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Forum : Poulet au vinaigre

Sujet : Divertissement délectable


De Arca1943, le 22 juin 2010 à 00:17
Note du film : 4/6

Même si je suis sûr d'avoir vu un chef-d'oeuvre avec Juste avant la nuit – mais je ne l'ai toujours pas revu – et malgré que le finale de Que la bête meure soit imprimé dans ma mémoire à jamais, je semble ne pas avoir vis-à-vis des films de Claude Chabrol l'opinion qui semble généralement admise sur ce forum, à savoir qu'il a fait quelques très bons films vers la fin des années soixante – Le Boucher, Que la bête meure, La Femme infidèle – et que depuis ce temps-là, c'est plus ou moins fini, avec parfois quelques (inexplicables ?) réussites comme le saisissant Une Affaire de femmes.

J'ai toujours pris plaisir à zyeuter des Chabrol, y compris des récents comme Au cœur du mensonge ou Merci pour le chocolat parce que j'ai toujours regardé ses films comme une vaste série policière, un peu comme les romans policiers d'Agatha Christie ou de Tony Hillerman, où le spectateur retrouve toujours un peu le même univers. Ce que j'en attends est un délassement ludique, un divertissement de qualité, plutôt qu'une expérience de cinéphile. Aussi un des principaux reproches que j'entends au sujet de Chabrol, à savoir qu'il se répète, n'a pas pour moi le moindre sens : au contraire, pour moi c'est une formule, assumée et voulue, une recette qui marche. Ce qui me fait plaisir, c'est justement de retrouver cette formule encore et encore, de préférence avec tout de même des petites variantes – mais pas trop non plus, car ça me dérangerait dans mes petites habitudes et mon petit soinsoin.

On aura compris que j'ai presque toujours vu ses films sur petit écran (je crois m'être déplacé en salle seulement pour Violette Nozière et Une Affaire de femmes) et que pour moi la "qualité Chabrol" se confond un peu avec la qualité, par exemple, de l'excellente émission américaine Mystery ! sur PBS. Ce qui peut sembler réducteur je le reconnais. Mais puisque j'y prends un réel plaisir, n'est-ce pas l'essentiel ?

Ça se passe toujours dans une ville de province, il y a toujours une énigme – généralement un meurtre, ou plusieurs – dont la solution s'avère toujours reliée à un inextricable noeud de vipères latent où sont mêlés à peu près tous les notables du coin, noeud de vipères qui éclate au grand jour à la fin. Bien sûr, cette formule ne décrit pas très bien Alice ou la dernière fugue ou Le Cheval d'orgueil, mais vous voyez ce que je veux dire.

Enfin, tout ceci pour faire comprendre l'intense plaisir que j'ai pris à voir Poulet au vinaigre et Inspecteur Lavardin, avec l'ébouriffant Jean Poiret. C'est du Chabrol plus formulaïque que jamais, qui s'assume plus que jamais comme un divertissement, comme un serial. La question de savoir si c'est ou non du grand cinéma ne me passe même pas par l'esprit, je suis trop occupé à jubiler. Grinçant et ironique, ce dyptique policier est un plat mitonné avec soin qui peut même se manger froid.


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De Impétueux, le 22 septembre 2014 à 18:44
Note du film : 3/6

Vu comme le voit Arca, le cinéma de Claude Chabrol fait, en effet, partie d'un paysage classique et satisfaisant, à quoi se réfère, d'ailleurs la boulimie du réalisateur, auteur d'une bonne cinquantaine de films en à peu près autant d'années, ce qui est beaucoup trop quand on n'est pas Julien Duvivier

Je me suis passablement énervé sur le fil de L'inspecteur Lavardin, second volet des aventures du personnage merveilleusement interprété par Jean Poiret, idéalement choisi pour le grain de folie cruelle, et même méchante qu'il sait mettre dans le rôle. Je suis exaspéré du manichéisme lourdingue et très conformiste de Chabrol, ces sarcasmes anti-bourgeois qui sont le pont aux ânes de toute l'intelligentzia, excitée de dire du mal de la classe dont elle est issue, dont elle partage le goût du confort et qui a, de surcroît, celui du luxe.

Poulet au vinaigre est évidemment truffé de salopards bien vêtus et bien logés, requins de province papelards (le notaire Hubert Lavoisier – Michel Bouquet), gluants (le docteur Philippe Morasseau – Jean Topart), vulgaires (le boucher Gérard Filiol -Jean-Claude Bouillaud) tous plus hypocrites les uns que les autres ; mais c'est bien plus nuancé que L'inspecteur Lavardin et les victimes de la bourgeoisie sont une cinglée (Mme Cuno – Stéphane Audran), son fils, un facteur ahuri (Louis – Lucas Belvaux) et une postière fofolle (Henriette – Pauline Lafont).

C'est tourné n'importe comment, l'arrivée à l'écran de l'inspecteur Lavardin se fait trop longuement attendre (45 minutes !), le scénario est à la limite de la vraisemblance, mais Jean Poiret est si extraordinaire (ah ! le voir demander du paprika pour ses œufs au plat !) qu'on se laisse facilement emmener.

