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De verdun, le 23 septembre 2020 à 23:26
Note du film : 4/6

Saint-Malo, fin du XVIIIe siècle. M. Blaize de Maisonneuve, propriétaire d'un chantier naval, s'oppose au mariage de sa fille Marie-Catherine (Geneviève Casile) avec le jeune Robert Surcouf (Gérard Barray), trop pauvre pour lui. Surcouf part alors à l'Ile Maurice pour faire fortune et se met au service du gouverneur, qui le charge de forcer le blocus anglais. Victorieux et de retour en France, il est séduit par une Anglaise, Margaret Carruthers (Antonella Lualdi), promise à un certain Lord Blackwood (Terence Morgan): Surcouf a rencontré celui qui va devenir son pire ennemi.

Cette biographie très romancée de Robert Surcouf, le plus célèbre corsaire français de tous les temps, a d'abord le mérite d'exister. D'une part, de Capitaine sans peur à Master and Commander en passant par Les mutinés du Téméraire, nombreuses sont les productions ayant montré la marine anglaise affronter avec succès les Français. Sans donner dans le chauvinisme excessif, il est permis de se réjouir de voir enfin une fiction montrant un marin français remporter des victoires sur les Anglais. Et merde pour le roi d'Angleterre qui nous a déclaré la guerre ! comme dit la chanson.

D'autre part, le cinéma de ce grand pays maritime qu'est la France ne s'est quasiment pas intéressé aux pirates ou corsaires hexagonaux. Il y eut bien un Surcouf muet de 1924, ou la série télé de Claude Barma Corsaires ou flibustiers. Sans oublier les -nombreuses- coproductions avec l'Italie, telles que Les pirates de la côte. Mais c'est à peu près tout. On ne trouve aucun film sur les exploits des corsaires de Louis XIV, à savoir Jean Bart (1650-1702) et Duguay-Trouin (1673-1736). Aucun film sur les pirates Daniel Monbars dit l'exterminateur et Olivier Levasseur (1689-1730) dit « La buse ».

Dans ces conditions, on se félicite que ce Surcouf, tigre des sept mers ait pu voir le jour au milieu des années 1960. Il a tout de même fallu des capitaux espagnols et italiens pour mener à bien cette entreprise. Alors qu'on pouvait s'attendre à retrouver derrière la caméra un André Hunebelle ou un Bernard Borderie, la réalisation est signée Sergio Bergonzelli, futur spécialiste du western et de l'érotisme made in Cinecittà. Pour l'anecdote, signalons que le film aurait été entièrement mis en scène par celui que le générique qualifie de « conseiller technique » : Roy Rowland, honnête artisan américain de la Metro Goldwyn-Mayer surtout connu pour l'onirique Les 5000 doigts du Dr. T. Le nom de Bergonzelli aurait été mis en avant au générique uniquement pour bénéficier d'une aide du gouvernement italien.

Après avoir fait les belles heures de la télévision jusqu'à la fin des années 1990 sur les chaînes de télé TF1, M6 ou Canal +, Surcouf, tigre des sept mers est tombé dans l'oubli et n'est toujours pas disponible en DVD actuellement, ainsi que le rappellent les commentaires précédents. Il faut avouer qu'il s'agit d'un spectacle quelque peu suranné, dès le générique de début proposant une sympathique chanson des Compagnons de la chanson, groupe vocal français oublié de nos jours après avoir été très populaire dans les années 1950-1960. La musique du talentueux Georges Garvarentz est, d'une manière générale, assez décevante. Les amoureux du réalisme (qui de mon point de vue, ne sont pas les amoureux du cinéma) s'irriteront du manque de crédibilité de certains combats.

La vie déjà fort mouvementée de Surcouf est traitée ici comme un roman de cape et d'épée dépourvu de nuances. Le fameux marin est ici un super-héros dénué de défauts, une sorte de James Bond de la Révolution et de l'Empire qui doit affronter des méchants très méchants, par ailleurs ses rivaux en amour, le Français Chamblais et l'Anglais Lord Blackwood. La participation de Surcouf à la traite négrière n'est pas évoquée. La romance du héros avec sa promise Marie-Catherine a des parfums d'eau de rose. Celle avec la promise de Blackwood est plus piquante, grâce à la vénéneuse Antonella Lualdi et à la situation qui voit le marin d'origine pauvre séduire une aristocrate britannique . Les scénaristes ont rajouté des complots, des histoires d'amour, des amitiés viriles indéfectibles, des duels à l'épée ou à l'arme à feu, des quiproquos, des intrigues politiques et toutes sortes d'éléments tout droits sortis d'un roman de Dumas. L'influence de la saga à succès Angélique marquise des anges est évidente, notamment dans la façon de mêler romance et intrigues politiques, grande Histoire et anecdotes inventées de toutes pièces.

Surcouf, tigre des sept mers peut donc sembler de nos jours assez vieillot. Seulement voilà il faut aussi admettre que ce type de film n'a pas été remplacé dans le cinéma français et européen actuel. Où est, en 2020, l'équivalent modernisé de ce genre de productions ? Les rares tentatives hexagonales récentes de résurrection de ce type de cinéma, comme L'île aux trésors, Philibert ou la nouvelle version d' Angélique, ont été des échecs sur tous les plans.


Car ce Surcouf bien ancré dans les « sixties » possède des qualités élémentaires que le cinéma populaire actuel a perdu. La direction artistiques -décors et costumes- est réussie. Les personnages ont une psychologie sommaire mais sont interprétés par des acteurs biens choisis et charismatiques, à commencer par Gerard Barray qui contribue à rendre l'ensemble dynamique et attachant. Le rythme est très satisfaisant; certains moments possèdent même un certain souffle, comme le duel à l'épée entre Surcouf et Chamblais. « L'appel du large » est au rendez-vous : les séquences maritimes sont efficaces malgré malgré leur brièveté et le jeu approximatif des figurants. Elles emploient majoritairement de beaux bateaux. Les seules maquettes visibles ont été employées pour quelques plans furtifs de bateaux éventrés.

Les spectateurs auront le plaisir d'entendre la célèbre répartie attribuée à Robert Surcouf:

  • Lord Blackwood: "Vous, vous combattez pour l'argent. Les Anglais,pour l'honneur et la gloire.
  • Surcouf: "Bien sûr. Chacun de nous se bat pour ce qui lui manque".

Et puis un tel divertissement de cette nature fait du bien. Car Surcouf, tigre des sept mers est bon enfant mais respectueux du spectateur, riche en dépaysement et en héroïsme, et dénué des facilités comme l'humour potache, les effets numériques à outrance et la violence gratuite qui entachent trop de films populaires de nos jours !


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De Gweltaz, le 24 mars 2019 à 23:06

Tout à fait d'accord ! Et on est 5 ans après !, A quand la réédition en DVD de Surcouf ou au moins un passage à la télévision ! CORDIALEMENT


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