Parmi les nombreux courants du film policier U.S. dans les années soixante-dix, il y eut aussi un bref revival du film noir, dans la foulée du succès de Chinatown. Les meilleurs de ce sillon furent Farewell, My Lovely (d'après Chandler) et celui-ci, l'excellent The Late Show. Dans ce genre de récit, il faut une intrigue complexe et une atmosphère spéciale, mi sordide mi onirique, ingrédients auquel s'ajoutaient tout naturellement la reconstitution historique minutieuse et la nostalgie. ToutefoisThe Late Show, lui, se passe en 1976 : mais le détective privé à la retraite Ira Wells est un vieux monsieur, donc un type des années 30-40. C'est le coup de la nostalgie, mais d'une autre manière. Le traitement ici inclut des touches d'un humour doux-amer – pas vraiment kosher par rapport aux règles du genre – mais le ton n'est jamais parodique. L'humour vient surtout de la partenaire inattendue d'Ira, une excentrique voisine trentenaire qui a perdu son chat, jouée par la délicieuse Lily Tomlin. Quand elle lui arrive avec son affaire, Ira Wells – un ex tough guy qui porte désormais un appareil auditif et un ulcère – repousse l'affaire comme indigne de lui. Mais il se ravise quand il se rend compte qu'il existe un rapport entre la disparition du chat et le meurtre brutal de son ex-partenaire, lequel est venu mourir dans ses bras au début du film…

Mais le clou de ce Late Show est évidemment Art Carney, tout simplement irrésistible dans le rôle du vieux privé. Quel personnage ! Après avoir réussi un excellent western avec Bad company, Robert Benton ranime le film noir avec un égal bonheur. Les dialogues sont savoureux, la paire d'enquêteurs dépareillés une merveille, le tempo ni trop lent ni trop rapide. La séquence d'ouverture où l'on suit les pérégrinations du chat (reminiscence de La Rue chaude ?) nous met tout de suite dans le bain.