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Critique


De esthéte, le 13 novembre 2004 à 18:17

Merci, votre analyse est excellente. Je reverrai ce film autrement et mieux encore ; l'éducation du regard est essentielle et vous y avez participé.

Pouvez-vous m 'indiquer les chefs d oeuvre de la production cinématographique s'il-vous-plaît ?


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De dumbledore, le 1er janvier 2004 à 15:19
Note du film : 6/6

François Truffaut disait de ce film que c'était le plus beau film du cinéma. La formule a de quoi effrayer par sa radicalité, et pourtant, en voyant l'œuvre de Murnau il faut bien se rendre compte que François Truffaut n'exagérait pas. Réalisé en 1927, c'est-à-dire avant le parlant, dans cette période encore en friche de la narration cinématographique, le film possède encore aujourd'hui une modernité ahurissante à tout les niveaux. Aussi bien des personnages que de la mise en scène, que du cadre ou bien des décors.

Murnau ose tout dans ce film et tout fonctionne.

Dans la narration d'abord. Certes le film est très conventionnel dans l'histoire développée, reprenant des thèmes de l'époque : le mélodrame, l'opposition campagne avec ses valeurs saines et la ville lieu de perdition, etc. Seulement dans cette narration apparemment conventionnelle, le réalisateur casse la linéarité en cassant la chronologie. Par exemple dans la scène dans laquelle la maîtresse suggère à l'amant d'assassiner sa femme. On la voit lui raconter son plan et l'on voit le mari imaginer le crime dont elle parle. Plus tard dans le film, à la fin,

Murnau utilise un procédé complémentaire : il instaure une ellipse très dramatique pour effectuer un coup de théâtre (le coup de théâtre final justement) et explique ensuite par un flash back ce qu'il nous avait consciemment et consciencieusement caché. Flash back par ailleurs nullement introduit par un personnage principal mais par un personnage très secondaire, Murnau cassant encore une fois la règle établie du point de vue (de la focalisation). L'effet est que l'on ne peut jamais s'asseoir calmement face à ce film, que malgré une histoire conventionnelle et attendu, on est sans cesse surpris, étonné.

Dans la mise en scène ensuite. Murnau propose une caméra très libre, avec énormément de mouvements, privilégiant le plan séquence. Du coup, on suit littéralement les personnages vivant leur histoire plutôt que d'assister de manière un peu théâtral à des personnages qui se tournent vers nous, pour jouer leurs drames en champs contre champs. L'utilisation notamment de l'angle de dos et 3/4 dos est assez systématique. L'autre réussite du film est dans l'utilisation des fondus enchaînés, des trucages (effet schufftan notamment) qui permettent au réalisateur de nous faire basculer sans cesse du réalisme au poétique.

Dans les décors ensuite. Le film démarre pourrait-on dire « normalement » dans la campagne, mais peu à peu Murnau joue totalement entre réalisme (campagne) abstraction irréaliste (scène de la maîtresse et du mari dans la brume) et modernité. Toutes les scènes dans la ville (la fête foraine) sont très impressionnantes visuellement et annonce avec quelque avance la générosité hollywoodienne de l'image toujours la plus belle, la plus impressionnante possible.

Dans le jeu des comédiens pour terminer. Certes, à plusieurs moments, on a le côté grimace du cinéma muet mais ces rares moments concernent uniquement le personnage masculin décrit comme lourdaud. Murnau a d'ailleurs lesté ses chaussures de plombs pour appuyer cette impression. Mais tous les autres personnages ne surjouent pas, leur performance étant d'un minimalisme (et d'un réalisme) novateur.

La qualité du film trouvera un écho aussi bien public que critique puisqu'il obtiendra à la première cérémonie des oscars de 1929 plusieurs statuettes : celle du film possédant la meilleure qualité artistique, celle de la meilleure actrice et celle de la meilleure lumière.

Bref, un chef d'œuvre digne d'un, je ne sais pas, Citizen Kane


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