Assez, oui et hélas !

Soit, nous ne chipoterons point !

Certes, la nature de l'homme est d'être, entre autres, "curieux, agressif et non tolérant", mais il peut tout aussi bien être exactement l'inverse. Le problème gît sans doute dans notre double implication : animale autant, sinon plus, que sapiens. Notre humanisation est en cours, mais rien ne dit qu'elle se fera. En attendant, il faut vivre dans la contradiction, écartelé entre instinct et raison. La phrase de Camus – qui m'est cher – que vous citez témoigne de ce conflit permanent. Car elle est à replacer dans son contexte : Camus, au cours de la conférence qui suivit la remise de son Prix Nobel fut interpellé de façon discourtoise par un étudiant algérien qui lui reprochait sa position concernant l'Algérie. Sa réponse – je dirai instinctivement passionnée – fut de déclarer ce que vous rappelez : « Entre la Justice et ma mère, je choisis ma mère. » Mais si l'on connaît le combat de l'écrivain et son oeuvre, il va de soi que pour lui « Justice et mère » ne sont pas séparables…

D'ailleurs, Camus va nous réconcilier. Lorsqu'il apprit le bombardement d'Hiroshima, il eut ce cri : « Nous nous résumerons en une phrase: la civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie (…). » Avant d'ajouter : « Devant les perspectives terrifiantes qui s'ouvrent à l'humanité, nous apercevons encore mieux que la paix est le seul combat qui vaille d'être mené. Ce n'est plus une prière, mais un ordre qui doit monter des peuples vers les gouvernements, l'ordre de choisir définitivement entre l'enfer et la raison.» Il faisait donc une distinction avec tout ce qui avait précédé. Et qui pourtant…

Et, pour en revenir au point de départ de ce fil : après tout, cette lutte entre nos penchants animaux et humains n'est-elle pas précisément symbolisée par la guerre entre les insectes et les humains dans Starship troopers ?