Cela écrit, on est tout de même bien loin de La femme infidèle et du Boucher… Il me semble que Chabrol, soit par idéologie, soit par facilité, s'est tout de même bien trop laisser aller à faire n'importe quoi, ou à peine mieux. Et c'est bien dommage…


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De Arca1943, le 24 septembre 2014 à 02:53
Note du film : 4/6

Je ne suis pas sûr que je vous suis, Impétueux, quand vous dites que Chabrol ne jette son fiel que sur les personnages de "bourgeois" (ah ce vocabulaire). Que dire du bas peuple dans Une affaire de femmes, par exemple ? Où comme vous le soulignez vous-même ici, la demi-folle pyromane et son fiston ? Et le répugnant personnage joué par Jean Yanne dans Que la bête meure : à des critères français, est-il catalogué comme bourgeois ou ce ne serait pas plutôt un gros butor sans manières auquel on imagine plutôt un papa journalier ? Enfin, pour ma part, j'ai toujours cru que c'était la nature humaine en général que monsieur Chabrol voyait comme ça, sous ce jour peu reluisant, plutôt qu'une classe sociale en particulier. En tout cas j'ai toujours vu ses films sous cet angle. Précisons aussi que les spectateurs étrangers de Chabrol, qui sont nombreux, ne se disent pas à tous les cinq minutes, au spectacle de ces turpitudes morales: "Ah oui, c'est bien les Français". Ils se disent plutôt : "Ah oui, pauvres de nous." De plus, il est dans l'ordre des choses qu'un caricaturiste s'en prenne à l'establishment qui lui tombe sous la main, qu'il fustige plus souvent les plus puissants que les moins puissants.

Par contre il ne faut pas abuser des bonnes choses et le touriste qui a vu trop de Chabrol et voyage en France – comme ce fut mon cas il y a plus de dix ans – a tendance à s'étirer le cou et l'oreille à chaque fois qu'il déambule ou se restaure dans une ville de province, histoire de surprendre des secrets locaux !


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De Impétueux, le 24 septembre 2014 à 14:24
Note du film : 3/6

Vous n'avez pas tort, Arca, et j'ai été sûrement trop parcellaire ou imprécis : en fait c'est bien sur L'inspecteur Lavardin que j'avais relevé ce travers de cogner sur les mœurs bourgeoises et j'ai étendu mon observation à la totalité d'une filmographie inégale, mais souvent intéressante.

Je donne acte volontiers qu'un film comme Violette Nozière par exemple ne donne pas des petits employés une image bien reluisante ; mais vous le soulignez opportunément à la fin de votre message : tout le cinéma de Chabrol paraît être animé d'une sorte de délectation de la découverte des fonds de tiroir et des dessous d'escalier de notre pauvre humanité. Et la contemplation d'une intégrale exhaustive de ses œuvres nous laisserait vite les bouches très amères…


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De Arca1943, le 25 septembre 2014 à 18:00
Note du film : 4/6

« …mais vous le soulignez opportunément à la fin de votre message : tout le cinéma de Chabrol paraît être animé d'une sorte de délectation de la découverte des fonds de tiroir et des dessous d'escalier de notre pauvre humanité.»

Vous ne croyez pas si bien dire. Lors de mon dernier voyage en France, il y a plus de dix ans, je séjournais chez des amis dans une petite ville du Massif central, amis qui m'entraînèrent plus d'une fois au "vrai" restaurant local (c'est-à-dire pas celui des touristes), où dînaient régulièrement une joyeuse compagnie de notables locaux. Un peu en retrait comme il est normal quand on ne connait personne, j'observais – en sirotant ma puissante eau de vie locale – ces fameux Français dont on m'avait tant parlé. Et bientôt, je surpris de curieux échanges muets de regards entre la pharmacienne et le notaire, assis chacun à un bout de la salle à manger. Tiens donc, me dis-je, devant ce petit manège qui se poursuivit toute la soirée. Tout en ne disant rien, ils avaient vraiment l'air de se dire quelque chose. Qu'est-ce là? me demandai-je, tandis que dans mon esprit s'ouvraient 36 chaînes sémantiques en couleurs, alimentées par des réminiscences des Biches, de La femme infidèle, Juste avant la nuit, Les noces rouges. Qu'est-ce là ? Quel était donc ce mystérieux manège sans paroles, mu par une complicité évidente ? Quel secret inavouable, remontant peut-être à plusieurs décennies, se cachait dans ces regards échangés à la sauvette par les deux notables ?

Eh bien il s'avéra que la pharmacienne et le notaire étaient mari et femme. Ah ben ouais, vu comme ça, c'est tout de suite moins mystérieux, me dis-je, dépité. Et tout ça, c'est la faute à Chabrol ! Lui et sa manie de voir des nœuds de vipère partout, ça m'apprendra, tiens !


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De Frydman Charles, le 15 octobre 2015 à 16:56

Dominique Zardi joue le chef de poste Henri Ruitard dans le film . Il a également composé la chanson du film "douce France" aux paroles bien différentes de celles de Charles Trenet. "Douce France" peut sembler ironique au vu des intrigues du film. Est-ce la chanson que l'on entend vers 34 mn 30 s dans la voiture du boucher Filiol ? Louis y avait versé du sucre dans le réservoir d'essence et cela provoquera un accident ou Filiol Perdra la vie . Les paroles de la chanson sont quasi inaudibles, d'abord couverte par le bruit d'un moteur de camion, puis des coups de klaxons juste avant l'accident mortel . J'ai vaguement compris "un vin de chez l'ardoise ? (framboise ? Gerboise ?) , Un fil cousu d'argent ,un chemin de campagne , et moi en conduisant"…Et c'est l'accident ! Je n'ai pas réussi à trouver les paroles sur le net. Dans les années 80 on entendait sur les ondes une variante de cette chanson…


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De Frydman Charles, le 23 octobre 2015 à 14:29

Je regadre la rediffusion du film et j'ai mis la sous-titres, ci-après les paroles:

Lorsqu'on aura gagné le ciel, Auprès des anges à genoux, …………………….. On verra comme un arc en ciel Un fin clocher d'ardoise, Un fil ruisseau d'argent, Un chemin de campagne, Et moi à contre champ….à contre champ


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