question le devoir de respect à l'autorité… ce qui est à l'opposé de ce que sera son cinéma d'ensuite. Non pas qu'il ce soit renié ou qu'il ai changé d'avis. Seulement le combat d'alors n'était pas celui de plus tard…Le travail effectué par Ozu sur les costumes est particulièrement évident, surtout concernant le personnage de Saïki qui, dans le film, est prêt à renoncer à sa fiancée désiré par Tetsuo le patron. Il est près à se sacrifier plutôt que de remettre en question l'autorité du patron. Habillé en occidental durant sa période "libertaire", il revêt des vêtements traditionnels durant la période "soumise" à la coutume… Et finalement abandonne de nouveau les vêtements traditionnels quand il réussit à s'affranchir de l'héritage culturel…
Voilà bien des images qui seront totalement impossible durant la seconde période du cinéma d'Ozu…
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