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Mélodies en sous-sol ..


De Tamatoa, le 21 novembre 2013 à 19:38
Note du film : 3/6

J'm'appelle Slimane et j'ai quinze ans, j'vis chez mes vieux à La Courneuve, j'ai mon C.A.P. d'délinquant, j'suis pas un nul j'ai fait mes preuves, dans la bande c'est moi qu'est l'plus grand, sur l'bras j'ai tatoué une couleuvre…. (Renaud)

Pour cette chronique de la crasse ordinaire, Jean-Loup Hubert, le réalisateur de ce Grand chemin qui fera tant pleurer dans les chaumières, a, dans un premier temps, installé ses caméras dans une zone, quelque part en France, entre les tours HLM et le supermarché. Cette espèce de village qui n'arrive jamais à se dégager tout à fait de la boue… (Céline). Et si on s'essuie les pieds avant d' entrer à Neuilly, c'est un exploit de se laver les mains entre les vols à l'étalage et les amours entre deux piliers de ces cages à lapins où toutes les nationalités se côtoient et se méprisent. Le décor est planté. On sait où on est . Loin de tout espoir…

Elle met du vieux pain sur son balcon, pour attirer les moineaux, les pigeons. Elle fait l'amour par procuration, devant son poste de télévision.. (Goldman).

Elle, c'est Balasko, vulgaire comme jamais, mais qui porte ce film sur ses épaules comme Atlas porte le monde sur son dos. Jean-Loup Hubert ne lui a pas fait de cadeaux. Elle est le centre, la maman désignée, prétendue de cette Smala composée de paumés de tous âges, formant une famille recomposée, fabriquée comme un meuble de chez Ikéa. Chez beaucoup, il manque des boulons et on n'est pas sûr de la véritable origine des pièces qui la compose. A force de venir faire le ménage dans cette drôle de ménagerie, la Josiane a finit par remplacer la mère dévoyée partie avec un CRS qui lui a promit la grande vie dans une caravane pour elle toute seule…

Pauvre et piètre papa de cette Smala, Victor Lanoux, qui a perdu la superbe qu'il arborait entre deux conquêtes dans Un éléphant ça trompe énormément, est devenu un pauvre type à la limite de la pendaison, jouant de l'accordéon, la larme à l'oeil, au porte de ce supermarché où ses rejetons tentent de faire quelques courses à l'oeil.. et à la barbe des vigiles.

Elle adorait tous mes déguisements, je déguisais mes sentiments. Quand elle est partie avec un salaud, j'ai mis un poisson d'avril dans son dos…J'comprends pas…(Dutronc). Formidable Lanoux dans un rôle d'imbécile pas même heureux, cocu qui s'ignorait, voleur à l'occasion et rarement père prodigue. Les jumeaux qui ressemblent tellement au patron du café du commerce ? Qu'ils se démerdent ! La grande qui veut devenir star de la chansonnette ? Chante, ma belle, chante ! Et pis y'a la toute vieille, qu'en finit pas d'vibrer..Pis qu'on attend qu'elle crève, vu que c'est elle qu'à l'oseille. Et qu'on écoute même pas c'que ces pauv's mains racontent… (Brel). Elle est a moitié, aux trois-quarts morte sur son fauteuil depuis si longtemps. Soigneusement rangée au dessous de l'étagère où trônent le cerf orange, le gros coquillage où on n'entend plus la mer, les poupées Espagnole et le taureau en plastique, vestige d'un lointain voyage en famille encore digne de porter ce nom.

C'est ça, La Smala. Une sorte de Caravane Pacouli sédentaire, vissée dans un coin de terrain vague et un très vague désir de s'en sortir vissé au cœur. Jean-Loup Hubert les fera bouger quand même. Une femme, ça se retrouve. Avec rien, direction Paris où Dominique Lavanant, désireuse de changer de vie et de sexe les accueillera le temps que le père infortuné retrouve ou pas sa femme. La crasse semblera, l'espace d'un instant, s'éloigner. Et voilà t-y pas que l'amour va s'en mêler ? Et ça va même swinguer ! Un gégène, formidable Maurice Risch, plus ou moins (et plutôt moins) producteur va faire chanter tout ce petit monde puisque La smala sait faire ça. Et ça va marcher ! Ajouter à cela un billet gagnant de la loterie nationale et ils s'envolent tous pour Caracas. La smala ? La classe !

Un film comme il en fleurissait des tonnes en ces années 80. Pas franchement drôle, pas vraiment prenant, pas très fin, pas des plus subtils mais plein de ces personnages attachants qui nous rappellent que nous avons eu beaucoup de chance. Si on ne s'ennuie pas, on ne s'extasie pas pour autant devant une histoire qui sent le "social", les gens d'à côté, un autre monde. Un film qui semblerait dégager une certaine folie mais qui, à bien y regarder, reste très sage. Pourtant, chaque personnage est étudié au plus juste et le désespoir latent qui l'accompagne à nettement la vedette. Non, décidément non, La Smala n'est pas un film drôle. Mais c'est peut-être la force de ces gens là que de donner le change. Et Jean-Loup Hubert nous le démontre, sinon avec talent, du moins avec force conviction. Il a fait un film qui ne se veut pas documentaire mais témoin de la vie d'une faune qui ne s'éteint pas (la faute à qui ?) avec le temps. Ce film se veut léger. Il ne l'est pas. Et le talent des acteurs de cette chronique du sans espoir en rajoute. Nous ne vivons pas tous sous le même ciel ne ne dormons pas dans les mêmes draps.

Et vive le cinéma, seul apte à envoyer La Smala se réchauffer au grand soleil …


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