Je suis le premier à dire du bien de Philip Noyce, même si j'aurais préféré qu'il fasse d'autres films australiens comme Backroads (d'ailleurs il a signé son meilleur film en revenant en Australie pour Dead Calm). Ainsi en 2002, M. Noyce était drôlement en forme puisqu'il réalisait coup sur coup Un Américain bien tranquille et Rabbit-proof Fence. Mais il y a pire, car voici un aveu très incriminant en ce qui me concerne: j'ai même aimé Le Saint. Eh oui, je sais, je sais ce que vous allez dire, épargnez-le moi. On dirait que personne d'autre n'a aimé ce film sauf moi, et en outre je l'ai non seulement vu mais revu.

Il en va de ce Bone Collector comme de Hurricane Carter (tourné lui aussi en 1999), il vaut d'abord pour Denzel Washington lui-même, dans un rôle pas évident de détective paraplégique. Couvre drôlement bien ses bases, le Denzel : le malade a deux scènes de crise assez saisissantes (bien que consécutif à un accident, le mal qui le cloue dans un lit est dégénératif). Il s'est bien entraîné, je crois !

Face à lui, Angelina Jolie tire son épingle du jeu, mais elle n'a pas la même intensité que son partenaire. Les acteurs de soutien sont par contre de l'équipe AAA (comme disent les agences de notation) : Queen Latifah, Luis Guzman sont excellents. Des tronches qu'on aime bien retrouver.

C'est l'intrigue qui est faiblarde, au fond ; et la solution du whodunit, vraiment pas fameuse car on n'a pas eu la moindre bribe d'indice sur le coupable avant ça. L'histoire du serial killer tient plus ou moins la route, car ses motivations me semblent par trop rationnelles pour justifier une pulsion irrésistible vers le meurtre. Enfin, ce que j'en dis…

La réalisation est compétente mais au service d'une dramaturgie plutôt décevante.

C'est effectivement un très bon thriller, dans la droite lignée de Seven, sans en avoir la maestria. Noyce est un solide artisan, et Bone collector fait partie avec Calme blanc, de ses vraies réussites. Il repose, il faut le dire, sur un scénario travaillé et malin, même si le "whodunit" des plus classiques, n'est pas ce qu'il y a de plus passionnant. C'est surtout la relation entre les deux personnages principaux, qui retient ici l'attention : le génie de la police scientifique paralysé et suicidaire, et la jeune recrue surdouée, mais traumatisée. Parfaitement dirigés, Washington et Jolie sont sobres, crédibles, ne cèdent à aucun de leurs tics habituels, et créent des individus attachants et évolutifs. Autour d'eux, les seconds rôles sont très cliché, mais interprétés par de grandes figures comme Rooker, Guzman ou Latifah, bien servis par les dialogues. Mention aussi à la BO, qui donne une belle ampleur film, particulièrement sur les plans d'hélicoptère tournés de nuit.

Le film de "serial killer" est devenu un sous-genre en soi du polar, et si Seven est encore insurpassé, il a donné naissance à pas mal d'héritiers, dont Bone collector est un des plus dignes. Deux heures de plaisir assurées, ce n'est pas si courant que ça, finalement.