Grand film, ou Maurice Pialat montre à travers le portrait de Van Gogh ce que peut être la vie d'un artiste incompris : mélange de moments dramatiques -surtout- et de quelques instants de comédie, et un exutoire : la créativité à tout va. La photographie est superbe (les bords de la rivière), et certains moments (les scènes de danse finales par exemple) sont tout simplement anthologiques.
Effectivement, les scènes au bord de la rivière sont magnifiques comme beaucoup d'images de cette oeuvre exceptionelle de Maurice Pialat. c'est filmé admirablement avec une "spontanéité travaillée" ce qui permet un réalisme bluffant à la limite du documentaire. De plus, les acteurs sont très naturels, comme s'ils ne jouaient pas du tout, on a l'impression qu'ils improvisent, laissant leur personnage libre de les hanter. La scène du repas de famille avec la fameuse "saucisse de Toulouse" est criante de vérité, on a l'impression d'y assister, d'être soudain témoin de chaque scène, la caméra s'insinue, se fait oublier et saisit les instants porteurs de vérités interessantes avec subtilité et génie.
Comme souvent Pialat demande au spectateur de faire un effort ; un effort de culture et de recherche historique sans doute, mais aussi et surtout un effort d'accommodation avec les personnages qu'il présente : on n'entre pas comme ça dans son cinéma et si on n'en est pas content, on n'a qu'à aller se faire voir ailleurs (ou, comme on dit en Provence, aller chez le contentier où on achète pour deux sous de contentement). À preuve la structuration hachée, brutale du film, à la limite de la rudesse : à quelques exceptions près, sur quoi je reviendrai, Van Gogh
est bâti sur des séquences courtes, qui ne sont pas toujours directement reliées entre elles et dont la survenue n'est pas toujours forcément justifiée par le récit. Séquences qui sont avant tout des coups de projecteur sur les dernières semaines de la vie du peintre dans une fin de printemps et un début d'été lumineux.
On sait au moins depuis L'important c'est d'aimer quel acteur extraordinaire peut être Jacques Dutronc,
capable de porter dans son sourire et dans ses yeux toute la détresse du monde ; et on regrette bien que le talent de Bernard Le Coq
n'ait pas été davantage apprécié des réalisateurs ; j'ai aussi trouvé Gérard Séty bien meilleur que d'habitude (notamment que dans Les espions
de Clouzot
qu'il contribuait à plomber sévèrement). La beauté d'Elsa Zylberstein
est exceptionnelle et Alexandra London,
qui interprète la fille du docteur Gachet, qui va devenir la maîtresse de Van Gogh est fraîche à ravir.
Mais une oeuvre superbe, parcourue d'émotion, de fièvre, d'intensité. Comment n'ai-je pas aimé Pialat plus tôt et plus fort ?
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