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Sujet : Après Riz Amer, on attend les autres De Santis !

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De Arca1943, le 18 juillet 2006 à 15:16

Et plus vite que ça! serais-je tenté d'ajouter. Non, mais c'est vrai, quoi : ces éditeurs, il faut savoir leur parler dans le casque ! (Québécisme qui signifie : engueuler).

Voici ce qu'on dit de Chasse tragique sur le site film.tv.it : « Un grande film di De Santis, il "neorealista" più attento agli elementi spettacolari del cinema di genere (qui, un camion-diligenza). Sceneggiatura "all'americana" scritta tra gli altri da Michelangelo Antonioni e Cesare Zavattini. »

Traduction maison (sous toutes réserves) : « Un grand film de De Santis, le "néorealiste" le plus attentif aux éléments spectaculaires du cinéma de genre (ici, un camion-diligence). Scénario "à l'américaine" écrit entre autres par Michelangelo Antonioni et Cesare Zavattini. »

Le camion qui transporte les nouveaux mariés Massimo Girotti et Carla Del Poggio transporte aussi quatre millions de lires appartenant à la coopérative agricole, escortés (si j'ai bien compris) par des officiers de la poste. Voilà qu'un couple de brigands (Vivi Gioi et Andrea Cecchi) attaquent le camion, tuent l'escorte et prennent la Del Poggio en otage. Les paysans de la coopérative organisent alors la chasse aux voleurs.

D'où le titre de "diligence" que le critique anonyme de film.tv.it accolle au camion : ça leur a fait penser à un western. Et pourquoi pas? On sait qu'en matière de western, les Italiens savent (ou ont su) se débrouiller…

Sur les rapports entre le néoréalisme et la critique de cinéma de son époque, il y aurait beaucoup à dire. Et notamment, que le culte du néoréalisme "pur", pour ainsi dire, était un non-sens, parce que ça amène à idolâtrer, en somme, seulement trois ou quatre chefs-d'oeuvre – comme Rome, ville ouverte et Umberto D – et à tenir en haute suspicion tous les autres. Or, ce que l'on découvre en revenant sur ces temps héroïques du cinéma italien, c'est que le "langage" du néoréalisme a très rapidement migré, n'est pas du tout resté "pur", s'est disséminé dans toutes les directions; un peu comme quand on vaporise un fertilisant.

Ainsi De Santis introduit dans le néoréalisme des éléments plus "populaires" (et spectaculaires) issus du film d'action, du film noir… voire ici, disons un peu à la blague, du western. Lattuada, de son côté, fait un peu la même chose avec Le Bandit et Sans pitié; en plus il introduira aussi dans la dramaturgie néoréaliste l'influence des grandes classiques russes (Le Moulin du Pô, Le Manteau). De leur côté, Luigi Zampa (avec Vivre en paix) Renato Castellani (avec Deux sous d'espoir) et aussi Luciano Emmer (Les Fiancées de Rome), y introduisent l'humour – avec parfois la complicité du grand scénariste Sergio Amidei. Et ainsi de suite.

Or, les critiques du temps, enamourés de dogmes, de manifestes, de doctrines – et désireux de rester à jamais dans les ruines fumantes de l'immédiat après-guerre ?!? – voient dans tous ces croisements un affaiblissement, un effritement, une perte d'altitude (et aussi la perte de la soi-disant "spécificité filmique"), alors que selon moi il faut y voir le contraire : une preuve de vitalité, de dynamisme; un humus nourricier qui influence (et transforme) profondément l'expression audio-visuelle de son temps. Et si le "néo" (au sens "pur et dur") s'éclipse plus ou moins à l'orée des années 50, le réalisme tout court, lui, s'est glissé par tous les interstices jusque dans la comédie, jusque dans le mélodrame et le film policier. Quant au western, eh bien, il y en a eu plusieurs pour voir l'ombre portée du néoréalisme dans Il était une fois dans l'Ouest

Bon. Mais pour revenir à nos moutons, rééditons les films de Giuseppe De Santis ! Rééditons Chasse tragique ! Je veux voir cette fameuse attaque de diligence… Mais au fond,(à VincentP, qui m'a démasqué récemment sur le fil du Jeu avec le feu) n'est-ce pas surtout parce que je veux revoir la superbe Carla Del Poggio ?


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De Arca1943, le 23 février 2008 à 19:19

Plus d'un an a passé depuis ce message sur Chasse tragique, avec Vivi Gioi et Carla Del Poggio. Mais rien, rien de rien à l'horizon : le classique Riz amer reste toujours le seul réédité parmi les films du grand réalisateur italien Giuseppe De Santis. Ne me dites pas que 50-60 ans plus tard, on lui fait encore grief de sa conception "trop spectaculaire" du néoréalisme…? Ou alors, rédigons un affidavit certifiant une fois pour toutes que ce ne n'est pas du "vrai" néoréalisme, mais qu'on les sorte en DVD, bon sang !

Enfin quoi, rééditez au moins Onze heures sonnaient ! Mais je crois que la plupart valent la peine : Chasse tragique, Pâques sanglantes, 'Un Marito per Anna Zaccheo' (avec Silvana Pampanini), 'Hommes et loups' (avec Yves Montand et Silvana Mangano) La Route d'une année, Marcher ou mourirDe Santis, c'est du grand cinéma, spectaculaire et vigoureux, tout en restant quand même passablement réaliste.

À un moment où les vannes semblent en passe de s'ouvrir pour ce qui est de la "présence italienne" sur DVD en France, il faudrait trouver moyen de glisser un ou deux De Santis dans le lot. Pour commencer !


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De vincentp, le 9 juin 2022 à 09:37
Note du film : 4/6

4,5/6. Chasse tragique (1947), œuvre emblématique du néo-réalisme italien d'après-guerre, a de mon point de vue plutôt mal vieilli, le scénario suscitant des interrogations à plusieurs reprises (j'ai cru comprendre que la chasse à l'homme était organisée par le parti communiste, à l'écart des autorités policières, mais c'est une supposition de ma part). Les psychologies, les déroulés de faits, me semblent également peu crédibles par moments. Chasse tragique est une oeuvre engagée politiquement, placée sous obédience communiste (de Santis était engagé au sein du parti communiste italien). Le récit se déroule dans la plaine du Pô, à un moment ou les agriculteurs prennent le relai des démineurs. Des mouvements d'appareils spectaculaires, la forme est de qualité (mais pas exceptionnelle). Intérêt de l'oeuvre : la représentation des groupes humains, compacts et unitaires, comme le cinéma soviétique a pu le montrer. A mon sens, Chasse tragique est avant-tout une curiosité aujourd'hui, destinée à des cinéphiles comme Arca1943 ou des historiens, plus qu'une oeuvre de référence cinématographique.


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