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Description réaliste de la police française


De Impétueux, le 2 août 2016 à 17:13
Note du film : 4/6

À côté des mises en scène violentes et flamboyantes des policiers stars des brigades centrales (la Criminelle ou l'Antigang), il y a des films qui posent leur regard réaliste, naturaliste sur la vie quotidienne, routinière, répétitive de policiers des unités de terrain, les Divisions de Police judiciaire, souvent noyées sous les contraintes de la procédure pénale et mobilisées pour des crimes qui occuperont, au mieux, trois lignes dans les journaux. Jamais rien de bien glorieux mais au bout du compte, pourtant, presque la même vie, presque les mêmes risques.

Un des grands intérêts du Petit lieutenant est de mêler une observation documentaire, presque entomologique des jours qui passent dans une section de la 2ème DPJ, qui est en charge du nord et de l'est de Paris et la vie brûlée du nouveau chef de cette section, de retour au service après une interruption de plusieurs mois, peut-être davantage.

Le commandant (on disait jadis l'Inspecteur principal) Caroline Vaudieu (Nathalie Baye) a sans doute été un jeune espoir de la police, a perdu, quinze ou vingt ans auparavant son jeune fils d'une méningite, a bu beaucoup trop, a passé sa vie dans ses nuits, n'a plus ni mari, ni amant, ni goût de vivre. Elle s'est désintoxiquée, participe à des réunions d'alcooliques anonymes, mais on voit bien qu'elle ne croit pas à de naïfs et bienveillants discours.

Elle ressent pour le jeune lieutenant Antoine (Jalil Lespert) qui, après deux ou trois ans d'ennui administratif en Normandie, est venu goûter à Paris un peu plus d'action policière, une sympathie, une tendresse mi-maternelle, mi-amoureuse. Antoine est vraiment heureux d'être là, même s'il aimerait que sa jolie fiancée (Bérangère Allaux) le rejoigne. Comme il est fier, presque un gamin, de foncer dans les rues de Paris avec la sirène deux-tons de la voiture du service qu'il vient de récupérer au garage central !

Et il aime aussi ce boulot de recherche de délinquants petits et moyens, à base de compilation d'écoutes téléphoniques, de recueil de renseignements fugaces et incertains, d'observation de photos. Nuits de veille, fausse complicité des déjeuners en commun et des errances nocturnes, autopsies sanguinolentes à l'Institut médico-légal, crasse, puanteur, petits braquages, suicides. Vie de tous les jours.

Recherche de l'assassin d'un clodo polonais anonyme balancé à l'eau, sans doute par deux Russes ; longs recoupements, petits pas de fourmis sur des photos, des conversations téléphoniques. Au moment où ça aboutit, le drame. La mort du petit lieutenant ne laissera pas beaucoup de traces : est-ce que le policier n’a pas ce risque dans son paquetage, en macabre compagnon ?

J'ai rarement trouvé Nathalie Baye aussi bonne, desséchée, lasse au delà de tout, la bouche amère, inconsolable de sa vie gâchée. Je ne connaissais de Jalil Lespert que son rôle de confident de François Mitterrand/Michel Bouquet dans Le promeneur du Champ de Mars de Robert Guédiguian ; j'ai l'impression que, depuis lors, il ne tourne que dans des films assez confidentiels : c'est assez dommage parce qu'il met fraîcheur et enthousiasme dans un film au ton grave. Et, dans les seconds rôles, Roschdy Zem et Xavier Beauvois lui-même, acteur de son propre film, touchent juste.

Il me semble en tout cas que le réalisateur, auteur ensuite du puissant et profond Des hommes et des dieux est un des rares cinéastes contemporains qui méritent d'être suivis.


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De Torgnole, le 17 novembre 2008 à 15:45
Note du film : 5/6

Je n'avais jamais entendu parler de Xavier Beauvois et en cherchant la filmographie de ce jeune réalisateur à la suite d'une vision hasardeuse de ce film, je constate qu'il a bénéficié de plusieurs prix et nominations pour la plupart de ses oeuvres mais qu'il ne bénéficie pas encore de beaucoup de commentaires de la part des contributeurs de Dvdtoile pourtant revendiqués adeptes du bon cinéma français, mais je vois que le film ne date pas d'avant les années 80, il est même très récent, tout s'explique!

En voyant Le Petit Lieutenant, à l'instar de Police ou encore L.627, le premier mot qui vient à l'esprit est réalisme, tout d'abord, celui des personnages qui ne sont ni attachants ni détestables mais simplement crédibles, les acteurs imprègnent de vérité chaque situations de par leur jeu naturel et leur banalité psychologique. La façon de filmer est simple et donne l'illusion d'être sans effet mais subtilement stylisée justement par la volonté de cacher ses effets (à méditer), les caméras sont facilement oubliées. De ce fait, la moindre situation qui sort de la vie ordinaire devient poignante et brutale car le film ne se laisse pas tenter par le fait divers sensationnel, élément typique et racolage facile du film policier de base. La mise en scène ne s’embarrasse pas d'une logique explicative qui justifierait le destin de chaque personnage mais se laisse implacablement guider par les évènements décrits d'une façon pratiquement sociologique.

Pourtant, à l'image de sa façon de filmer, Xavier Beauvois cache les effets de son scénario derrière cette simplicité illusoire qui pourrait s'apparenter à quelconque téléfilm ennuyeux, Le Petit Lieutenant est beaucoup plus profond qu'il n'y paraît et produit une étrange sensation quand survient le générique de fin.


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