Car c'est ainsi que ça commence : un auto-stoppeur sur une route de campagne qui, dès qu'il monte dans une voiture, en tue les passagers : pour les voler, pour les violer, pour le plaisir orgasmique du meurtre, pour fuir sa haine du monde et de lui-même ? Il n'y aura pas de réponse. Au fait pourquoi Myers ne tue-t-il pas aussi Roy Collins (Edmond O'Brien) et Gilbert Bowen (Frank Lovejoy) les deux copains partis loin de leurs femmes faire une bonne séance de pêche ? Il leur indique tout de suite qu'il est bien le tueur recherché désormais par toutes les polices mais il pense qu'il s'en sortira mieux en se faisant véhiculer par les deux braves types.
Longue errance. On ne comprend pas bien la raison de la course folle. On est dans la péninsule dite de Basse-Californie qui s'étend sur 1250 kilomètres et que sépare du reste du Mexique ce qu'on appelle la mer de Cortès. Le but du voyage, pour le tueur, est de traverser ce bras d'océan, sans doute pour se fondre plus facilement dans l'accueillant et bordélique Mexique. Il a prévu, au passage, de se débarrasser des deux clampins et il faut lui reconnaître cette justice qu'il ne leur a pas caché ses projets. J'y reviens : Le voyage de la peur est d'autant plus réussi qu'il ne donne pas la moindre place au romanesque, au théâtral, et, si je puis dire, au surprenant : le spectateur vit l'errance minable du trio avec la trouille intense, continue, insupportable de deux braves pères de famille qui se demandent à chaque seconde si leur tortionnaire ne va pas, la minute suivante, leur envoyer une balle dans le crâne. Le propre du tueur Myers, c'est qu'il n'a pas de principe mais, si on peut dire, pas de vice : il ne torture pas sadiquement ses otages, il ne les pousse pas à bout : il est là, fatidique et impénétrable et à chaque seconde il peut tirer.Ça se termine bien : le méchant est capturé, les deux benêts libérés. N'empêche que la bonne heure qu'on a regardée, on a vécu avec les acteurs.
C'est pas merveilleux, le cinéma ?
Un polar de 1953 réalisé par une femme (Ida Lupino) c'est rare. Concis (70 minutes), âpre, Le voyage de la peur est une réussite du genre. On peut admirer la photographie du désert de Nicholas Musuraca sur un plan formel, et sur le fond un descriptif réaliste et intéressant des psychologies des personnages. La surprise vient de la qualité de la mise en scène de Ida Lupino (actrice reconnue), dont les plans sont absolument impeccables, et créent un climat d'angoisse de bout en bout. On a affaire ici à un petit classique du film noir.
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